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Echec des négociations à l’OMC

Sans subventions, les paysans de montagne ne pourraient pas survivre. Keystone

La suspension des négociations commerciales sur le round de Doha de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) déçoit la délégation suisse et les milieux économiques.

Les agriculteurs, eux, sont plutôt satisfaits de cet échec provisoire, mais restent inquiets face à l’avenir.

Les discussions de la dernière chance entamées dimanche à Genève entre les six grands acteurs du commerce mondial (Australie, Brésil, Etats-Unis, Inde, Japon, Union européenne) auraient dû se prolonger jusqu’à début août et être élargies ensuite aux 149 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).

Mais elles ont été interrompues prématurément lundi matin. Le Groupe des Six n’a pas trouvé d’accord sur le dossier agricole.

Les deux principales puissances commerciales (UE et Etats-Unis) se rejettent désormais la faute de l’échec de la réunion.

Les Etats-Unis affirment que, selon les propositions de l’UE, 95% à 98% du marché européen resterait protégé. C’est faux, rétorque Bruxelles, qui accuse Washington de n’avoir présenté «aucune nouvelle offre» pour diminuer les soutiens internes à ses agriculteurs.

Des mois, voire des années

«Il est évident que si les grandes puissances commerciales n’arrivent pas à rapprocher leurs points de vue, la suspension est la meilleure des choses», observe le chef de la délégation suisse Luzius Wasescha.

Comme d’autres diplomates, il suppose que les négociations lancées à Doha en 2001 pourraient être bloquées plusieurs mois, voire plusieurs années.

«Il faudra peut-être attendre un changement de paramètres politiques, explique-t-il à swissinfo. Et si nous devons attendre une nouvelle administration américaine, cela nous amène jusqu’en 2009».

Agriculteurs soulagés

Les paysans suisses, quant à eux, risquaient de laisser des plumes en cas de succès du round de Doha. Ils sont donc satisfaits de l’échec provisoire des négociations à l’OMC.

L’incertitude demeure pourtant, voire même la crainte «d’une solution encore pire», note l’Union suisse des paysans (USP).

Ce serait le cas, par exemple, d’un accord de libre-échange avec l’Union européenne, visé par le gouvernement suisse. «Après l’échec de l’OMC, les paysans n’auraient rien à gagner d’une telle proposition», juge Sandra Helfenstein, porte-parole de l’USP.

Milieux économiques déçus

Pour les milieux économiques, la situation constitue un échec «extrêmement regrettable» du point de vue helvétique.

Pour une économie petite et ouverte comme la Suisse, l’accès aux marchés par le biais de l’OMC revêt une grande importance, estime Gregor Kündig, membre de la direction d’economiesuisse.

L’association patronale réclame dès lors une multiplication des accords bilatéraux de libre-échange. «La Confédération doit en faire une priorité», demande Gregor Kündig.

A cet égard, la décision du gouvernement de mettre un terme au projet d’accord avec les Etats-Unis est d’autant plus incompréhensible, juge economiesuisse.

Pays riches critiqués

Enfin, plusieurs ONG d’aide au développement ont critiqué les pays riches, responsables, selon elles, de la suspension des négociations de Doha.

L’organisation Oxfam affirme que le coût de ce nouveau report est énorme pour les pays en développement.

«L’UE et les Etats-Unis restent libres de subventionner leurs gros producteurs agricoles et de poursuivre leur dumping, alors que les pays en développement continueront à lutter pour assurer la survie de leurs petits paysans et pénétrer les marchés des pays riches», dénonce Céline Charveriat, responsable d’Oxfam pour le commerce.

Le round de Doha a été lancé en novembre 2001. Les négociations du cycle précédent – celui de l’Uruguay conclu en 1994 – avaient aussi été interrompues plusieurs fois, avant de reprendre.

swissinfo et les agences

Le cycle de Doha a été lancé en 2001 dans la capitale du Qatar. Les 149 membres de l’OMC y négocient une libéralisation des échanges commerciaux.

Dans le cadre des négociations, la Suisse rejette la demande de l’OMC qui souhaite qu’elle réduise ses subventions à l’agriculture et ses droits de douane à l’importation.

En revanche, elle soutient une libéralisation des services, ainsi que la baisse des droits de douane pour l’industrie.

La Suisse préside le G10, le groupe des pays importateurs agricoles. Le Liechtenstein, le Japon, la Corée du Sud, la Norvège, Taïwan, l’Ile Maurice, Israël et l’Islande en sont aussi membres.

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