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Flybaboo par-dessus le rideau de rösti

Lors du vol inaugural de sa compagnie déjà, en 2003, Julian Cook faisait preuve d'une belle confiance. Keystone Archive

La ligne Genève-Zurich était jusqu'ici desservie par la seule Swiss. Dès le 21 novembre, la compagnie romande devrait entrer dans la danse.

Il faudra pour cela que Flybaboo obtienne l’aval du Département fédéral des transports (DETEC). Chose qui prendra plusieurs semaines.

La compagnie genevoise, qui veut allier la qualité suisse à la chaleur humaine latine, a décollé en 2003 pour remplir le vide laissé par la défunte Swissair sur la ligne Genève-Lugano.

Lancée par le Britanno-Suisse Julian Cook, Flybaboo dessert huit destinations européennes et vient maintenant marcher sur les platebandes de Swiss, en pleine phase d’intégration dans l’Allemande Lufthansa.

La descendante de Swissair est seule à assurer l’aller-retour Genève-Zurich avec neuf fréquences quotidiennes. Elle a transporté 585’000 passagers l’an dernier.

Ce chiffre est en régression suite aux restructurations récurrentes de Swiss et la diminution consécutive de ses vols long courrier au départ de Zurich.

De ce marché, Flybaboo souhaite en accaparer entre 15 et 20%, au moyen de deux fréquences quotidiennes, quatre peut-être le printemps prochain.

Avec des appareils plus grands (150 places contre 50 chez Flybaboo), la pure low-cost Easyet avait renoncé en 2002 à relier les deux principales plateformes du pays, jugeant le marché peu porteur.

Davantage de fréquences

«Les vols Genève-Zurich transportent à plus de 50% des passagers en correspondance vers d’autres vols de Swiss», indique Philippe Roy, porte-parole de l’Aéroport international de Genève.

Mais l’entier du coût de ces transferts est assumé par les passagers point à point (destination finale), ce qui renchérit les billets.

«Flybabo fera sans doute moins cher que Swiss (300 francs contre 500 chez Swiss, ndlr)», résume Philippe Roy.

«Par contre, note ce dernier, l’avantage de Swiss est d’avoir plus de fréquences. La clientèle point à point est essentiellement une clientèle d’affaire. Lorsqu’une réunion se termine avant l’heure prévue, elle aime pouvoir prendre un vol de retour plus tôt.»

Flybaboo indique de son côté que si sa vocation demeure les liaisons point à point, elle a déjà entamé des discussions avec des transporteurs long courrier à partir de Zurich (Emirates et autres).

Cette apparente contradiction rend dubitatif Pierre Condom, directeur de la revue Interavia.

«Trouver les compagnies prêtes à réduire leur marge pour payer votre apport de passagers n’est pas évident. Et puis c’est une autre règle du jeu que le point à point.»

Les lignes de niche

Pierre Condom est aussi d’avis que l’avenir de la ligne Genève-Zurich n’est pas forcément serein.

«Des moyens de transports terrestres vont un jour ou l’autre émerger. Partout ailleurs en Europe sur un tel marché, il y aurait un train à grande vitesse.»

«Mais à échéance de cinq ans, Flybaboo a probablement raison. Et personne ne va les embêter sur cette liaison-là. Car le but de Swiss est seulement d’alimenter ses long courriers», estime Pierre Condom.

Fondamentalement, Flybaboo vise les lignes de niche, délaissées par les autres. Exemptée de l’héritage des compagnies traditionnelles (salaires élevés, structures lourdes), elle allie prix abordables et service soigné.

«Nous desservons quatre fois par semaine Genève-Florence, six fois dès le printemps, explique Julian Cook. On peut donc tout à fait imaginer drainer un trafic au départ de Zurich via Genève sur Florence, sur Valence, sur Saint-Tropez.»

«Dans trois ans, nous aurons une masse critique (4 à 5 appareils, contre deux aujourd’hui) qui nous permettra d’atteindre la rentabilité», estime le jeune patron.

Le précédent de Crossair

Mais à moyen terme aussi, Flybaboo pourrait probablement devoir tirer un trait sur sa vie en quasi-solitaire, estiment les observateurs.

«Dans l’aviation actuelle, il est très difficile de travailler seul, explique Philippe Roy. Un jour ou l’autre, ils intégreront un réseau.»

«Quand on est petit et que les affaires commencent à être bonnes, il y a toujours un gros qui se demande pourquoi les laisser au petit», reprend Pierre Condom.

«Souvenez-vous de Crossair, poursuit-il. Swissair a trouvé que cela marchait trop bien et s’en est emparé. Pour rester indépendant, il faut rester dans une niche et ne pas faire peur aux autres. Bien gagner sa vie sans que cela se voie trop!»

swissinfo, Pierre-François Besson

Flybaboo a été lancée en août 2003 à Genève
80 collaborateurs
Deux avions à disposition
Huit destinations et 3 ou 4 supplémentaires prévues en 2006
17 millions de chiffre d’affaire attendus cette année
10,5 millions en 2004
Septième levée de fonds en préparation (entre 15 et 20 millions)
Actionnaires: famille Cook (18,7%), Margot Mathieson (20%) et plusieurs banquiers privés genevois notamment
Entrée en bourse «envisageable» dans deux ou trois ans
A cinq ans, elle prévoit de se lancer dans le moyen, voire le long courrier

– Légalement, comme pour toutes les lignes intérieures, seuls les transporteurs aériens ayant leur siège en Suisse et détenus pour moitié au moins par des Suisses ou des citoyens de l’Union européenne peuvent desservir la liaison Genève-Zurich.

– La décision finale d’accorder la concession à Flybaboo sera prise par le Département fédéral des transports après consultation des aéroports et des autres compagnies notamment.

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