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Catastrophe politique en vue

Les scrutateurs ne vont pas chômer le 18 mai prochain. Keystone

Jusqu’à neuf objets pourraient être soumis au peuple lors des votations fédérales du 18 mai. Une journée noire pour les citoyens, les partis et les médias.

D’aucuns fustigent cette pléthore qui conduirait notamment à une campagne politique bâclée.

«Il n’y a jamais eu autant d’objets en votation depuis 1866», constate Hans-Urs Wili, chef de la Section des droits politiques de la Chancellerie fédérale.

La raison de cette accumulation d’objets pour le 18 mai vient de la réaction à l’initiative «Pour une démocratie directe plus rapide». Ce projet demandait que les initiatives soit soumises au peuple au maximum douze mois après leur dépôt.

Certes, en mars 2002, le peuple a clairement refusé cette proposition (70%). Mais le gouvernement avait quand même promis de traiter les initiatives plus rapidement. Et en 1997, le gouvernement et le parlement avaient déjà raccourci la durée du traitement des initiatives.

Concrètement, un objet doit donc être soumis au peuple au plus tard dix mois après avoir été traité par les Chambres. Or, le problème, c’est que tous les objets dont le délai échoit en 2003 devront être impérativement soumis au peuple au mois de mai.

En effet, aucune votation ne sera possible au mois d’octobre, ce mois étant déjà accaparé par les élections fédérales. Resterait donc le mois de novembre. Mais les différents partis ne souhaitent pas repartir en campagne aussitôt après les élections.

Une catastrophe politique



Cette situation très particulière provoquera donc une sorte de «bouchon» lors des votations du 18 mai. Hans-Urs Wili reconnaît d’ailleurs que le nombre d’objets soumis au vote ce jour-là constitue un «défi» pour les citoyens.

Mais d’aucuns ne se contentent pas de parler de défi. Face à cette avalanche d’objets, ils font carrément part de leur scepticisme voir de leurs critiques.

«Je considère que ce serait une catastrophe politique si nous devions voter sur neuf objets», déclare le politologue Claude Longchamp, responsable de l’Institut de recherches GfS, spécialisé dans les sondages et les analyses politiques.

«Il s’agit très clairement d’une surcharge, poursuit-il. Et pas seulement d’une surcharge pour les citoyens, mais aussi pour les médias qui auront de la peine à faire leur travail d’information d’une manière nuancée.»

Or, ce manque de nuance dans la campagne politique conduira les citoyens à voter en bloc, tout à gauche ou tout à droite. Cette simplification forcée «est une catastrophe pour la démocratie directe», conclut le politologue.

Partis sceptiques

Les partis ne se montrent pas non plus très enthousiastes face à cette avalanche d’objets. «Il leur sera très difficile de faire passer leur prise de position sur chaque objet auprès d’un large public», regrette Reto Nause, secrétaire général du Parti démocrate-chrétien (centre droit).

Les socialistes perçoivent également ces votations du mois de mai «avec un certain scepticisme». «Traiter autant d’objets convenablement représente une exigence excessive, tant pour les partis que pour les citoyens», déclare Jean-Philippe Jeannerat, porte-parole du Parti socialiste.

Pour l’Union démocratique du centre (droite dure), «cette pléthore montre la mauvaise gestion du calendrier politique par le gouvernement», note son secrétaire général Aliki Panayides. Mais ce parti ne veut pas parler de surcharge des citoyens.

«Les citoyens doivent être informés et c’est notre devoir de le faire, poursuit-il. Pour y parvenir, les partis bourgeois devraient se mettre d’accord pour décider qui mène la campagne sur chaque thème», poursuit Aliki Panayides.

Même son de cloche du côté du Parti radical (droite). «Les citoyens ne sont pas aussi bêtes que certains le pensent, déclare son secrétaire général Guido Schommer. Tous les objets sont faciles à comprendre.»

Un programme encore fluctuant

Le programme des élections de mai n’est pas encore définitif. La votation pourrait comporter quatre objets de moins que prévu.

L’«Initiative des dimanches» et l’initiative «Pour des loyers loyaux» pourraient être renvoyées. En effet, ces deux objets ont été traités par le Parlement avant que les délais pour présenter un objet au peuple ne soient revus à la baisse.

Par ailleurs, il n’est pas encore sûr que le peuple doive se prononcer sur les référendums qui s’attaquent à Armée XXI et à la Protection de la population XXI. Le délai référendaire court jusqu’au 23 janvier. Or on ne sait toujours pas si le comité référendaire a recueilli assez de signatures.

«Mais si le nombre de signatures est suffisant, les deux objets devront obligatoirement être soumis au peuple le 18 mai, afin que les deux objets puissent entrer en vigueur le 1er janvier 2004», prévient la chancelière de la Confédération, Annemarie Huber-Hotz.

swissinfo/Christian Raaflaub

«Droits égaux pour les personnes handicapées»
«Moraroire-plus»
«Sortir du nucléaire»
«Initiative-santé»
«Initiative pour des places d’apprentissage»
«Initiative des dimanches»
«Pour des loyers loyaux»
Référendum Armée XXI
Référendum Protection de la population XXI

– Neuf objets au maximum peuvent être soumis au peuple le 18 mai.
– L’administration parle d’un défi pour les citoyens mais certaines voix critiques craignent une surcharge.
– Le nombre important d’objets risque d’inciter les citoyens à voter en bloc, de manière indifférenciée. Les médias n’auraient pas la possibilité d’informer en détail.
– Mais le gouvernement n’a pas de choix: il est légalement tenu de soumettre au vote ce jour-là la plupart des initiatives.

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