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Les centrales nucléaires à l’épreuve de la démocratie directe

Pour ou contre un arrêt rapide des centrales nucléaires? Les avis sont très partagés non seulement sur les affiches de campagne, mais aussi au sein de la population. Keystone

Doit-on limiter la durée de vie des centrales nucléaires suisses à 45 ans? Le peuple s'est prononcé sur cette question dimanche. En cas d’acceptation de l’initiative populaire «Pour la sortie programmée du nucléaire», trois des cinq réacteurs du pays seront débranchés en 2017 déjà. swissinfo.ch vous livrera au cours de l'après-midi tous les résultats de ce scrutin qui s'annonce serré. 

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Le dernier sondage réalisé par l’institut gfs.bern pour le compte de la Société suisse de radio télédiffusion (SSR) donnait partisans et adversaires de l’initiative au coude à coude, avec une légère avance pour les premiers. 

Lancée par les Verts, l’initiative populaire «Pour la sortie programmée du nucléaireLien externe» demande deux choses. D’une part, l’interdiction de l’exploitation de centrales nucléaires destinées à produire de l’électricité ou de la chaleur. D’autre part, la limitation à 45 ans de l’exploitation des cinq réacteurs nucléaires actuellement en service en Suisse. 

En cas d’acceptation de l’initiative, cela signifierait concrètement l’arrêt des réacteurs de Mühleberg (Berne) ainsi que de Beznau I et Beznau II (Argovie) en 2017 déjà. Les réacteurs de Gösgen (Soleure) et de Leibstadt (Argovie) seraient quant à eux débranchés respectivement en 2024 et 2029.

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Une sortie du nucléaire voulue par le gouvernement 

Quelques semaines après la catastrophe nucléaire de Fukushima, au Japon, en mars 2011, le gouvernement suisse avait annoncé sa volonté de sortir du nucléaire à moyen terme. «Les centrales nucléaires actuelles devront être fermées à la fin de leur durée d’exploitation et ne pas être remplacées par de nouvelles», écrivait-il en mai 2011. 

Le gouvernement partait du principe qu’une centrale nucléaire pouvait être exploitée 50 ans en toute sécurité. Les fermetures devraient donc s’étaler dans le temps: Beznau I en 2019, Beznau II et Mühleberg en 2022, Gösgen en 2029 et Leibstadt en 2034. 

Les choses devraient même aller un peu plus vite à Mühleberg. L’exploitant – les Forces motrices bernoises – a annoncé début 2016 que la centrale serait définitivement fermée le 20 décembre 2019, car son maintien après cette date serait tout simplement trop cher. 

Risque massif» 

Se pose dès lors une question: pourquoi voter sur une telle initiative, puisque le gouvernement a déjà décidé la fin du nucléaire? Pour les partisans de l’initiativeLien externe, les centrales suisses ne sont plus assez sûres. Ils rappellent notamment que Beznau I est le plus vieux réacteur encore en service dans le monde. 

«Avec ces centrales vieillissantes, nous avons dépassé les limites possibles en matière de sécurité, écrit le comité d’initiative. Mühleberg et Beznau II font aussi partie des plus vieilles centrales au monde. Les parties centrales telles que le réacteur ne peuvent pas être rénovées et continuent de vieillir. Ce faisant, le risque qu’un accident se produise aussi en Suisse a massivement augmenté.» 

C’est pourquoi les auteurs de l’initiative misent davantage sur l’efficience énergétique et sur un développement de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables (hydraulique, solaire, éolien et biomasse). A leurs yeux, cette transition aurait en outre l’avantage de créer des places de travail dans tout le pays et la Suisse pourrait jouer un rôle moteur dans le domaine des énergies alternatives. 

L’initiative est soutenue par la gauche politique et syndicale, ainsi que par les mouvements de protection de l’environnement. Elle est en revanche combattue par la droite et les associations économiques. Le gouvernement et une majorité du Parlement recommandent également de voter contre cette initiative.

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Pro et anti-nucléaires sont au coude à coude

Ce contenu a été publié sur Ce 2e sondage réalisé par l’institut gfs.bern pour le compte de la Société suisse de radio-télédiffusion (SSR) indique que 48% des personnes interrogées sont favorables à l’initiative. La part des adversaires (46%) est à peine inférieure. Quant aux indécis, ils représentent encore 6% des sondés. Mais si les forces en présence sont pratiquement les mêmes,…

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Menace sur l’approvisionnement 

Les adversaires de l’initiative sont d’avis qu’une sortie prématurée du nucléaire conduira au chaos. Fermer trois réacteurs en 2017 déjà «c’est exactement le contraire d’une sortie du nucléaire sûre et ordonnée», écrit le comité. «C’est tout simplement impossible de réussir une planification aussi complexe en si peu de temps. Une fermeture aussi rapide apporterait simplement incertitude, dangers et chaos dans l’approvisionnement électrique suisse.» 

Les adversaires craignent que la Suisse souffre d’une pénurie d’approvisionnement et qu’elle soit de plus en plus souvent confrontée à des black-out, c’est-à-dire des périodes sans électricité. «Il est totalement illusoire de faire sortir de terre de telles capacités de production en l’espace de seulement une année», écrivent les adversaires. La Suisse ne peut, selon eux, se permettre un tel danger. 

Un autre argument important des adversaires est le fait que l’arrêt prématuré des centrales nucléaires obligerait la Suisse à importer de l’électricité issue de l’atome et du charbon, ce qui serait selon eux «hautement problématique». Par ailleurs, la Suisse deviendrait ainsi «encore plus dépendante de l’étranger». 

Les partisans rétorquent en affirmant que, jusqu’à aujourd’hui, aucune des prévisions annonçant des pénuries ne s’est avérée exacte et qu’il n’y aura pas besoin d’importer de l’électricité. «La couverture de notre consommation électrique future avec des énergies renouvelables et des mesures d’efficience énergétique est possible, d’après les scénarios détaillés de Greenpeace jusqu’en 2024. Les calculs prudents de l’Office fédéral de l’énergie montrent aussi clairement que c’est faisable», indiquent les partisans du texte.

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(Traduction de l’allemand: Olivier Pauchard)

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