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Un ancien des Brigades rouges jugé à La Chaux-de-Fonds

Marcello Ghiringhelli aurait préparé un hold-up en Suisse. Accusé de complicité, un couple neuchâtelois passe également en justice. L’ex-brigadiste avait été condamné à la perpétuité pour avoir tué deux vigiles en 1982. L’Italie réclame son extradition.

La justice reproche à Marcello Ghiringhelli (à gauche) d’avoir préparé un hold-up en Suisse. Accusé de complicité, un couple neuchâtelois passe également en procès. L’ex-brigadiste avait été condamné deux fois à la perpétuité pour avoir tué deux vigiles à Turin en 1982. L’Italie réclame son extradition.

Ses compagnons de lutte l’ont surnommé «le fou». A juste titre sans doute, puisque Marcello Ghiringhelli, qui comparaît vendredi devant le Tribunal correctionnel de La Chaux-de-Fonds, s’est taillé dans l’Italie «des années de plomb» – les années 70 – une réputation d’enfer. Une réputation qui va sans doute peser sur son procès et celui de Marina, une maîtresse d’école enfantine licenciée par l’Etat à la suite de cette affaire, et Michel, un menuisier. Ce jeune couple neuchâtelois a été emprisonné pour avoir hébergé, en janvier dernier, l’ancien des Brigades Rouges, en cavale.

L’homme et la femme, membres de la mouvance anarchiste des Montagnes neuchâteloises, affirme n’avoir pas eu connaissance du passé de Ghiringhelli. Ce dont doute la justice neuchâteloise qui leur reproche d’avoir entravé l’action pénale. Pour sa défense, la jeune femme affirme qu’il est normal d’accueillir chez soi quelqu’un paraissant en difficulté, sans avoir à le dénoncer à la police. Mais la justice reproche également à la jeune femme d’avoir acheté les cagoules, destinées à commettre un hold-up avec l’assentiment tacite de son compagnon.

Habitué des prétoires, Marcello Ghiringhelli, 57 ans, nie en bloc l’essentiel et reconnaît les faits moins graves qui lui sont reprochés. Ainsi, il affirme n’avoir jamais eu l’intention de commettre le hold-up qu’on lui reproche d’avoir préparé. Il conteste également l’accusation portant sur «l’acquisition» illégale d’armes (un revolver, un kalachnikov et de la munition). «Les armes, c’est à moi», avait-il déclaré à l’audience préliminaire. L’ancien brigadiste a reconnu en revanche l’inculpation de faux dans les titres. Difficile de faire autrement. Lors de son interpellation, le 29 janvier dernier à La Chaux-de-Fonds, il était détenteur de fausses cartes d’identité libellées sous quatre noms différents

Le parcours de Marcello Ghiringhelli est des plus atypiques, y compris dans la mouvance de l’extrême-gauche européenne qui recrutait essentiellement dans la bourgeoisie citadine. Délinquant de droit commun, il s’est converti, sur le tard, à la lutte armée au nom d’un idéal politique révolutionnaire. C’est en effet à la prison de Naples, où il purgeait une peine de prison de huit ans pour avoir blessé un carabinier lors d’un braquage d’une boîte de nuit, qu’il est entré en contact avec des militants des BR. Très vite, il va s’illustrer par la violence de ses actes en tant que membre de la branche «parti de la guérilla». Arrêté le 2 décembre 1982 au centre de Turin, il sera condamné en 1984 à la perpétuité et une seconde fois à la même peine pour participation à bande armée, responsable entre 1980 et 1982 de dix homicides, quatre enlèvements et autres hold-up. Son geste le plus spectaculaire? L’exécution de sang-froid le 21 octobre 1982 de deux vigiles en les obligeant à s’agenouiller au cours d’un hold-up dans une banque à Turin. Son incarcération a mis définitivement un terme aux activités de la redoutable colonne turinoise des Brigades rouges qu’il s’était employé à reconstituer après un premier démantèlement, obtenu grâce aux confessions de Patrizio Pecci.

Après seize ans passés en prison, l’ex-brigadiste a profité, le 27 décembre dernier, d’un régime de semi-liberté pour se réfugier en Suisse et demander l’asile politique après son arrestation, le 29 janvier près de la gare de la Chaux-de-Fonds. Une demande qui a été rejetée en février dernier. Les autorités de la péninsule ont demandé son extradition. La Suisse a accepté en août cette demande qui fait l’objet d’un recours sur lequel le Tribunal fédéral doit encore statuer. Marcello Ghiringhelli est défendu par l’avocat zurichois Bernard Rambert. Ce dernier est également le défenseur de l’ex-terroriste fribourgeois Marc Rudin qui fait l’objet d’une enquête en Suisse après avoir purgé une peine de huit ans de détention au Danemark.

Marcello Ghiringhelli semble cultiver la spécificité de son itinéraire. Rien à voir avec ses ex-camarades. Il refuse de jouer le rôle du «martyr de la révolution», ni celui, très en vogue, des «repentis». Sa voie à lui c’est le silence. Un silence qu’il lui sera difficile de garder face au tribunal de la Chaux-de-Fonds.

Jugurtha Aït-Ahmed

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