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La Suisse au centre d’un rapprochement entre l’Iran et les Etats-Unis

Après le retour de Téhéran de Franz von Däniken, le secrétaire d'Etat suisse aux Affaires étrangères, le chef de la diplomatie iranienne, Kamal Kharazi, évoque une possible reprise des relations avec l’ex «grand Satan» américain.

Après le retour de Téhéran de Franz von Däniken, le secrétaire d’Etat suisse aux Affaires étrangères, le chef de la diplomatie iranienne, Kamal Kharazi (photo), évoque une possible reprise des relations avec l’ex «grand Satan» américain. Une victoire de la soft-diplomatie helvétique?

Après l’idéologie, l’heure est au pragmatisme. Et la diplomatie helvétique pourrait bien être l’un des acteurs discrets de cette avancée majeure. Une diplomatie qui a su mettre à profit un statut particulier: la Suisse représente les intérêts américains en Iran depuis 1980. Et ce, depuis la prise d’otages du personnel de l’ambassade des Etats-Unis, à l’origine de la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays. Pour Téhéran, l’Amérique incarnait alors le «grand Satan». Pour Washington, Téhéran devenait le mal absolu, l’épicentre «d’une internationale islamique terroriste».

Hasard de calendrier, le voyage de Franz von Däniken en Iran et les déclarations inattendues de Kamal Khazari? Peut-être. Le chef de la diplomatie iranienne, attendu cette semaine au sommet de Davos, a déclaré lundi que son pays était «prêt à négocier sous condition de la possibilité d’établir des relations avec les Etats-Unis». Inimaginables, il y a encore quelques semaines, ces propos expriment les mutations profondes en cours en Iran. Ils interviennent également au lendemain d’une visite de deux jours en Iran, effectuée par le secrétaire d’Etat suisse. Officiellement, toujours, «le secrétaire d’Etat, Franz von Däniken, n’a pas transmis de message de la part des Etats-Unis aux autorités iraniennes», a précisé lundi Mme Yasmine Chatila, porte-parole du Département fédéral des affaires étrangères. Dans les faits, en raison du statut particulier de la Suisse, il a été impossible à la délégation helvétique de faire l’impasse sur le dossier Iran-USA.

Ainsi dimanche Franz von Däniken déclarait, depuis Téhéran, avoir établi avec les autorités iraniennes un «dialogue critique, mais encourageant» sur les relations entre Washington et Téhéran. «Ce que je constate, précisait M. von Däniken, c’est que les Iraniens sont profondément conscients de l’importance des Etats-Unis, et se rendent compte du rôle que les Etats-Unis jouent», citant les grandes organisations internationales, et le processus de paix au Proche-Orient. Et Franz von Däniken de souligner qu’il était «du plein droit des Etats-Unis d’utiliser d’autres canaux» pour approcher l’Iran. Façon diplomatique pour dire que la Suisse avait fait son travail et que la balle était désormais dans le camp des deux Etats. Et Davos, où Kamal Kharazi et Bill Clinton feront tout pour ne pas se rencontrer, pourrait être une occasion de nouer quelques contacts informels.

Depuis l’arrivée au pouvoir du président Mohammad Khatami en 1997, la décrispation est à l’ordre du jour. La société iranienne bouge, aspire à d’avantage de libertés. Et la réinsertion de l’Iran dans le concert des nations est même devenue une option stratégique développée, non sans mal, par les réformateurs iraniens. A trois semaines d’élections législatives déterminantes, les débats sur un rapprochement avec Washington s’annoncent vifs. Le ballon rond, on l’a vu avec le match Iran – USA lors de la Coupe du monde de football aux Etats-Unis, a permis de préparer le terrain à une inéluctable normalisation.

Mais, le chemin est encore semé d’embûches. Et comme l’a précisé Kamal Kharazi: «en football, les deux parties sont à égalité, mais en politique elles ne le sont pas». Il reste encore à définir la nature des futures relations entre un pays, l’Iran, qui aspire à la reconnaissance de son statut de superpuissance régionale et les Etats-Unis, la superpuissance mondiale du moment.

Jugurtha Aït-Ahmed

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