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La justice n’interviendra peut-être pas

Même si certains agissements du groupe Erb peuvent laisser croire à des malversations, il n’est pas certain du tout que la justice intervienne.

Pour l’heure, aucun lésé ne s’est manifesté. Les banques restent silencieuses.

Devant l’ampleur de la débâcle, la question des signes avant-coureurs se pose. Les sociétés filiales des holdings n’ont-elles rien vu venir?

«Je suppose que si, répond, prudemment, Hans Ziegler, nommé directeur général du groupe le 24 octobre et redresseur d’entreprises. Mais le patron régnait en maître. Il n’y avait pas de chef des finances, par exemple. C’était «take it or leave it» pour tout le monde», a-t-il expliqué.

«Tant que les bénéfices et les crédits bancaires augmentaient, personne ne posait de question. Cette année seulement, avec la baisse dramatique des liquidités, c’est devenu de plus en plus violent», précise Stefan Holenstein, secrétaire général du groupe engagé il y a trois ans.

Le groupe était aussi actif sur le marché des devises, dans un montant équivalent à celui d’une banque moyenne, et il y a fait de gros bénéfices pendant plusieurs années.

La loi de Murphy

«Puis, selon la loi de Murphy, la situation s’est inversée, les mêmes chiffres ont été réalisés, mais en négatif», ajoute le secrétaire général.

Du côté des filiales, Piatti, dont le siège est à Dietlikon (ZH), indique par exemple rien n’avait laissé présager la débâcle.

«Les salaires ont toujours été payés à temps et ils le seront encore jusqu’à la fin de l’année, y compris le 13e», affirme le porte-parole Jean-Luc Ferrazzini.

Piatti, confiant de retrouver un repreneur, n’envisage pas, en l’état actuel, de lancer des démarches judiciaires.

‘No comment’ de la BCV

Quant aux banques, dont 82 instituts ont continué à accorder des crédits au groupe, en Suisse et à l’étranger, la clé de répartition des engagements n’a pas été dévoilée.

«Cela faisait deux à trois ans que les questions commencaient à circuler au sein des banques, dit Hans Ziegler. Mais il se trouvait toujours quelqu’un qui n’était au courant de rien et qui signait.»

Citée dans certains médias, la Banque cantonale vaudoise ne peut «ni infirmer ni confirmer avoir compté le groupe Erb » parmi ses clients, indique le porte-parole Daniel Herrera, pour cause de secret bancaire.

«Je ne peux dire qu’une chose, à titre général, qui n’a qu’un lien indirect avec cette affaire: en février, nous avons annoncé que nous nous recentrions sur nos activités de base. Nous nous débarrassons donc progressivement des engagements faits hors canton à des grandes entreprises.»

Impossible donc de demander à la banque si elle compte déposer plainte contre le groupe pour malversations dans les chiffres, par exemple.

Car non seulement les crédits bancaires étaient détournés de leur affectation de base, pour être utilisés à l’étranger, mais ils ont été en outre accordés sur la base de chiffres «contestables», dit Hans Ziegler.

Enormes différences

«Avec les banques, nos chiffres étaient tellement différents qu’on ne savait pas si on parlait des même affaires», explique Hans Ziegler. Les différences ont pu aller jusqu’à 400 millions de francs.

Reste qu’il n’est pas encore sûr que cette débâcle donne lieu à un quelconque règlement judiciaire.

Poursuivis d’office

Responsable du Ministère public zurichois en charge des délits économiques, le procureur Christian Weber explique que des délits tels que faux dans les titres ou abus de confiance sont poursuivis d’office.

«Mais il faut avoir un soupçon sérieux, sur la base de déclarations, ou d’informations sûres, ce qui n’est pas le cas, ou pas encore. Il est trop tôt pour se prononcer.»

Il est aussi possible qu’une personne ou une entreprise lésée, ou encore un commissaire au sursis, dépose une plainte. Rien de ce genre n’est parvenu, pour l’heure, sur le bureau du procureur.

swissinfo, Ariane Gigon Bormann, Zurich

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