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Une catastrophe humanitaire menace au Congo

Un homme portant son fils parmi les milliers de civils fuyant les combats à Goma. Keystone

L'escalade de la violence dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) menace d'avoir des conséquences tragiques pour toute la région, selon les Nations-Unies.

Mercredi, les rebelles de Laurent Nkunda sont arrivés aux portes de Goma, d’où les combats avec les forces gouvernementales et les pillages ont fait fuir des dizaines de milliers de déplacés.

«Cette situation dramatique n’est pas une surprise», a regretté Roland Anhorn, responsable de l’aide humanitaire dans la région pour la Direction du développement et de la coopération (DDC).

«Nous suivons la situation politique et militaire de près et les signaux d’alarme se sont multipliés ces derniers moi», explique-t-il à swissinfo. Nous n’avons pu que constater que, tant que la paix ne serait pas assurée, il y aurait des populations déplacées, des viols, des recrutements d’enfants soldats, etc».

Les récents combats ont fait fuir des milliers de civils vers la province du Nord Kivu, où se sont déjà réfugiés près d’un million de personnes, malgré la fin de la guerre de 1998 à 2003.

Mercredi, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon a mis en demeure le gouvernement congolais de contrôler ses troupes et d’aider les quelque 6000 soldats débordés de la Mission de paix de l’ONU en RDC (MONUC).

Les troupes congolaises, qui disent contrôler la ville, auraient tué au moins neuf personnes et pillés magasins et maisons pendant toute la nuit de mercredi à jeudi, selon des témoignages rapportés par Okapi, la radio soutenue par la Suisse dans la région.

Cessez-le-feu

Peu après l’appel de Ban Ki-moon, Laurent Nkunda a décrété jeudi un cessez-le-feu. Alors qu’il avait ignoré les appels répétés du Conseil de sécurité de l’ONU depuis janvier, il explique qu’il souhaite maintenant mettre fin au chaos à Goma.

Le général tutsi a aussi demandé des négociations directes avec Kinshasa, qu’il accuse d’association avec des miliciens hutu rwandais réfugiés dans l’est du pays après le génocide de 1994. Ce que le gouvernement de Joseph Kabila dément, accusant de son côté le Rwanda de soutenir Laurent Nkunda..

D’autre part, Laurent Nkunda s’oppose à un contrat de 9 milliards de dollars, donnant à la Chine l’accès aux ressources minières du pays.

Ban Ki-moon a envoyé deux émissaires, l’un à Kinshasa, l’autre à Kigali, afin d’empêcher tout risque d’un conflit direct entre la RDC et le Rwanda, les deux pays s’accusant mutuellement de bombardement de leur territoire.

Situation catastrophique

«La situation humanitaire est catastrophique. Les besoins sont multiples en nourriture, eau, secours médicaux et non alimentaires», a confirmé à Genève le Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

«Nous sommes très inquiets pour la sécurité des civils qui sont pris au piège entre les deux camps et de ceux qui ont pris la fuite», indique Max Hadorn, chef de la délégation du CICR en RDC.

Le personnel est maintenu à Goma, mais il n’a pas pu se déplacer hors de la ville et est confiné dans ses bureaux. «Nous craignons que les pillages se poursuivent et la situation est très tendue», a ajouté Max Hadorn.

De son côté, le Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a estimé mercredi qu’environ 45’000 personnes avaient fui le camp de Kibati au nord de Goma, alors que 30’000 environ n’étaient arrivés du nord que la veille, fuyant devant les rebelles. Depuis le regain d’affrontements au Nord-Kivu fin 2006, les agences humanitaires estiment le nombre de déplacés internes à près d’un million.

L’ONU et la communauté internationale doivent tirer parti du cessez-le-feu pour avancer sur le processus de paix rapidement, parce qu’aucune solution militaire au conflit n’est possible, a déclaré Kevin Kennedy, responsable de la communication de la MONUC.

swissinfo et les agences

L’est de la RDC est resté déchiré par les haines résiduelles du génocide rwandais de 1994, qui a vu le massacre d’au moins 800’000 Tutsi et Hutu modérés et l’exode de plus d’un million de Hutus au Congo.

Ces derniers ont créé des milices qui alimentent le conflit congolais. Reprochant au président Joseph Kabila de défendre ceux-là, le général tutsi Laurent Nkunda a quitté l’armée congolaise il y a quelques années pour prendre la tête des rebelles.

La Suisse est active dans la région des Grands Lacs (Rwanda, Burundi, Congo) depuis les années 60. L’aide au développement y a commencé en 1963 lors de l’Indépendance du Rwanda. Ce pays a été prioritaire pour Berne jusqu’au génocide de l’été 1994.

Au début des années 90, la Suisse a diversifié son aide humanitaires à la suite des crises et conflits au Rwanda (1990-1994), au Burundi (1993-2000) et en RDC (1996-2001).

Pendant cette période, la Suisse a participé à l’aide humanitaire et aux efforts de reconstruction au Rwanda, eu Burundi, en Tanzanie, dans l’est du Congo et le nord de l’Ouganda.

En 1998, la Confédération a commencé à faciliter le processus de paix au Burundi et en RDC, qui a notamment permis la conclusion des accords d’Arusha en 2000 et de Pretoria en 2002.

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