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La gauche frise l’exploit

Personne n'attendait un résultat si serré sur la réforme de la fiscalité des entreprises. Keystone

Comme prévu, le second volet de la réforme des entreprises a passé la rampe du scrutin fédéral. Mais d'un cheveu seulement. Les arguments de la gauche, qui avait lancé le référendum, ont convaincu bien au-delà de ses rangs.

Aucun surprise en revanche en ce qui concerne l’initiative contre le bruit des avions. Trop floue, la proposition de l’écologiste Franz Weber a été balayée.

Tous les spécialistes de la politique s’attendaient à ce que la réforme des entreprises soit acceptée par le peuple, même avec un score modeste. Mais finalement, le résultat – 50,5% de «oui» et 49,5% de «non» pour une différence de quelque 20’000 voix entre les deux camps – peut être qualifié de surprise.

Le Parti socialiste, qui a lancé le référendum, représente environ 20% des citoyens. Si on y ajoute les Verts et les communistes, le camp de la gauche atteint à peu près une proportion de 35% des Suisses. En réussissant à mobiliser pratiquement la moitié des votants, la gauche à sans conteste démontré dimanche qu’elle a séduit bien au-delà de ses rangs.

Des arguments de poids

Personne – même à gauche – ne contestait que certaines améliorations devaient être apportées pour soulager les entreprises, notamment en matière de successions. En fait, tout le débat a porté sur l’allègement de la double imposition et plus particulièrement sur les allègements fiscaux sur les dividendes touchés par les patrons qui possèdent 10% et plus du capital de leur entreprise.

La gauche a eu beau jeu de présenter cette mesure comme un «cadeau fait aux riches» et une «injustice». Une injustice d’abord par rapport à cette grande majorité de Suisses qui ne possèdent pas d’actions. Mais quelque part aussi, par rapport aux actionnaires qui investissent leur argent dans une entreprise sans posséder les 10% des parts nécessaires à un allègement fiscal.

A cela, la gauche a encore pu faire valoir un autre argument de poids. Il n’est en effet guère contestable que ces allègements fiscaux feront perdre des recettes aux caisses publiques. En revanche, le fait que ces pertes soient compensées par un regain de compétitivité – ainsi que l’affirme la droite – tient davantage de la profession de foi que d’une vérité pouvant être démontrée.

Avertissement à Hans-Rudolf Merz

La carte des résultats montre un pays coupé en deux. Mais le fossé ne correspond pas – comme c’est régulièrement le cas – à la frontière linguistique. Parmi les cantons romands, Genève et le Valais se sont distingués en acceptant la réforme. Et Outre-Sarine, quatre cantons (Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Berne et Soleure) ont fait de même en ne votant pas comme le reste des cantons alémaniques.

En fait, ce qui saute aux yeux, c’est que la carte représentant les cantons qui ont refusé la réforme correspond étrangement à celle des cantons qui connaissent la fiscalité la plus élevée. Peut-être la propension à faire des «cadeaux fiscaux» est-elle moins importante parmi les citoyens qui sont eux-mêmes assez lourdement taxés…

Quoi qu’il en soit, force est de constater que les arguments de la gauche ont fait mouche des deux côtés de la Sarine. Finalement, malgré l’acceptation de la réforme, le Parti socialiste fait au soir des élections davantage figure de vainqueur que de vaincu.

Le résultat de dimanche devrait en tout cas sonner comme un avertissement pour la droite ainsi que pour le ministre des Finances Hans-Rudolf Merz. Parfois, les Suisses peuvent se montrer sensibles à une certaine équité en matière de fiscalité.

Projet trop flou

Il n’y a eu en revanche aucune surprise en ce qui concerne l’initiative populaire visant à lutter contre le bruit des avions de chasse. Comme prévu par les sondages, les Suisses ont largement rejeté le projet.

L’initiative s’attaquait à un problème existant – le bruit des avions – mais sans y apporter véritablement une solution. Le texte exigeait en effet purement et simplement l’interdiction des vols militaires dans les zones touristiques.

Les adversaires ont eu beau jeu de dénoncer le caractère trop flou du projet. Quelles sont les zones touristiques en Suisse? Et surtout, ils ont réussi à convaincre que l’acceptation de cette initiative marquerait tout simplement la fin des forces aériennes. Par extension, ce vote s’est donc mué en un scrutin pour ou contre l’armée avec, à la clef, un résultat clair et net en faveur du maintien d’une défense nationale.

Les auteurs de l’initiative auraient été bien mieux inspirés en proposant des solutions plus concrètes à un problème lui aussi concret. Le vote de dimanche aura au moins eu une vertu: il propose un sondage grandeur nature du niveau d’acceptation des nuisances sonores provoquée par l’armée au sein de la population. Ces résultats seront probablement utiles lors des prochaines tractations entre les riverains des aéroports et les forces aériennes.

swissinfo, Olivier Pauchard

Initiative contre les avions de combat
Voix: 601’034 pour et 1’281’962 contre
Pourcentage: 32,9% pour et 68,1% contre
Cantons: tous les cantons ont refusé l’objet

Réforme de l’imposition des entreprises
Voix: 938’658 pour et 918’985 contre
Pourcentages: 50,5% pour et 49,5% contre
Cantons: 16 cantons pour et 7 cantons contre

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