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Ces escroqueries qui écornent l’image du Tessin

Des affaires louches se déroulent parfois derrière les vitrines. Keystone

Les malversations et les escroqueries bancaires se suivent ces derniers temps au Tessin.

Le directeur de l’Association bancaire tessinoise craint que l’image de la troisième place financière de Suisse n’en sorte ternie.

La dernière affaire remonte au 10 novembre 2003. Ce jour-là, deux conseillers en finance – un homme et une femme – ont été arrêtés à Lugano. Mis en détention préventive, ils sont accusés d’escroquerie, de gestion déloyale et de faux dans les titres.

Dès fin 1999, en tant que responsables de deux sociétés financières, ils sont parvenus à soutirer une dizaine de millions de francs à une centaine de personnes.

Alémanique pour la plupart, les victimes ont été appâtées par des promesses d’intérêts juteux en échange d’investissements sur les marchés des devises étrangères.

Des escrocs et des tentations

Pourquoi une telle naïveté de la part des victimes? L’explication vient du procureur tessinois, Giuseppe Muschietti, chargé de l’enquête.

«Ce genre de délit est toujours plus fréquent au Tessin. Il existe aussi ailleurs en Suisse. Attirées par la promesse de gains faciles, les personnes lésées tombent facilement dans les filets tendus par les escrocs», note Giuseppe Muschietti.

Il ne faut pas, dit-il, «oublier que les marchés proposés pour les investissements sont souvent des marchés à haut risque».

«Si l’image de la place financière tessinoise en Suisse devait réellement être ternie par ces récentes affaires, cela me préoccuperait», souligne Franco Citterio, directeur de l’Association bancaire tessinoise (ABT) sise à Vezia, aux portes de Lugano.

Franco Citterio admet que certaines affaires sont «désastreuses», et cela même s’il en minimise la portée.

«Les places de Genève et Zurich – de par leur importance mondiale – ne sont pas non plus à l’abri de délits économiques. Des dérapages sont inévitables, malgré le renforcement des contrôles et les normes en vigueur», fait remarquer Franco Citterio.

Selon lui, «l’application interne des normes de contrôle pourrait être améliorée».

Un expert à la rescousse

Pour Franco Citterio les choses sont claires. Les escroqueries et détournements de fonds ont toujours existé au Tessin comme ailleurs. Il fonde sa remarque sur les propos, tenus la semaine dernière lors d’un séminaire, par un spécialiste en criminalité économique, reconnu internationalement: Paolo Bernasconi.

L’ex-procureur général tessinois a rappelé comment, en 1974, un opérateur boursier tessinois avait causé à ses clients une perte de 220 millions de francs.

«Quoiqu’il en soit, souligne M. Citterio, certaines pertes chiffrées à des dizaines de millions de francs ont fait dernièrement la une des journaux. Elles ont certes lésé des clients et des banques. Mais on ne peut pas parler de syndrome tessinois».

Bruno Balestra, procureur général du Tessin, estime pour sa part que «la criminalité en col blanc n’a pas vraiment empiré par rapport à la fin des années 80. A cette époque une série d’escroqueries avait frappé les marchés à terme. Aujourd’hui les contrôles sont plus rigides.

L’effet du «décret Tremonti»

Le premier décret Tremonti (ndlr: du nom du ministre italien de l’Economie Giulio Tremonti) a joué un rôle important.

«Il a fait sortir quelque 30 milliards d’euros des banques tessinoises. Entre-temps, trois milliards ont repris le chemin du Tessin et une quinzaine d’autres ont été replacés dans les filiales italiennes de banques suisses par des clients peu satisfaits des services fournis par les banques de leur pays», explique Franco Citterio.

Encore en vigueur, la seconde amnistie fiscale n’aura pas les mêmes répercussions.

«La place tessinoise continue à être utilisée par les capitalistes du nord de l’Italie», explique Franco Citterio. «Il s’agit d’une clientèle extrêmement riche pour laquelle le secret bancaire est primordial».

Cela dit, le directeur de l’Association bancaire tessinoise reste optimiste. Sur les quelque 370 banques que compte la Suisse, 72 se trouvent au Tessin, principalement à Lugano.

«Notre place, conclut-il, continue à croître grâce à l’arrivée de banques étrangères qui ont ouvert des filiales chez nous».

swissinfo, Gemma d’Urso, Lugano

– La deuxième amnistie fiscale italienne est en voie de conclusion.

– Par rapport au premier décret signé par Giulio Tremonti, ministre de l’Economie (Forza Italia), le second décret a rapatrié un tiers de capitaux en moins.

– Trois milliards d’euros (4,5 milliards de francs) ont été réexpédiés dans les banques tessinoises et quinze autres milliards ont été placés dans les filiales italiennes de banques suisses.

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