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Un geste controversé pour le Jura bernois

Pour Mario Annoni (2e depuis la gauche), le surplus de pouvoir accordé au Jura bernois permet de maintenir un certain équilibre. Keystone Archive

Le canton de Berne veut accorder plus d'autonomie à une région. Ce projet inédit donne un nouvel éclairage au fédéralisme. Et dope le débat.

Le Jura bernois devrait en effet bientôt pouvoir mieux faire entendre sa voix. Et ceci à l’horizon 2004 ou 2006. Le conseil exécutif du canton de Berne a en effet présenté, vendredi, un arrêté octroyant de nouveaux pouvoirs à la région.

Ceux-ci seraient exercés par un «Conseil du Jura bernois», de 24 membres élus au suffrage universel. Le but: renforcer le statut particulier de cette région pour lui permettre de préserver sa culture, sa langue et son identité.

«C’est la formalisation du processus d’autonomisation de cette région», claironne Mario Annoni, conseiller d’Etat bernois et président de la délégation du Conseil exécutif pour les affaires jurassiennes

«Il n’existe, dit-il, aucun autre exemple comme celui-ci dans notre fédéralisme. Le canton de Berne est un canton bilingue qui a besoin d’une minorité francophone forte».

Une question d’équilibre, souligne Mario Annoni. Et s’il devait être rompu, il ne remplirait plus son rôle de balance au niveau national. Cela va donc bien plus loin qu’une «simple querelle cantonale.»

Tout à fait réalisable

Plusieurs voix considèrent que ce projet est tout à fait réalisable. C’est le cas d’Andreas Auer. «Accorder un statut d’autonomie au Jura bernois ne bouleverse en rien le fédéralisme», confirme le doyen de la Faculté de droit de l’Université de Genève. «Les communes constituent le fondement de la structure étatique helvétique.»

«C’est en effet une première en Suisse», confirme de son côté Jean-François Leuba, le président de l’assemblée interjurassienne. C’est la première fois que l’on donne une autonomie, certes limitée, à une région dans le cadre d’un canton.

Jean-François Leuba entend garder la tête froide. L’ancien conseiller d’état vaudois ne veut en rien préjuger de l’accueil que réserveront les habitants de la région à ce processus d’autonomisation.

Des voix discordantes

Les premières voix dissidentes n’ont pas tardé à se faire entendre. «C’est une coquille vide», tonne Maxime Zuber du Parti socialiste autonomiste.

Le maire de Moutier, également membre de l’assemblée interjurassienne et vice-président de la conférence des maires, dénonce un simple effet d’annonce et une réorganisation administrative de façade. «Le gouvernement bernois fait semblant d’avoir entendu les revendications des trois districts romands du canton.»

Pierre-André Comte abonde dans le même sens. Avec plus de virulence encore. «C’est une gigantesque farce. Il ne s’agit ni d’un Parlement régional ni d’un exécutif. Il n’y a aucune enveloppe budgétaire et les grands domaines ne sont pas pris en compte», lance le Secrétaire général du Mouvement autonomiste jurassien.

«On se moque du monde, conclut-il. En liant le sort de Bienne on tronque l’émancipation du Jura bernois. C’est simplement un numéro d’illusionniste de Mario Annoni.»

Quelle suite?

Quoiqu’il en soit, l’actuel Conseil régional du Jura bernois (l’organe représentatif de la région par rapport au canton) va bel et bien devoir prendre position dans les semaines à venir et renvoyer sa copie au gouvernement cantonal.

Il n’est d’ailleurs pas impossible qu’un vote populaire suive un référendum. «Pour l’instant, la position du Conseil régional n’est pas encore définie, explique Francis Daetwyler, député au Grand Conseil bernois et membre du Conseil régional du Jura bernois.

Avant de conclure: «Une chose est sûre, ces propositions vont dans la bonne direction. Elles représentent ce qu’il est possible de faire dans le cadre de la constitution cantonale.»

swissinfo/Mathias Froidevaux

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