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L’initiative contre le mitage mord la poussière

Un chantier de construction
La hausse de la population suisse s'accompagne d'un nombre important de nouvelles constructions, comme ici à Winterthur. © KEYSTONE / EQ IMAGES / Moritz Hager

Les Suisses ne veulent pas geler les zones à bâtir pour préserver les espaces verts. Ils ont largement voté non ce dimanche à l’initiative populaire contre le mitage du territoire.


Les écologistes n’ont pas réussi à convaincre le peuple suisse. L’initiative populaire des Jeunes Verts contre le mitage du territoire a été rejetée dimanche à la majorité des cantons et à 63,7% des votants. Le taux de participation s’est élevé à 37%.

Aucun canton n’a soutenu le texte. Le rejet le plus net apparaît en Valais, avec 78% de votes défavorables à l’initiative. C’est dans le canton de Genève que le non est le plus timide: il s’élève à 52%. Quelques grandes villes romandes ont malgré tout accepté l’initiative: c’est le cas de Lausanne, Genève, Fribourg, Bienne, La Chaux-de-Fonds et Neuchâtel.


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Inquiets de voir le nombre de constructionsLien externe augmenter en Suisse et grignoter toujours davantage les terrains agricoles et les espaces verts, les jeunes écologistes ont déposé en 2016 l’initiative populaireLien externe «Stopper le mitage – pour un développement durable du milieu bâti». Le texte voulait inscrire le gel des zones à bâtir dans la Constitution fédérale, sans limitation dans le temps. La création d’une nouvelle aire habitable n’aurait été admise que si une autre surface de taille équivalente était déclassée de la zone à bâtir.

Le bétonnage de la Suisse est un thème qui préoccupe les autorités et la population depuis plusieurs années. Une révision de la Loi sur l’aménagement du territoireLien externe a déjà été acceptée en votation populaire en 2013, afin de limiter l’extension des zones à bâtir et de densifier les habitations. Des mesures jugées efficaces par le gouvernement, le parlement et les partis politiques de droite, qui s’opposaient à l’initiative contre le mitage. La gauche considérait en revanche ces dispositions comme insuffisantes, c’est pourquoi elle soutenait le texte des Jeunes Verts.


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«Manque de patience»

Jacqueline de Quattro, conseillère d’Etat vaudoise du Parti libéral-radical (droite), a critiqué sur les ondes de la Radio Télévision Suisse (RTS) le «manque de patience des initiants». Elle a rappelé que la mise en œuvre de la Loi sur l’aménagement du territoire est en cours et «implique un travail de longue haleine».


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Il s’agit d’une «défaite sanglante» pour les Jeunes Verts, estime de son côté la conseillère nationale du Parti démocrate-chrétien (PDC, centre droite) Géraldine Marchand-Balet. Elle constate que «le peuple suisse a réellement compris les enjeux et le danger d’une telle initiative.»

Trouver des solutions ensemble

Malgré ce résultat, les Jeunes Verts gardent le sourire. «Cette initiative a permis de maintenir le débat» sur l’expansion des zones à bâtir, a réagi leur coprésident, Kevin Morisod. Les écologistes vont maintenant être particulièrement attentifs à la deuxième révision de la Loi sur l’aménagement du territoire. Ils ont l’intention de déposer une nouvelle proposition en lien avec cette thématique.

Pour Valentin Dujoux, également coprésident des Jeunes Verts, il est important de maintenir le dialogue et de trouver une voie médiane dans le domaine de l’aménagement du territoire.

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Remise en question

Il existe actuellement un clivage majeur entre ceux qui veulent bétonner et ceux qui veulent conserver les terrains agricoles, relève Axelle Marchon, architecte. «Nous devrions peut-être avoir une remise en question sur ce qu’on construit et comment on le construit», propose-t-elle, afin d’intégrer au critère du rendement financier des critères sociaux et environnementaux.

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Ce rejet massif de l’initiative contre le mitage «n’est pas une preuve d’indifférence face aux transformations du paysage, mais la marque d’une grande confiance dans les autorités et leur gestion nouvelle du territoire», analyse Le TempsLien externe

«La marque d’une grande confiance dans les autorités»
Le Temps

Selon le quotidien, la votation sur la Loi sur l’aménagement du territoire en 2013 et celle sur le mitage en 2019 étaient trop rapprochées. La population ne voulait pas réellement revenir sur le sujet alors que les autorités ont tout juste commencé à exploiter de nouveaux outils. Le journal rappelle toutefois que le débat n’est pas terminé, puisqu’une nouvelle révision de la loi fédérale est en cours.

Relancer le débat sur l’étalement était une bonne chose, commente le Tages AnzeigerLien externe, mais la démarche est risquée. Ce résultat très clair des urnes pourrait être instrumentalisé, met en garde le quotidien, en l’interprétant comme un vote en faveur des zones à bâtir. 

«Éviter une dangereuse instrumentalisation»
Tages Anzeiger

Les partisans d’un interventionnisme moindre pourraient se dire: «Avec un rejet aussi net de l’initiative, les Suisses ne peuvent pas être favorables à une protection efficace du paysage – laissons donc les zones à construire évoluer librement, loin de toute agitation.» Le journal appelle donc «les autorités responsables à éviter une dangereuse instrumentalisation de cette décision objective et juste du peuple suisse».

Vue aérienne d un quartier d habitation
Vue aérienne d’un quartier d’habitation, au bord des champs du village d’Etoy dans le canton de Vaud, en 2013. Keystone


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