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Face à la violence contre les femmes en Afrique du Sud

Trois parlementaires à la découverte de la réalité féminine sud-africaine. swissinfo.ch

Trois députées suisses, de couleur rose-verte, se sont rendues en Afrique du Sud, où le sida et la violence contre les femmes font rage.

Les trois parlementaires ont donc constaté des manques, des espoirs, mais aussi des réalisations largement en avance sur la Suisse.

«Quand vous donnez le pouvoir aux femmes, les choses se font. Quand vous donnez le pouvoir aux hommes, vous obtenez des meetings». Gwen Mahalangu-Nkabindee est vice- présidente du Parlement sud-africain et elle sait trouver les mots qui vont droit au cœur de ses collègues helvétiques.

L’entretien se tenait la semaine dernière au sein du parlement sud-africain, à Cape Town. La politicienne recevait trois conseillères nationales (députées à la Chambre basse), toutes trois fortement engagées dans les questions liant femmes et santé.

La zurichoise Ruth Genner, présidente des Verts, Francine John-Calame, du même parti à Neuchâtel, et Ruth-Gaby Vermot, socialiste bernoise, font toutes trois partie du groupe parlementaire «Caire +» (voir encadré). Les trois femmes participaient à un voyage d’étude sur l’invitation du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et de PLANeS (voir encadré).

Maladie, violence, mortalité

En Afrique du Sud, l’épidémie de VIH-sida touche plus d’une personne sur cinq dans certaines provinces et l’espérance de vie moyenne n’est plus que de 48 ans dans le pays. La violence contre les femmes, très élevée, fait partie du problème.

Pour les parlementaires, une telle visite permet de se rendre compte in situ de la manière dont le gouvernement, longtemps critiqué par les ONG pour sa lenteur à réagir, prend les choses en main. «De plus, la Suisse contribue à des programmes via l’UNFPA et la coopération au développement. Pour des parlementaires, c’est important de voir sur le terrain comment ces fonds sont utilisés», explique Ruth Genner.

L’aide internationale ne représente que 1% du produit national brut de l’Afrique du Sud. Ce soutien est toutefois «stratégique», selon Annamarie Minder, la représentante à Pretoria de la coopération suisse (DDC).

En effet, le pays souffre d’un manque chronique de personnels qualifiés pour appliquer des programmes auprès de la population. Les parlementaires ont pu constater au cours de leur visite marathon que tous les niveaux du gouvernement avaient conçu des plans de lutte contre la violence et le sida. Mais leur mise en œuvre demeure souvent bancale.

Deux exceptions constatées toutefois: une campagne illimitée sur la violence contre les femmes et un centre d’accueil à Cape Town pour les victimes de viol, centre dont elles ne peuvent que rêver en Suisse. Il assure en effet la prise en charge complète des plaintes, de l’accueil aux démarches légales en passant par les aspects médicaux et post-traumatiques. Il en existe dix dans le pays, et le but est d’en ouvrir 80 avant 2010.

L’apartheid n’est plus racial mais économique

«La Constitution de 1996 est un point de référence important ici, elle prône un Etat non-racial, non-sexiste et démocratique, souligne Ruth Genner, mais l’application sur le terrain est très imparfaite.»

«L’apartheid n’est plus racial, mais économique, relève pour sa part Francine John-Calame. Le gouvernement a pris une voie libérale et il y a beaucoup de laissés pour compte. Cela commence par les études, que les plus démunis ne peuvent terminer faute de moyens.»

Pays à revenu intermédiaire, l’Afrique du Sud connaît des poches de grande pauvreté, qui ne sont pas près de se résorber. Dans certains townships, le chômage atteint 40%.

A l’occasion d’échanges avec leurs homologues à Cape Town, les élues ont pu mesurer une fois de plus le retard de la Suisse en matière d’égalité des sexes. Le Parlement, dominé par le parti ANC, compte 34% de femmes sur la base d’un quota et va instaurer la parité en 2009.

De plus, la moitié des maires du pays sont des femmes. «Avec une telle représentation, les thèmes abordés sont beaucoup plus larges qu’avec une large majorité d’hommes», estime Ruth Genner.

«C’est un modèle pour nous, commente Ruth-Gaby Vermot, qui siège aussi au Conseil de l’Europe. On voit ce qu’une jeune démocratie a obtenu en moins de quinze ans. Un tel voyage nous permet aussi de tisser des liens, et je vais parler de leur lutte contre la violence à Strasbourg.»

swissinfo, Michel Bührer-Infosud

PLANeS est une organisation qui fédère les centres de planning familial et les services d’éducation sexuelle en Suisse.

Elle est aussi une partenaire du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) pour promouvoir les questions de santé reproductive et des droits qui y sont liés auprès des parlementaires suisses. Le but est de garder ces questions à l’agenda.

L’organisation représente aussi la Suisse au sein de la fédération internationale de planning familial (IPPF), dont le mandat principal est de mettre en application le plan d’action issu de la Conférence du Caire de 1994. Celle-ci était consacrée à la santé sexuelle et reproductive. PLANeS s’est constitué en 1993 avec comme principal objectif de préparer cette conférence.

Son principal levier à Berne est le groupe parlementaire «Caire +». Suite à des interventions de Ruth Genner et de Ruth-Gaby Vermot par exemple, l’Office fédéral de la santé publique (OFSP) a produit un rapport sur la santé sexuelle et reproductive en Suisse. Il a par exemple posé les bases de l’éducation sexuelle dans les écoles alémaniques.

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