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La Suisse s’abstient lors du vote sur le Liban

Malgré les résolutions votées à l'ONU, Israël a lancé une opération terrestre d'envergure samedi matin. Keystone

A Genève, le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies a condamné vendredi l'offensive israélienne au Liban, malgré l'abstention de huit Etats, dont la Suisse.

Dans la nuit de vendredi à samedi, le Conseil de sécurité de l’ONU a, quant à lui, voté à New York une résolution appelant à la fin des combats au Liban.

«Nous considérons la résolution votée au Conseil des droits de l’homme comme asymétrique et déséquilibrée, d’où notre abstention», déclarait vendredi à swissinfo l’ambassadeur suisse auprès des Nations Unies à Genève.

La résolution présentée par les pays musulmans ne fait par exemple aucune mention des attaques du Hezbollah contre l’Etat hébreu. Blaise Godet admet cependant que le texte contient «certains éléments avec lesquels nous sommes d’accord».

La résolution a été adoptée par 27 voix contre 11, avec 8 abstentions – notamment de la Suisse et de certains pays africains. Un pays était absent.

Dans le camp du non, on trouve les Occidentaux: France, Grande- Bretagne, Allemagne, Canada, Finlande, Pays-Bas, Japon, ainsi que la République tchèque, la Roumanie, la Pologne et l’Ukraine.

A l’instar de la Suisse, ces pays critiquent le caractère déséquilibré de la résolution, qui ne fait aucune référence directe aux attaques commises par le Hezbollah et aux victimes dans le nord d’Israël.

Dans l’autre camp, les pays latino-américains (Mexique, Pérou, Equateur, Brésil, Cuba), ainsi que la Russie et la Chine se sont joints aux pays arabes et musulmans pour faire pencher la balance.

Mission d’experts

La résolution condamne les opérations militaires israéliennes au Liban qui constituent «une violation flagrante et systématique des droits de l’homme». Elle demande à Israël de «mettre immédiatement un terme aux opérations militaires contre la population et les biens civils» au Liban.

Pour Blaise Godet, le principal point positif est la recommandation «d’envoyer immédiatement une mission d’experts» pour enquêter sur «les présumées violations des droits de l’homme au Liban».

La Suisse regrette toutefois que cette mission n’ait pas pour mandat d’investiguer toutes les violations, en Israël comme au Liban, soit des deux côtés de la frontière.

L’ambassadeur helvétique se félicite toutefois d’avoir pu introduire un amendement de dernière minute, qui appelle les parties en conflit à respecter le droit international humanitaire et de traiter les prisonniers selon les prescriptions des Conventions de Genève.

Test de crédibilité

Blaise Godet estime que cette affaire libanaise est également «un test de crédibilité» pour le Conseil des droits de l’homme, qui vient de remplacer la très critiquée Commission du même nom.

Lors du premier vote de son histoire, au mois de juillet, le Conseil avait adopté une résolution – déjà présentée par les pays musulmans – condamnant les attaques israéliennes contre les Territoires occupés.

Pour les Etats-Unis, qui n’ont pas demandé à faire partie du nouveau Conseil, ses débats sur le Liban sont «inutiles» et font double emploi avec ceux du Conseil de sécurité.

Une résolution du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité de l’ONU a justement voté vendredi soir à l’unanimité une résolution appelant à l’arrêt des combats au Liban. Le texte mis au point par la France et les Etats-Unis a été adopté à l’unanimité des 15 membres du Conseil (la Suisse n’en fait pas partie).

La résolution votée à New York appelle le Hezbollah à cesser immédiatement toutes ses attaques, et Israël à cesser immédiatement toutes ses opérations militaires offensives.

Le texte prévoit que le Liban et la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), dont les effectifs passeront de 2000 à 15’000 hommes, déploient leurs forces ensemble à travers le sud du Liban, et qu’Israël retire parallèlement ses forces du Liban sud.

le Premier ministre israélien Ehud Olmert a donné son accord au projet de résolution mais Israël a tout de même lancé samedi matin une opération terrestre d’envergure au Liban-sud.

Le gouvernement libanais doit lui se réunir samedi pour arrêter sa position. Celle-ci devrait être favorable à la résolution – portant le numéro 1701 – puisqu’elle répond à ses demandes essentielles. Le Liban, soutenu par les pays arabes, réclamait en particulier le départ immédiat de l’armée israélienne du Liban sud.

swissinfo et les agences

– Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies n’a pas de pouvoirs de contrainte. Il est censé exercer une pression morale sur les pays qu’il considère comme ne respectant pas les règles.

– Ses décisions sont prises à la majorité des pays membres, pays dont ni Israël ni les Etats-Unis ne font partie.

– La session spéciale de vendredi s’est tenue à la demande de l’Organisation de la Conférence islamique, réunie la semaine dernière en Malaysie.

– Des sessions de ce type peuvent être convoquées sur demande d’un tiers au moins des membres du Conseil. En juillet, il en avait déjà tenue une pour condamner les attaques israéliennes contre les Territoires occupés.

La Suisse a été élue au Conseil des droits de l’homme le 9 mai, avec un mandat de trois ans.
Elle est l’un des 47 Etats membres de ce nouvel organe, qui remplace la très discréditée Commission des droits de l’homme.
Le Conseil, né d’une initiative de la Suisse, se réunit normalement trois fois par an, avec la possibilité de tenir des sessions d’urgence.

Les Suisses «se font beaucoup trop de soucis sur leur neutralité» par rapport au conflit au Liban, estime Inaam Osseiran, ambassadrice du Liban à Berne.

En tant que diplomate, Mme Osseiran dit pouvoir concevoir les réserves helvétiques. Mais Berne devra néanmoins «corriger sa position à court ou moyen terme», ajoute-t-elle dans une interview parue vendredi dans le quotidien zurichois Tages Anzeiger.

Pour l’heure, seule la ministre des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey – «plus concernée et plus sincère que ses collègues» – l’a fait, estime la diplomate libanaise.

A propos d’Israël, Inaam Osseiran ne mâche pas ses mots. Ce pays «est un ennemi de la paix» et son «immense déploiement de force» n’est pas proportionné à ce qu’elle juge être «la défense légitime» du Hezbollah.

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