Coop dans la course au prix grâce à Coopernic

Le grand distributeur suisse lance un pool d'achat avec quatre poids lourds européens du secteur. L'objectif: des produits de marque jusqu'à 10% moins chers.
A l’heure actuelle, pour s’achalander, Coop doit payer jusqu’à un tiers plus cher que ses homologues des pays voisins.
Cinq grands distributeurs européens, dont le suisse Coop, ont annoncé jeudi à Bruxelles la fondation d’une alliance baptisée Coopernic. Son objectif est d’offrir aux consommateurs des produits à des prix plus avantageux.
Société coopérative de droit belge, Coopernic réunit les groupes Colruyt (Belgique), CONAD (Italie), Coop (Suisse), Leclerc (France) et REWE (Allemagne).
Ces grands distributeurs réalisent ensemble un chiffre d’affaires annuel de 96 milliards d’euros (148 milliards de francs environ) et totalisent 17’000 points de vente.
Sur leurs marchés d’origine, ils occupent le deuxième ou troisième rang du secteur, avec des parts de marché de l’ordre de 12 à 19%.
Coopernic se place ainsi au second rang des groupes de détaillants en Europe, derrière European Marketing Distribution (EMD), dont le chiffre d’affaires global approche 120 millions d’euros.
Le premier président de Coopernic sera le Français Michel-Edouard Leclerc. Coop sera représenté au conseil d’administration de dix membres par le président de sa direction générale Hansueli Loosli et le chef de la division marketing/achat Jürg Peritz.
Plutôt isolée
Contrairement à ses partenaires, Coop n’opère pas sur le marché sans frontières de l’Union européenne, relève le numéro deux helvétique de la grande distribution.
Mais en Suisse aussi, restée jusqu’ici plutôt isolée dans certains domaines, notamment l’alimentaire, le marché s’ouvre et la concurrence se durcit.
En entrant dans Coopernic, Coop vise à battre en brèche la pratique des prix élevés appliqués spécifiquement à la Suisse par les fournisseurs internationaux.
Le numéro 2 de la grande distribution en Suisse vise aussi à la suppression – tant que faire se peut – des intermédiaires. L’alliance permettra aussi de profiter d’économies d’échelle que le volume d’achat nécessaire au seul petit marché suisse ne permet pas.
Outre le groupement d’achats, l’alliance permettra aussi, selon Coop, d’enrichir les assortiments. Et le distributeur estime qu’elle offrira de nouvelles opportunités à l’industrie suisse via les canaux de vente des groupes partenaires.
Décision intelligente
«Coop prend une mesure très intelligente dans un marché extrêmement compétitif», estime James bacos, analyste chez Mercer Management Consulting en Allemagne.
«En créant ce pool d’achat, ils disposent d’un effet de levier nettement plus efficace pour discuter des prix avec les producteurs.»
«Historiquement, la grande distribution suisse a dû débourser davantage que ses homologues européens pour fournir ses étales. Jusqu’ici, ce n’était pas un problème puisque le marché suisse était plus stable et plus rentable que celui des pays voisins.»
L’arrivée de Aldi (et peut-être de Lidl) a débouché sur une baisse globale du prix du panier de la ménagère. «Une bonne chose pour le consommateur suisse, mais cela a aussi entraîné une baisse des marges pour les supermarchés», explique l’analyste à swissinfo.
«Coop se donne un avantage qui devrait l’aider à réduire ses coûts et demeurer compétitive. Dans une certaine mesure, cela ajoutera à la pression exercée sur ses concurrents. La grande distribution est un métier difficile et Coop sort une arme inattendue. »
Pas de danger
Du côté de la concurrence, un certain scepticisme se fait sentir. Peter Hampl, directeur d’EMD, estime que pour Coop, les possibilités de coopération restent limitées par les obstacles administratifs liés à la non-appartenance de la Suisse à l’Union européenne.
Pour Urs Peter Naef, porte-parole du numéro un helvétique du commerce de détail Migros, l’influence de Coopernic sur les prix restera vraisemblablement inexistante à court terme. Et les achats communs se heurteront aux règles de déclaration différentes dans l’UE et en Suisse.
En tout état de cause, ni EMD ni la Migros ne voient un danger dans l’alliance Coopernic. «Elle ne nous cause absolument pas de maux d’estomac», assure Peter Hampl.
Migros, qui vend 90% de ses produits sous ses propres marques, a pour sa part commencé à miser sur des importations directes pour éviter les coûts liés aux intermédiaires et importateurs.
swissinfo et les agences
Coopernic: alliance d’achat des 5 géants de la grande distribution que sont Rewe, Leclerc, Conad, Colruyt et Coop
Ils disposent ensemble de 17’208 points de vente
S’y ajoutent 7495 points de vente indépendants
Chiffre d’affaires attendu: 150 milliards de francs
10% du marché européen
Représenté dans 17 pays
Chiffre d’affaires 2004 de Coop: 13,1 milliards de francs
Chiffre d’affaires 2004 de Migros: 17,25 milliards de francs
– Coop et Migros, les deux principaux grands distributeurs suisses, sont tous deux organisés en coopérative.
– Coop n’est active qu’en suisse alors que Migros s’est implantée ponctuellement ces dernières années dans les régions frontalières des pays limitrophes.
– Coop vend traditionnellement des produits de marque. La commercialisation de produits à son nom ainsi qu’une ligne à bas prix sont des étapes récentes chez Coop.
– Jusqu’à récemment encore, Migros tablait avant tout sur sa propre ligne de produits. La commercialisation de produit de marque est récente, comme l’introduction d’une ligne à bas prix.

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