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Le bilan d’un secrétaire d’Etat en partance

Franz von Däniken, de la Confédération à la Fondation Drosos... Keystone

Franz von Däniken, Secrétaire d’Etat au Ministère suisse des Affaires étrangères (DFAE), quittera ses fonctions à la mi-février.

Le conseiller de la ministre Micheline Calmy-Rey évoque son travail au Palais fédéral dans une interview à swissinfo.

swissinfo: Franz von Däniken, pourquoi quittez-vous un poste que vous avez vous-même qualifié de «fascinant»?

Franz von Däniken: Cela fait maintenant plus de cinq ans que j’exerce la fonction de secrétaire d’Etat. Une activité qui m’a beaucoup appris et enrichi.

Et c’est pourquoi la question s’est posée, surtout après la conclusion des négociations bilatérales II, d’assumer de nouvelles tâches diplomatiques ou de me lancer dans quelque chose de nouveau. Et je me suis décidé pour la deuxième option.

swissinfo: Vous allez représenter la Fondation Drosos. Avez-vous déjà une idée de la direction que vous allez lui donner?

F. v. D.: La Fondation n’en est qu’à ses débuts et s’est fixé des buts larges. En gros, il s’agit de contribuer à l’amélioration des conditions de vie à l’échelle de la planète. Cela peut comporter, entre autres, des projets de développement.

La fondation mettra un accent particulier à l’encouragement de la créativité chez les jeunes. Un troisième but consiste à aider les malades. Mais ce sont des buts si généraux qu’il faudra développer des concepts et des projets précis.

swissinfo: Qui se tient derrière cette fondation?

F. v. D.: Les donateurs souhaitent conserver l’anonymat. Il faut respecter ce vœu. La fondation ne veut pas mettre en avant des personnalités, mais des projets concrets.

swissinfo: Ces secrets ne sont-ils pas un peu délicats? Récemment, une élue à la Chambre des cantons a failli trébucher pour avoir reçu de l’argent d’une fondation.

F. v. D.: Ce danger n’existe pas dans le cas de la Fondation Drosos. La provenance des moyens financiers est très claire.

swissinfo: Votre départ est-il lié aux mesures d’économie au sein de votre ministère?

F. v. D.: Non! Mais il survient à un moment où tous les ministères sont dans l’obligation de passer au crible leurs tâches et de réaliser des économies.

Le Ministère suisse des Affaires étrangères est, en comparaison avec d’autres départements, relativement épargné. Son budget atteint à peine 3% de celui de la Confédération. Mais il doit lui aussi prendre des mesures douloureuses.

swissinfo: Que représente pour vous la conclusion des accords bilatéraux?

F. v. D.: Ces accords permettent de régler des problèmes, ils sont intéressant économiquement et resserrent la collaboration avec l’Union. Ils servent les intérêts de la Suisse.

Nous avons concédé des points importants à l’Union européenne, notre voisine. Dans d’autres domaines, c’est celle-là qui a fait des concessions.

L’avantage politique de ces accords est qu’ils ont un sens, que la Suisse n’adhère jamais à l’UE ou qu’elle y adhère ultérieurement. Ils n’anticipent rien, ils sont utiles dans les deux cas. C’est leur charme.

swissinfo: Quelles sont les chances des accords bilatéraux II devant le peuple?

F. v. D.: Les Chambres fédérales, j’en suis convaincu, vont approuver ces accords. Et donc envoyer un signal important en cas de votation populaire sur l’un ou l’autre d’entre eux.

swissinfo: Vous vous êtes toujours dit favorable à une adhésion à l’UE. Pourquoi, selon vous, la Suisse a-t-elle besoin de partenaires, d’alliances?

F. v. D.: Les relations internationales sont devenues si complexes, l’internationalisation est tellement avancée dans tous les domaines de la vie qu’il serait illusoire de croire que la Suisse peut affronter seule les défis du futur.

En outre, nous avons des intérêts à protéger. Il suffit de comparer pour comprendre que nous pouvons le faire au mieux avec des pays dans la même position.

swissinfo: Que pensez-vous personnellement d’une adhésion à l’UE?

F. v. D.: Contrairement à d’autres, je n’ai pas toujours été convaincu que la Suisse doit tendre vers une adhésion. J’y suis venu dans les années 80, pendant lesquelles j’ai travaillé cinq ans à la Mission auprès de la Communauté européenne à Bruxelles.

swissinfo: La création d’une zone de libre-échange avec les Etats-Unis serait-elle une autre possibilité?

F. v. D.: Cette question m’occupe beaucoup actuellement. Différents arguments plaident en faveur d’une discussion avec les Etats-Unis sur la conclusion d’un accord de libre-échange.

Ces dernières années, la Suisse en a conclu avec de nombreux pays. Je ne vois pas pourquoi nous n’essaierions pas aussi d’aborder la question avec un partenaire économique aussi important pour la Suisse que les Etats-Unis.

swissinfo: Quel rôle jouent les quelque 600’000 Suisses et Suissesses de l’étranger dans la diplomatie suisse?

F. v. D.: La reconnaissance de la Suisse à l’étranger dépend fortement de la reconnaissance de nos compatriotes à l’étranger. Des communautés très actives contribuent de manière importante au rayonnement de la Suisse.

swissinfo: Ils sont seulement plus de 80’000 à exercer leurs droits civiques. N’est-ce pas trop peu?

F. v. D.: Je crois que nous pouvons améliorer cela avec une information régulière sur l’évolution politique en Suisse.

swissinfo: Quel est le rôle de la Suisse à l’avenir?

F. v. D.: La Suisse tient une place importante dans le monde, de par sa tradition humanitaire, sa contribution impartiale à la solution des conflits, son engagement dans les pays du Sud.

Dans le domaine de la promotion de la paix, la Suisse a amélioré sa visibilité ces dernières années. Nous n’avons pas de passé douteux, nous n’avons pas d’intérêts stratégiques cachés, nous sommes d’«honnêtes intermédiaires».

Interview swissinfo: Christian Raaflaub
(Traduction de l’allemand: Isabelle Eichenberger)

– Agé de 55 ans, Franz von Däniken est depuis 1999 chef de la direction politique du Ministère suisse des Affaires étrangères (DFAE).

– Le conseiller de la ministre Micheline Calmy-Rey est diplomate depuis 1976.

– A la mi-février 2005, il quittera la diplomatie pour prendre la tête de la Fondation Drosos.

– Cette fondation, dont les donateurs restent dans l’anonymat, a été créée à la fin de 2003 et suit des buts philanthropiques.

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