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La formation des adultes stagne en Suisse

Il y a toutes sortes de partenaires dans la formation continue, comme ici le centre alémanique de formation des journalistes. Keystone

Depuis dix ans, les bénéficiaires de la formation continue stagnent à 40%. Selon une étude de l’OCDE, la Suisse se repose sur ses acquis.

Le Forum suisse de la formation continue présente sa stratégie: améliorer le financement et la transparence.

Mardi à Zurich, le Forum suisse de la formation continue a fait le point d’une situation jugée insatisfaisante. Son directeur André Schläfli a notamment estimé que ce secteur, capital en ces temps d’instabilité économique, est resté «négligé».

La présidente du Forum, la députée Vreni Müller-Hemmi, l’a confirmé: «La Suisse est loin d’avoir une politique de formation cohérente».

Et de plaider pour une meilleure transparence. L’objectif est d’obtenir une loi ad hoc. Dans ce but, diverses propositions ont été transmises au Parlement et au gouvernement.

Hommes et cadres privilégiés

La fréquentation des cours reste stable aux environs de 40% depuis dix ans. Mais les chiffres indiquent aussi que 70% des bénéficiaires sont des hommes et 60% des cadres.

«Avec respectivement 30% et 15%, les femmes et les non-cadres n’accèdent donc pas suffisamment à une formation dont ils auraient bien besoin pour améliorer leur statut», précise André Schläfli à swissinfo.

En outre, ajoute le directeur du Forum, «une personne suit en moyenne 120 heures par cours, alors que c’est 200 heures dans les pays scandinaves».

C’est ce qui explique que l’étude comparative menée par les experts de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE) ne soit pas très élogieuse pour la Suisse. Une étude menée de 1999 à 2001 qui, outre la Suisse, comprend le Danemark, la Finlande, la Grande-Bretagne, le Canada, l’Espagne, la Norvège, le Portugal et la Suède.

Entreprises frileuses

Alors que la Confédération et les cantons dépensent annuellement 22 milliards de francs par an pour la formation en général, la Confédération alloue 200 millions pour la formation permanente et les cantons 150 millions de francs, soit 1,5% seulement de toutes les dépenses de formation.

Quant aux entreprises, Michael Schläfli estime leur part «entre 3 et 4 milliards de francs, sur un coût total de 23 milliards par année». Et de préciser que 70% des bénéficiaires paient leur cours de leur poche.

Dans cette perspective, les experts de l’OCDE recommandent à la Suisse d’une part d’améliorer l’image de la formation des adultes pour la rendre plus attrayante.

Et, d’autre part, de lever les obstacles sociaux qui bloquent trop souvent la route aux catégories inférieures de travailleurs.

Regrouper les forces

Il s’agit donc d’infléchir le cours des choses. Dans ce but, le Forum suisse de la formation continue a été créé en 2000. Chargé d’une mission de promotion, il regroupe toutes les instances politiques (au niveau fédéral et cantonal) ainsi que les partenaires sociaux, syndicats et associations patronales comprises.

Il a décidé d’adopter une stratégie plus pointue afin d’augmenter le taux de participation des adultes. Stratégie qui a été présentée ce mardi à Zurich, avec trois points forts: augmenter la participation, le financement et la transparence.

Mieux connaître sa cible

Aujourd’hui, tout ce qu’on sait, indique Michal Arend, auteur du concept, c’est que «2,7 millions de personnes suivent des cours chaque année, et qu’il y a plus d’hommes que de femmes qui en profitent».

Pour augmenter le nombre de participants, il s’agit donc de mieux connaître ces derniers. C’est pourquoi l’Office fédéral de la statistique a été chargé de coordonner une recherche harmonisée au plan suisse et qui soit en même temps eurocompatible.

Mais ce secteur n’est pas considéré comme prioritaire et l’outil tarde à se former. «Les premiers sondages statistiques, prévus initialement pour 2004, ont déjà été repoussés à 2007», regrette André Schläfli.

Améliorer le financement

Enfin, nerf de la guerre, il s’agit d’améliorer le financement. Pour le directeur du Centre suisse de coordination pour la recherche en éducation (CSRE), Stefan Wolter «ce sont essentiellement les pouvoirs publics qui subventionnent certains cours. Mais plus que l’offre, il faudrait soutenir les participants».

Cela permettrait d’agrandir le cercle des personnes profitant d’une formation continue, et de l’étendre aussi à celles qui sont mal formées à la base.

Des bons de formation – comme il en existe déjà dans le canton de Genève -, des bourses, des déductions fiscales individuelles ou des congés payés pour la formation continue pourraient aider à faire évoluer la situation.

D’autres modèles de financement, déjà pratiqués à l’étranger, pourraient être introduits, tels des assurances ou des comptes de formation, et des fonds pour la formation continue créés en commun par les pouvoirs publics et l’économie.

Mais les choses n’avancent que lentement, déplore André Schläfli, les économies budgétaires de 3,3 milliards votées par le Parlement la semaine dernière touchent partiellement le secteur.

Dans la recherche pas de problème, les Chambres ont augmenté le budget de 5%. Mais la manne de l’Office fédéral de la culture, partenaire du Forum, est réduite dans une proportion qu’André Schläfli n’est pas encore en mesure de chiffrer.

swissinfo, Isabelle Eichenberger

– Selon une étude de l’OCDE présentée mardi à Zurich, la formation continue à 40% de participants.

– 70% des bénéficiaires de cours sont des hommes et 60% des cadres.

– Sur un coût total de 23 milliards par an, les entreprises consacrent 3 à 4 milliards. 70% des cours sont financés par les bénéficiaires.

– Sur un total de 22 milliards pour la formation en général, l’Etat consacre 350 millions (1,5%) à la formation des adultes.

– Créé en 2000, le Forum suisse de la formation continue est chargé de coordonner les efforts au niveau national.

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