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Génie génétique: réglementer au lieu d’interdire

Le parlement entend faciliter le travail des chercheurs. swissinfo.ch

Dans le débat Gen-Lex, le parlement a fait mercredi un pas en direction de l'industrie et de la recherche.

Le moratoire voulu par les agriculteurs et les consommateurs n’est plus à l’ordre du jour. Mais au final, c’est le peuple qui aura le dernier mot.

Comme la plupart des pays européens, la Suisse tente depuis des années de réglementer l’utilisation des organismes génétiquement modifiés (OGM) dans le domaine non-humain.

En 1992, le peuple acceptait un article constitutionnel stipulant que «l’être humain et son environnement doivent être protégés contre les abus en matière de génétique».

Six ans plus tard, les citoyens rejettent, à deux contre un, une initiative populaire qui aurait pratiquement mis hors-la-loi toute utilisation d’OGM, y compris dans les laboratoires.

Entre interdiction totale et autorisation sous conditions, gouvernement et parlement cherchent depuis lors à élaborer un compromis.

Pas de moratoire

Mardi et mercredi, le projet de loi sur le génie génétique (Gen-Lex) est revenu devant le Conseil national. A l’issue d’un débat houleux, la Chambre du peuple s’est prononcée de justesse (90 voix contre 83) contre le moratoire de cinq ans.

Les défenseurs de l’idée entendaient se donner un délai de réflexion supplémentaire sur la dissémination à but commercial de semences, d’engrais, de pesticides et de plantes génétiquement modifiés.

Le moratoire n’aurait toutefois pas concerné l’expérimentation, ni les médicaments.

Les Verts ont bien essayé d’aller plus loin, en demandant un moratoire de dix ans sur toutes les disséminations. Mais la proposition n’a récolté que 55 «oui», contre 99 «non».

Pas à pas

Tel qu’il ressort de ce nouveau débat, le projet de loi prévoit des autorisations pour les OGM sur le principe du «step-by-step».

La recherche devrait d’abord être menée en milieu confiné. Si les résultats désirés ne peuvent être obtenus par ce biais, une dissémination expérimentale pourrait être autorisée, pour autant qu’elle réponde à des critères stricts.

Quant à la dissémination à des fins commerciales, elle ne pourrait être autorisée que dans une troisième étape. Et il faudrait alors prouver que les OGM ne portent pas gravement ou durablement atteinte à l’écosystème.

Victoires à droite…

Tout au long du débat, Radicaux et Libéraux se sont posés en défenseurs des intérêts de l’industrie et de la recherche.

Au fil des votes, ils ont réussi à rallier à leurs vues un nombre suffisant de Démocrates-chrétiens (PDC) et de Démocrates du centre (UDC) pour constituer des majorités.

Ainsi, par 84 voix contre 75, le Conseil national a supprimé tout droit de recours contre une autorisation de mise en circulation d’OGM.

Le Conseil des Etats avait pourtant accordé ce droit aux organisations nationales de protection de l’environnement fondées depuis au moins dix ans.

Les députés ont également accepté un modèle de responsabilité civile prévoyant que seuls les titulaires d’une autorisation répondraient des éventuels dommages liés à l’utilisation d’OGM.

…et défaites dans le camp «bio»

Les partisans d’une agriculture «bio» n’ont par contre que rarement réussi à faire passer leurs propositions.

Par 84 voix contre 83, la Chambre du peuple a tout de même accepté de forcer les utilisateurs d’OGM à veiller à ce que ces organismes ne portent atteinte ni à la production naturelle, ni au libre choix des consommateurs.

Par 89 voix contre 80, les députés ont en revanche refusé d’imposer des règles trop strictes pour assurer la traçabilité des produits.

De même, le soin d’édicter des dispositions sur la séparation des produits avec et sans OGM et la prévention des risques de contamination est laissé au seul gouvernement.

Par contre, le Conseil national a tenu à ce que la présence d’OGM dans les denrées alimentaires soit systématiquement déclarée.

Vote sans enthousiasme et verdict populaire

Au final, le projet Gen-Lex en son état actuel n’a pas vraiment séduit la Chambre du peuple. L’objet n’a été adopté que par 67 voix contre 48 et 48 abstentions. Le dossier retourne maintenant au Conseil des Etats… en attendant le verdict populaire.

Un groupe d’organisations écologistes emmené par Greenpeace prépare en effet le lancement d’une initiative pour imposer le moratoire. Et de son côté, le camp rose-vert du parlement pourrait bien attaquer l’ensemble du projet par voie de référendum.

Dans un cas comme dans l’autre, nul doute que les signatures nécessaires seront faciles à réunir. Dans l’opinion publique en effet, les OGM restent un sujet hautement émotionnel.

swissinfo

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