L’optimisme des entrepreneurs suisses d’Argentine

Le 4 décembre dernier, des milliers d'Argentins réclamaient de la nourriture pour les écoles de Buenos Aires. Keystone Archive

L'Argentine traverse la pire crise économique de son histoire. Cela n'empêche pas des entrepreneurs suisses d'être optimistes pour l'année à venir.

Et cela d’autant plus que, selon eux, l’année 2002 n’a pas été aussi noire pour tout le monde.

C’est en tout cas ce que souligne Marcelo Guckenheimer, directeur de Danzas Argentina S.A., un groupe aussi en pleine restructuration en Argentine.

«Nous pensons, dit-il, que les perspectives seront bonnes pour ceux qui ont atteint leurs objectifs durant la très difficile année 2002».

En effet, la crise a provoqué une terrible restructuration des tissus économiques. Otto Hamann, un pionnier qui gère dans la province subtropicale de Misiones une plantation de yerba maté (le thé de l’Amérique latine) explique cette situation en d’autres termes.

Avec les mêmes armes

«Nous allons affronter 2003 avec les mêmes armes qui ont été à la base de notre croissance durant 2002», souligne Otto Hamann

Il faut dire que l’effondrement du peso et le nouveau taux de change (actuellement environ 1 U$D = 3,50 pesos) favorisent grandement les entreprises à capacité exportatrice, comme la sienne, qui est présente au Moyen-Orient.

Parmi les plus optimistes, Ernesto Kohen, qui représente plusieurs marques de montres de luxe suisses, dont Oméga, estime «qu’en 2003 va se produire la réactivation de l’économie tant attendue durant le deuxième semestre 2002.»

Dans un secteur totalement différent, celui de la construction, le président de la filiale argentine de SIKA est plus pondéré. Il s’agit de mettre en place des stratégies bien précises, très différentes des actions habituelles.

«Dans un contexte encore très délicat, avec une timide reprise économique et une légère réactivation de la construction, nous nous attendons surtout à voir bouger le marché de la réfection et de la restauration d’édifices, et notre objectif sera de renforcer notre position sur ce créneau», explique-t-il.

En plus des données économiques, il faut prendre en compte que 2003 sera une année électorale. Les Argentins devraient voter pour élire leur nouveau président et de nombreux responsables provinciaux et locaux en mai.

Incertitudes politiques

Santiago Del Sel, directeur de Zurich Argentina Compañía de Seguros S.A., pense que l’inconnue politique est en fait déterminante: «nous allons vivre une année de transition, et que les résultats dépendront en grande partie de ce qu’il se passera sur le plan électoral.»

Carlos Correa, de Mehring, une entreprise suisse implantée dans la riche province de Santa Fe gouvernée par l’ex-pilote de Formule 1 d’origine suisse Carlos Reutemann, pense lui aussi que la politique prendra le pas sur l’économie.

«Le nouveau gouvernement peut provoquer un scénario totalement différent s’il arrive à un accord avec le Fonds monétaire international».

Le directeur des relations extérieures de SGS Argentina S.A., Hugo Suffriti, synthétise les opinions de tous. Son optimisme modéré est nuancé par les incertitudes politiques qui planent sur cette année nouvelle.

«Nous sommes optimistes pour 2003. Nous pensons que ce ‘veranito’ (le petit été, en référence à la légère embellie économique que l’Argentine observe depuis quelques semaines) est un signe très précaire. Mais il est aussi le résultat d’une stabilisation de la situation et il ne peut que s’amplifier lorsque les incertitudes politiques auront disparu», conclut Hugo Suffriti.

swissinfo/Pierre Dumas à Buenos Aires