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Biden-Poutine: pourquoi Genève?

Genève n'a pas accueilli de sommet États-Unis-Russie depuis la rencontre historique entre Reagan et Gorbatchev en novembre 1985. Keystone / Salvatore Di Nolfi

Le président américain Joe Biden et le président russe Vladimir Poutine se rencontrent pour un sommet de crise le 16 juin prochain à Genève. Fredy Gsteiger de SRF explique pourquoi c’est Genève qui a été choisie.

Il s’agira de la première réunion de ce niveau entre les États-Unis et la Russie depuis le sommet Reagan-Gorbatchev de novembre 1985. Une rencontre saluée comme un succès diplomatique pour la Suisse. Le choix du lieu pour un événement aussi sensible et médiatique se décide en fonction de trois critères principaux.

Premièrement, l’infrastructure. Deuxième siège des Nations Unies après New York, Genève dispose incontestablement des installations nécessaires. La Russie et les États-Unis ont aussi à Genève d’importantes représentations diplomatiques, et des services secrets considérables. Les experts en sécurité de Moscou et de Washington connaissent les lieux. Un avantage lorsqu’il s’agit de protéger les deux dirigeants. 

Le signal que l’on veut envoyer compte aussi. Une rencontre Biden-Poutine aux États-Unis ou en Russie était hors de question. Les relations sont trop mauvaises pour que l’un ou l’autre acteur accepte une invitation en «territoire ennemi».

Aucun pays de l’OTAN n’était sur la table cette fois-ci, contrairement, par exemple, au sommet de Prague entre Barack Obama et Dmitri Medvedev, en 2010. Les Russes auraient à priori aussi refusé Helsinki, la Finlande travaillant de plus en plus étroitement avec l’OTAN. La neutre Helvétie était le choix qui s’imposait.

Le troisième critère a trait au rôle des relations bilatérales entre les participants au sommet et le pays-hôte. La Suisse est appréciée du Kremlin, d’autant plus qu’elle n’a pas suivi les sanctions occidentales contre la Russie. Et du point de vue des États-Unis, rien ne s’opposait à la Suisse cette fois-ci. Les temps où les fonds de l’Holocauste et le secret bancaire empoisonnaient le climat bilatéral sont révolus. Et le temps où Washington, sous George W. Bush, pensait que la politique étrangère suisse était trop pro-palestinienne et pro-iranienne aussi.

En résumé, ni Moscou, ni Washington n’avaient de raison de refuser Genève. Et si «l’esprit de Genève» si souvent cité par le passé pouvait être quelque peu réanimé, tout le monde en sortirait gagnant.

Une visibilité pour la Suisse

Jouer les hôtes représente pour la Suisse un véritable coup diplomatique. Elle ne veut pas seulement être une artisane de la paix en coulisses, mais aussi gagner en visibilité parfois. De nombreuses rencontres importantes se déroulent encore à Genève, avec des discussions sur la Syrie, le Yémen, la Libye, et plus récemment Chypre, au siège de l’ONU. Mais ces discussions ont eu un succès et une visibilité faibles, et beaucoup de réunions importantes ont souvent eu lieu ailleurs.

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Ces dernières décennies, les sommets Russie-USA se sont déroulés à Reykjavik, à Washington, à Moscou, à Vancouver, à Helsinki (deux fois), à Ljubljana, à Bratislava et à Prague, mais pas à Genève, depuis plus de 35 ans. L’avancée décisive sur l’accord nucléaire avec l’Iran s’est passée à Vienne, en 2015. Et Donald Trump a rencontré Kim Jong-Un à Singapour.

Longtemps attendu

La Genève internationale a longtemps espéré une rencontre de premier rang et le gouvernement suisse a œuvré en ce sens. Le but est une fois de plus atteint, renforçant le rôle de Genève en tant que haut-lieu diplomatique. Et c’est important, car la concurrence est féroce.

De tels sommets offrent généralement une opportunité de tête à tête entre les participants. Guy Parmelin, qui assure cette année la présidence de la Confédération helvétique, devrait donc pouvoir présenter ses problématiques à elle. L’occasion d’être entendu par Biden et Poutine ne se présente pas tous les jours pour un petit pays tel que la Suisse.

Adapté de l’anglais par Katia Staehli


Le correspondant diplomatique est rédacteur en chef adjoint de la radio suisse alémanique SRF. Avant de rejoindre la radio, il a travaillé pour la rubrique internationale du St. Galler Tagblatt. Il a aussi été correspondant à Paris pour Die Zeit et rédacteur en chef de la Weltwoche..

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