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Pourquoi la presse suisse est sous haute pression

En mai, le volume d’annonces dans les journaux suisses a reculé de 10,6%. Keystone Archive

La presse écrite souffre de multiples maux. Elle est notamment touchée par une chute significative des revenus publicitaires.

Comme en témoigne la récente disparition de l’hebdomadaire dimanche.ch et la recapitalisation du quotidien Le Temps.

Selon l’agence REMP (Recherches et études des médias publicitaires), le volume d’annonces parues dans les journaux suisses a reculé de 10,6% en mai 2003 par rapport à mai 2002.

Durant la même période, les magazines ont publié 13,7% de moins de pages d’annonces. Encore plus frappant, les offres d’emploi ont diminué, elles, de 48,4 %.

En cause: la récession économique qui plombe les budgets des entreprises consacrés à la publicité.

«L’évolution de la conjoncture économique et le manque de perspective de reprise rendent inévitable la disparition de dimanche.ch», explique ainsi le groupe Ringier pour justifier la fin de l’hebdomadaire dominical qu’il avait lancé en 1999.

La chute des recettes publicitaires affecte en effet massivement l’équilibre financier des journaux. «D’une manière générale, les deux tiers de leurs recettes proviennent de la publicité», rappelle Alexandre Sami, de la Fédération suisse des journalistes (FSJ).

Amorcées depuis plusieurs années déjà, les restructurations et les stratégies d’alliance entre les titres et les groupes de presse suisse s’accentuent.

Ringier, premier éditeur de Suisse, vient ainsi d’augmenter massivement sa participation au capital du quotidien Le Temps.

Par cette opération, le groupe zurichois s’associe avec le 2e éditeur du pays, Edipresse. Les deux groupes ont en effet décidé de créer une société commune qui détiendra 82 % du capital du Temps.

Un chômage record

Le régime minceur est, lui, toujours à l’ordre du jour. Selon la FSJ, quelque 600 journalistes sont actuellement inscrits au chômage.

«Et ces chiffres devraient augmenter cette année avec la fin des plans sociaux dont bénéficient un certain nombre de journalistes», précise Mathieu Fleury, secrétaire central de la FSJ.

«Il faut également ajouter, poursuit Mathieu Fleury, les journalistes qui ont changé de profession et les indépendants en difficulté.»

La FSJ estime ainsi que près de 10% des journalistes suisses sont au chômage. Cette activité est donc l’une des plus sinistrées de l’économie suisse, qui connaît actuellement un taux de chômage global de 3,6 %, selon le Secrétariat d’Etat à l’économie (seco).

Une désaffection des jeunes

Mais la conjoncture économique n’explique pas à elle seule l’ensemble des difficultés de la presse helvétique.

Moins spectaculaire, un autre phénomène est apparu ces toutes dernières années: la baisse du nombre de lecteurs, en particulier chez les jeunes.

«Une étude récente a montré que seuls 19% des 18-30 ans lisent régulièrement un quotidien», souligne Alfred Hass, secrétaire central de l’Association de la presse romande.

«Les jeunes privilégient les vecteurs apparemment gratuits comme les sites web, la radio, la télévision ou les journaux gratuits comme 20 minuten», constate de son côté Mathieu Fleury, de la FSJ.

Pour contrecarrer cette désaffection des jeunes, les éditeurs suisses ont d’ailleurs lancé des campagnes de sensibilisation à la lecture des journaux.

Menées aussi bien en Suisse alémanique qu’en Suisse romande, ces programmes sont menés dans les écoles, en association avec les départements cantonaux de l’instruction publique.

Un public exigeant

Pour autant, la presse doit, comme les autres médias helvétiques, continuer de s’adapter aux attentes toujours plus grandes de leur public.

«Les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs veulent de plus en plus intervenir dans les médias», note ainsi Guillaume Chenevière, ancien patron de la Télévision suisse romande.

«La multiplication des sources d’information et de savoir, poursuit Guillaume Chenevière, est l’autre grand défi posé aux médias.»

«Plus que jamais, ceux-ci doivent donc remplir leur rôle d’intermédiaire entre cette masse d’information et un public aux attentes multiples», ajoute Guillaume Chenevière.

Ces défis seront d’ailleurs au cœur du Forum mondial des médias électroniques. Cette réunion organisée par Guillaume Chenevière se tiendra en décembre à Genève, en marge du Sommet de l’information.

swissinfo, Frédéric Burnand, Genève

Les quatre principaux groupes de la presse suisse sont Ringier, Edipresse, Tamedia et NZZ.
En 2002, les trois quotidiens les plus lus étaient le Blick, le Tages-Anzeiger et la Mittelland Zeitung.
24 heures, le premier quotidien romand, arrive en 10e position.
En 1939, la Suisse comptait 406 journaux et un tirage global de plus de 2 millions d’exemplaires.
En 2002, 224 titres étaient diffusés à plus de 4 millions d’exemplaire.

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