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Liste noire: la Suisse obtient des signaux positifs

La poignée de main entre Hans-Rudolf Merz (à gauche) et Gordon Brown constitue une garantie. Absolue? Keystone

Londres s'opposera à l'inscription de la Suisse sur la liste noire de l'OCDE. C'est ce qu'a assuré le Premier ministre britannique au chef suisse des Finances ce week-end à Londres. Parallèlement, le mouvement vers plus de transparence fiscale s'accentue.

«J’ai soumis la question de cette fameuse liste noire à Gordon Brown», a expliqué le ministre suisse des Finances Hans-Rudolf Merz, «et il m’a affirmé qu’il partageait mon souci et qu’il fallait tout faire pour éviter une telle situation.»

Un jour après l’annonce de l’assouplissement du secret bancaire helvétique et à deux semaines et demie du sommet très attendu des chefs d’Etats le 2 avril à Londres, Hans-Rudolf Merz a discuté samedi avec le chef du gouvernement britannique au «10 Downing Street».

Le conseiller fédéral pense connaître suffisamment bien l’ancien Chancelier de l’Echiquier pour être quasi sûr que la Suisse ne figurera pas sur la liste noire de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).

Mais il a également reconnu que la garantie britannique n’était pas absolue. Leur rencontre s’est tenue en marge de la réunion préparatoire des ministres des finances du G20 à Horsham, dans le sud de l’Angleterre, laquelle a abouti à peu d’avancées concrètes. Les ministres s’y sont notamment entendus sur une augmentation «très significative» des ressources du Fonds monétaire international (FMI), mais ne l’ont pas chiffrée.

Un strapontin au G20

Pour sa part, la Suisse n’a pas été conviée au G20, mais elle a tout de même pu envoyer une délégation à Horsham. Présidée par le conseiller fédéral, celle-ci a participé à une réunion extraordinaire du Comité monétaire et financier international du FMI, à l’issue de la journée de travail des ministres des finances et des directeurs des banques centrales.

Hans-Rudolf Merz a également plaidé auprès de Gordon Brown pour que la Suisse participe à l’avenir aux travaux du G20, au moins à un niveau technique. «J’ai offert nos services dans les groupes de travail, car c’est là où l’on prépare les décisions», a-t-il indiqué.

Le président de la Confédération estime que la place financière suisse a suffisamment d’expérience, de ressources, de personnalités pour faire valoir sa place, au moins sur un strapontin au G20. Le Premier ministre britannique lui a promis de s’engager pour qu’une telle contribution se concrétise.

La Suisse a agi à temps

Pressé sur la question du retournement de la Suisse de dernière minute vis-à-vis du secret bancaire, Hans-Rudolf Merz ne pense pas que ce revirement ait eu lieu trop tard.

«Si nous avions été le premier Etat à faire cela, on nous aurait dit que tous les clients allaient désormais fuir la Suisse et rejoindre des places telles que Singapour ou Hong Kong. Mais comme toutes ces places ont annoncé leur décision la même semaine, on ne peut pas dire que c’est un affaiblissement pour notre pays.»

Washington encourageant

Le ministre suisse des finances a également reçu des signaux positifs d’autres Etats. En effet, son déplacement en Grande-Bretagne avait également pour objectif d’organiser une rencontre avec son homologue américain Timothy Geithner afin d’aborder le dossier épineux des comptes UBS.

Cela n’a pas été possible. Hans-Rudolf Merz a pu toutefois s’entretenir avec le secrétaire américain au Trésor par téléphone vendredi. Ce dernier lui a dit qu’il se réjouissait de la coopération de la Suisse. De son côté, le ministre suisse a dit juger la discussion positive pour les négociations à venir.

La Suisse n’est plus sur la défensive

En Suisse, plusieurs ministres se sont exprimés dans la presse dominicale à propos de l’assouplissement du secret bancaire.

La cheffe des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey a expliqué dans la NZZ am Sonntag que la Suisse pouvait désormais exiger que les autres places financières remplissent les mêmes standards internationaux qu’elle.

Pour renégocier les accords de double imposition, la responsable du Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) va se rendre prochainement à Paris, Rome et Berlin. Elle souligne encore qu’il était pour elle clair depuis longtemps que la distinction entre évasion fiscale et fraude fiscale ne pouvait plus être maintenue.

Le ministre de la Défense Ueli Maurer ne partage pas cet avis. Il est d’ailleurs le seul à avoir proposé au gouvernement de renvoyer le dossier. Selon lui, la Suisse est toujours sous pression. Il faut donc s’attendre à ce qu’on lui demande de souscrire à l’échange automatique d’informations en matière fiscale.

Pour Ueli Maurer, les membres du G20 ne sont pas légitimés pour mettre la Suisse sur une liste noire. Il estime que la Suisse aurait pu faire appel à un tribunal arbitral international et le laisser décider si la procédure du G20 était juridiquement correcte.

swissinfo, Catherine Ilic à Londres

G20. Le 2 avril à Londres, les pays riches du G20 plancheront sur la crise du système financier international et sur les paradis fiscaux.

Pressions. Aux Etats-Unis et au sein de l’UE, le secret bancaire et les pratiques liées à l’évasion fiscale de la Suisse, du Liechtenstein, de l’Autriche, du Luxembourg et de la Belgique sont attaquées.

Liste. La France a menacé de demander l’inscription de la Suisse sur une liste noire du G20. Paris et Berlin ont aussi proposé que les pays du G20 rompent les conventions bilatérales avec les pays «non coopératifs».

Le mouvement vers plus de transparence en matière fiscale s’est accentué cette semaine.

La Suisse, le Liechtenstein, la Belgique, l’Autriche, le Luxembourg et Andorre ont annoncé des mesures visant à assouplir leur secret bancaire. Monaco a suivi le mouvement.

L’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) a également relevé vendredi des avancées à Singapour, Hong Kong, l’île de Man et aux Iles Caïmans.

Dimanche, l’organisation s’est officiellement félicitée de l’engagement de plusieurs pays et territoires en vue d’«améliorer la transparence et l’échange d’informations fiscales.»

Le ministre allemand des Finances Peer Steinbrück s’est lui montré beaucoup plus sceptique.

Il a affirmé que «de nombreuses promesses ont été faites par le passé qui n’ont pas été tenues». Cette remarque concernait la Suisse, mais aussi l’Autriche et le Luxembourg.

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