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La Loterie romande craint pour son avenir

En 2002, le bénéfice de la Loterie romande a grimpé de 5,9 %. Keystone Archive

La Loterie romande a le vent en poupe. L'an dernier, ses bénéfices ont augmenté de près de 6%. Cette manne bénéficiera à des associations culturelles et sociales.

Mais la révision de la loi sur les loteries pourrait compromettre l’avenir de ce système.

Mardi, les dirigeants de la Loterie romande (LoRo) ont en effet profité de la présentation de leurs résultats 2002 pour monter au créneau contre la révision en cours de la Loi sur les loteries et les paris (LOT).

Si la loi était acceptée telle quelle, les trois organismes principaux de loterie suisse perdraient entre 40 et 50% de leurs revenus.

Des bénéfices en hausse constante

Et pourtant, les affaires marchent bien et même de mieux en mieux. En 2002, le bénéfice de la Loterie romande a grimpé de 5,9 %, à 143,5 millions de francs.

Ce montant correspond à 80 francs par habitant de Suisse romande. Il s’agit du meilleur rendement des loteries helvétiques.

«Et nous sommes la deuxième d’Europe en matière de revenu brut des jeux (RJB) par habitant», commente fièrement José Bessard.

Et, en 2002, plus de 4000 associations culturelles, sociales, sportives, environnementales ou même économiques ont bénéficié de la manne de la LoRo (136, 2 millions de francs), ajoute le directeur de la communication de l’organisme.

Expo 02 et l’Association pour le développement de l’élevage et des courses de chevaux avaient reçu en 2002 des contributions spéciales de respectivement 3,8 et 3,2 millions de francs.

Philippe Maillard, directeur général, s’est encore réjoui de pouvoir annoncer une bonne nouvelle: cette année, 136,4 millions de francs seront redistribués à des projets d’utilité publique.

Raison de plus pour ne pas chambouler un système qui fonctionne bien depuis 70 ans, estiment les dirigeants de la Loterie romande. Alors que la nouvelle loi briderait, voire casserait le secteur.

Inquiétante révision de loi

Et ils ne sont pas les seuls. La mise en consultation de la révision de la Lot, en décembre 2002, avait déjà provoqué l’inquiétude des milieux culturels.

C’est que bon nombre de théâtres, troupes de danse, associations de jeunes ou projets divers dépendent des fonds attribués par la Loterie romande.

Ses bénéfices sont en effet reversés dans les fonds cantonaux des loteries. Chaque canton décide ensuite de l’attribution de l’argent, se basant sur sa connaissance du terrain.

Une situation qui doit rester telle quelle, selon José Bessard. Une instance de contrôle fédérale est donc inutile.

C’est pourtant ce que propose la commission chargée d’élaborer le projet de loi. Elle critique les disparités entre les cantons, dont certains interprètent de façon très extensive la notion d’utilité publique.

La Loterie romande accepterait par contre de rendre encore plus transparente sa clé de répartition et sa gestion. Mais ne se sent pas concernée par les critiques touchant au manque de séparation entre les organes de décision.

«Cela concerne certains cantons suisses alémaniques, comme Saint-Gall ou Bâle, mais pas les cantons romands», répond José Bessard.

Ouverture du marché

Par contre, l’ouverture du marché à des sociétés privées ou même à des sociétés étrangères «qui brassent des milliards» risquerait de ruiner le marché suisse des loteries. Il faut dire que ces dernières bénéficient pour l’instant d’une sorte d’«exclusivité territoriale».

Mais ce sont surtout les restrictions techniques qui grèveraient d’au moins 60 millions de francs les bénéfices de la LoRo. En l’occurrence, elles toucheraient les loteries en ligne, comme le Tactilo (distribué électroniquement) ou les courses de chevaux (PMU).

Les jeux et les paris ont en effet des taux de redistribution très élevés, 92% pour le Tactilo et 82% pour le PMU. Les joueurs peuvent donc gagner ce pourcentage-là de leur mise, ce qui les rend très attractifs. Ils ont d’ailleurs un énorme succès populaire.

Mais la nouvelle loi prévoit de limiter ce taux à 75%. PMU et Tactilo passeraient donc aux oubliettes.

«Cela provoquerait une distorsion de concurrence au profit des maisons de jeu», s’insurge José Bessard. Les casinos offrent en effet des gains potentiellement supérieurs par rapport aux mises.

Et enfin, sur l’argument social, – la prévention à la dépendance au jeu -, la Loterie romande le rejette complètement.

«Il s’agit d’un argument uniquement politique, explique José Bessard. Il n’est fondé sur aucune étude scientifique. Rien ne prouve que ces jeux électroniques augmentent la dépendance. L’auteur du rapport de la commission en a d’ailleurs convenu».

swissinfo, Anne Rubin

La Loterie romande a bouclé son exercice 2002 sur un bénéfice net de 143,5 millions de francs, une augmentation de 5,9% par rapport à 2001.
Le revenu brut des jeux s’est élevé à 283 millions de francs (+ 3,7%).
Ce qui place la Loterie romande au 2e rang après la Norvège.

– La LLP (loi fédérale sur les loteries et les paris) a été mise en consultation en décembre 2002. Les conclusions seront présentées au gouvernement à la rentrée.

– Ce projet casserait le monopole de la Loterie romande en ouvrant le domaine à des sociétés anonymes, y compris étrangères.

– Certaines compétences exercées par les cantons seraient assumées par le gouvernement fédéral.

– Des restrictions sur certains types de jeux seraient aussi imposées.

– Si le projet de loi est accepté tel quel, il induirait, selon la Loterie romande, une diminution des bénéfices de l’ordre de 40 à 50%.

– En Suisse, trois organisations se partagent le marché des jeux, paris et loteries.

– La Loterie romande, SwissLos (Suisse alémanique et le Tessin), et la Société du SportToto qui gère les paris sportifs dans les 26 cantons.

– Les recettes sont redistribuées à des associations d’utilité publique et de bienfaisance.

– Environ 15 000 associations en bénéficient, dont 4000 en Romandie.

– En 2001, les Suisses ont joué 1,4 milliard de francs.

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