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«ABB-City» entre sérénité et résignation

Sur le plus important site de production d'ABB en Suisse, les employés sont relativement confiants en l'avenir.

Ils défendent les qualités de leur entreprise «trop mal notée par rapport à sa valeur réelle.» On rejette toute comparaison avec Swissair.

On pourrait appeler le quartier «ABB-City»: derrière la gare de Baden (AG), ABB occupe en effet un large périmètre de bâtiments, avec restaurant, parkings, cabinet de médecins.

Le site – le plus grand du groupe en Suisse avec 2000 des 7300 employés helvétiques – est partagé avec Alstom, qui a repris sa division d’équipements d’énergie.

Alstom, ABB: deux entreprises partenaires jusqu’en mai 2000, aujourd’hui séparées, mais ayant gardé le même lieu de production et, souvent, les mêmes employés.

Une fermeture exclue

Les destinées de l’une et de l’autre sont encore intimement liées: comme l’explique l’ingénieur – d’ABB – Andreas Doll, «Alstom est notre plus grand concurrent et en même temps notre plus grand client.»

Andreas Doll est quasi sûr qu’ABB va survivre à ses difficultés actuelles. «On ne connaît pas la situation en ce qui concerne les liquidités, mais il est assez sûr qu’ABB ne peut pas s’arrêter du jour au lendemain. Peut-être les différentes unités devront-elles acquérir d’avantage d’indépendance.»

«En tout cas, poursuit l’ingénieur, ABB n’est pas Swisair, qui était une compagnie de services. Chez nous, une commande génère un produit qui sera livré peut-être trois ans plus tard. Cette chaîne-là est plus difficile à stopper. Redimensionnement, oui, il y aura sûrement, mais la fermeture, non, je n’y crois pas.»

«

Pas mieux ailleurs!»

Une remarque revient dans toutes les bouches: c’est toute la branche qui souffre de la situation économique, pas seulement ABB.

«L’entreprise est plus mal notée que ce qu’elle vaut, dit cet employé, qui compte 23 ans d’expérience et qui travaille dans le secteur «Automatisation». Nous restons numéro 1 dans de nombreux domaines.

Malheureusement, les managers ont perdu le contact avec le cœur de l’entreprise. Nous, les employés, nous n’avons pas compris la vente des secteurs clés, comme les centrales et les chemins de fer.»

A Baden, les risques liés aux procès intentés par les victimes de l’amiante aux Etats-Unis suscitent apparemment plus de commentaires que les résutats trimestriels. «Il est normal que les victimes soient aidées, dit un employé. Mais si c’est au prix de dizaines de milliers d’emplois, il y a quelque chose qui ne joue pas.»

Plus serein, ce quinquagénaire a «décidé depuis plusieurs années ne plus se faire de soucis. Si on se fait du souci à l’avance et que l’événement craint ne survient pas, on s’est inquiété pour rien. Et si l’événement survient, une suppression de poste ou autre, il est toujours assez tôt de s’inquiéter à ce moment-là!»

Avenir dans l’immobilier?

Son collègue de pause est lui aussi confiant : «ABB va continuer. Peut-être avec un autre nom. Swissair, UBS, Novartis… eux aussi ont changé de nom!»

Ceux qui parlent admettent néanmoins que si eux ont la chance de ne pas être trop mal placés en raison de leur formation, de leur expérience ou de leurs compétences, ils ont tous des collègues d’atelier ou de bureau en plus mauvaise posture.

«Nous avons chez nous une dame de 60 ans qui croit tout ce qu’on lui dit, explique cette jeune femme. Elle lit les bonnes nouvelles sur l’intranet de l’entreprise, qui ne publie que les commandes mais pas les montants à payer. On nous prend pour des idiots.»

C’est d’ailleurs la plus pessimiste de tous: «Alstom et ABB sont appelées à disparaître, c’est la marche logique des choses. Ça coûtera toujours moins cher de produire en Pologne. Comme Sulzer-Escher Wyss à Zurich, ABB ne fera plus que de l’immobilier…»

Comme pour lui donner raison, le futur centre «Trafo» est en train de voir le jour juste à côté. Restaurants, magasins, cinéma: le complexe ouvrira ses portes le 28 novembre. Maître d’oeuvre du projet: ABB.

swissinfo/Ariane Gigon Bormann

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