La fraude douanière oppose la Suisse à l’Europe
Place aux choses sérieuses. Après avoir discuté mercredi des produits agricoles transformés, la Suisse et l'Union européenne (UE) entament des négociations sur la fraude douanière. Elles ont débuté jeudi à Berne, sans résultats concrets. Car les divergences sont très grandes.
La contrebande de tabac, spiritueux et autres produits soumis à des impôts indirects élevés rapporte gros. Mais pour les Etats, ce délit est aussi synonyme de lourdes pertes. Selon Berne, il n’est d’ailleurs pas rare que, dans les demandes d’entraide judiciaire, les chiffres cités s’élèvent à des dizaines de millions.
De trop longues procédures
Or, selon l’UE, ces activités sont souvent organisées et exécutées par des personnes domiciliées en Suisse. Compte tenu de notre législation, ils auraient en effet moins de risques d’être poursuivis.
Autres reproches: l’entraide administrative et judiciaire suisse est insuffisante, les procédures sont trop longues, les inculpés ont trop de recours possibles et certaines données sont difficiles d’accès, en raison du secret bancaire et judiciaire.
L’UE veut donc résoudre cette question rapidement. Et fait de ce dossier une priorité, au même titre que la question de la fiscalité de l’épargne.
Quant à la Suisse, elle estime que cette contrebande va à l’encontre de ses intérêts financiers, et nuit à sa renommée internationale. Mais surtout, elle souhaite, en contrepartie, avancer sur les dossiers du système de Schengen (sur la coopération policière et judiciaire en Europe) et de la Convention de Dublin (déterminant le pays responsable d’une demande d’asile).
Le plus dur reste à faire
Les négociations ont donc pu débuter, ce jeudi après-midi. Cette première rencontre n’a cependant pas amené de résultats concrets. Il s’agissait surtout d’analyser la situation actuelle et les questions de procédure.
Le plus dur reste donc à faire. Car si les Quinze et Berne sont d’accord sur les points relatifs à la stricte lutte contre les délits douaniers, les positions sont en revanche très différentes pour les questions qui dépassent strictement le domaine douanier.
«L’UE aimerait conclure un accord selon lequel l’entraide administrative et judiciaire est donnée pour tout acte illégal, résume le chef de la délégation suisse, Rudolf Dietrich. Nous jugeons nécessaire de définir précisément les délits pour lesquels l’entraide est accordée».
Autres divergences: la Suisse veut notamment appliquer le principe de la double pénalité (selon lequel l’entraide administrative et judiciaire est accordée seulement lorsque le délit est punissable à la fois dans l’UE et en Suisse), celui de la spécialité (les pièces fournies par l’étranger ne doivent être utilisées que dans les procédures pour lesquelles elles ont été demandées).
Bref, les deux parties ont encore du travail devant elles. Une nouvelle rencontre a été fixée pour le mois de septembre à Bruxelles. Mais Rudolf Dietrich n’en dit pas plus: «c’est absolument impossible de savoir quand est-ce que nous réussirons à finaliser un accord», conclut-il.
Caroline Zuercher
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