Des perspectives suisses en 10 langues

Querelle de clocher autour de la raclette

La Suisse produit 13 000 tonnes de fromage à raclette, symbole de la gastronomie nationale. Keystone Archive

Les producteurs suisses ne veulent pas se priver de l'appellation «raclette». Une guerre commerciale sur fond de libéralisation des marchés.

En novembre dernier, l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) a donné son feu vert à la demande d’appellations d’origine contrôlées (AOC), déposée par la Fédération laitière valaisanne. Les opposants avaient jusqu’à lundi soir minuit pour se manifester. Et ils ne s’en sont pas privés. La demande valaisanne a provoqué une véritable levée de bouclier.

C’est que les fabricants suisses de fromage ne veulent pas que le canton du Valais se réserve le droit exclusif de l’appellation «raclette».

Ouverture des marchés européens

Au nombre des principaux opposants au projet figure l’Association raclette suisse. Elle regroupe notamment les producteurs de lait et de fromage non valaisan. Comme les cantons de Vaud et de Fribourg, qui craignent pour leur production indigène. Et les poids lourds de l’industrie fromagère comme Cremo et Mifroma, qui n’entendent pas se priver d’un marché porteur.

Il faut dire que la réputation de la raclette n’est plus à faire. En terme de marketing, l’appellation vaut de l’or. Elle cristallise toutes les convoitises. Les fronts sont d’autant plus marqués que la perspective de l’ouverture des marchés européens risque de bousculer les habitudes des consommateurs.

«La libéralisation des échanges va entraîner une concurrence accrue dans le domaine des produits laitiers, souligne Manfred Bëbner, président de l’Association raclette suisse. Et nous aurons besoin de nous appuyer sur la commercialisation de nos produits phares pour défendre nos positions, voire dynamiser nos exportations.»

Il n’est donc pas question de laisser le Valais monopoliser l’exploitation de la notoriété de la raclette. «D’autant que le canton ne produit que 13% des 13 000 tonnes de fromage à raclette fabriqué en Suisse», souligne Manfred Bëbner.

Autre son de cloche: celui des partisans du projet valaisan, qui considèrent que la filière suisse du fromage se trompe de guerre. La création d’une AOC réservée à la production valaisanne remplit tous les critères d’originalité, d’historicité et de constance du processus de fabrication prévu par la législation suisse et européenne.

Opposition des producteurs français

La réglementation représente, selon les partisans du projet, la meilleure stratégie pour protéger l’économie laitière suisse dans la perspective de l’ouverture des marchés européens. Et pour faire face aux risques de voir les fromages étrangers pénétrer librement le marché suisse.

«Les producteurs suisses doivent aujourd’hui choisir leurs concurrents pour les prochaines années», déclare Frédéric Brand, responsable du registre AOC à l’OFAG.

«Ils peuvent décider de partager le marché avec des fabricants de fromage à raclette étrangers. Ou de limiter la concurrence à un produit valaisan de haute qualité avec un prix adapté.»

D’ailleurs, les producteurs de fromage français ne s’y sont pas trompés. De crainte de voir se fermer un marché juteux, eux aussi, ont manifesté leur opposition au projet d’AOC pour le fromage à raclette du Valais.

Vanda Janka

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision