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Le chèque qui envenime les relations avec l’UE

La Suisse aimerait limiter sa contribution financière uniquement aux dix nouveaux membres de l'Union européenne. Keystone

La cheffe de la diplomatie helvétique est à Bruxelles mardi pour négocier la participation financière suisse au renforcement de la cohésion européenne.

Micheline Calmy-Rey va tenter de débloquer le dossier qui envenime actuellement les relations entre la Suisse et l’Union européenne (UE).

Le président de la Confédération Samuel Schmid et le premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker se sont montrés confiants lundi sur une possible solution.

La question «peut être résolue», a déclaré Samuel Schmid à l’issue de ses entretiens avec le président en exercice de l’Union europénne. A ses côtés, Jean-Claude Juncker a abondé dans le même sens en estimant qu’un Memorandum d’entente, comme le veut Berne, devrait fournir «une sécurité suffisante».

«Je crois la Suisse quand elle écrit un Memorandum of Understanding (MOU)», a poursuivi Jean-Claude Juncker. Les deux présidents ont toutefois souligné que la Commission européenne était responsable de ce dossier et que mardi des discussions auraient lieu à ce sujet à Bruxelles. Micheline Calmy-Rey doit s’entretenir avec la commissaire Benita Ferrero-Waldner.

Sans rien révéler de la teneur du compromis qui pourrait s’esquisser, le président de la Confédération a déclaré que Berne ne modifiait pas sa position. Le Conseil fédéral refuse de conclure un accord contraignant avec l’UE et veut poursuivre sa tradition d’aide bilatérale avec les anciens pays du bloc communiste déjà beaucoup soutenus après la chute du rideau de fer.

Aide financière

En raison des bénéfices que l’économie suisse va retirer du récent élargissement de l’Europe communautaire, Berne a promis une aide financière à l’UE. En clair, elle devrait verser 200 millions de francs par an et pendant cinq ans, soit au total un milliard de francs. Cette contribution pourrait démarrer en janvier prochain.

Mais les discussions achoppent sur la forme de l’accord. Les Vingt-Cinq veulent qu’un accord contraignant soit conclu entre la Suisse et l’UE. Alors que le gouvernement suisse souhaite une solution plus souple, qui permettrait d’éviter de créer un précédent juridique. Pour Berne, une déclaration d’intention serait suffisante.

Le deuxième point de litige porte sur les pays bénéficiaires de l’aide suisse: uniquement les dix nouveaux pays, selon Berne, ou treize Etats, selon Bruxelles. Les trois Etats – l’Espagne, le Portugal et la Grèce – qui bénéficient actuellement des fonds de cohésion, réclament en effet leur part du milliard suisse.

Une impatience croissante

En décembre, la Commission européenne a commencé à s’impatienter. Benita Ferrero-Waldner (responsable des relations extérieures) et Danuta Hübner (responsable de la politique régionale) ont écrit à Micheline Calmy-Rey.

Agacée, la cheffe de la diplomatie helvétique a réagi vertement. «Nous ne sommes pas des marionnettes!», a-t-elle déclaré à la mi-janvier dans une interview au Tages Anzeiger. Tandis qu’au quotidien Le Temps, elle avouait être «particulièrement fâchée par l’attitude de la Commission européenne».

Ces propos n’ont pas manqué de mettre de l’huile sur le feu, même si à Bruxelles, on se refuse à polémiquer. Ces déclarations, estime-t-on, sont destinées surtout aux eurosceptiques helvétiques, dans le cadre des débats sur les votations sur Schengen et sur l’extension de la libre circulation des personnes.

Des positions fermes



Reste qu’à la veille de la visite de la ministre suisse des Affaires étrangères, chaque partie campe sur ses positions.

«La signature d’un ‘memorandum of understanding’ avec l’UE sera absolument suffisante», affirme-t-on au Bureau de l’Intégration à Berne. Nous avons une tradition de coopération avec ces pays de quatorze ans, et nous voulons continuer à les aider dans ce même esprit.»

Le gouvernement suisse est donc prêt à discuter avec les responsables de l’UE des grandes lignes de la contribution suisse, comme les critères de choix des projets et la clef de répartition de l’aide. Mais, ensuite, Berne veut gérer les projets directement avec les pays concernés.

Et l’aide ne peut être versée qu’aux nouveaux membres de l’UE: «Il s’agit d’une contribution de solidarité à l’Union élargie, explique Berne, la Suisse ne participe pas à la politique régionale de l’UE».

«Les pays membres de l’UE n’ont pas modifié leur position, ils veulent un accord contraignant et que l’aide ne soit pas limitée aux Dix», rétorque un porte-parole du Conseil des ministres.

«Il faut un accord avec la Communauté européenne, une déclaration d’intention n’est pas suffisante, renchérit un haut fonctionnaire à la Commission européenne. Nous attendons la visite de Micheline Calmy-Rey».

swissinfo, Barbara Speziali à Bruxelles

– Suite à l’élargissement de l’UE, Berne a promis une aide financière d’un milliard de francs à l’UE (200 millions par année pendant 5 ans).

– Les Vingt-Cinq veulent qu’un accord contraignant soit conclu entre la Suisse et l’UE. Alors que le Conseil fédéral souhaite une simple déclaration d’intention.

– Le deuxième point de litige porte sur les pays bénéficiaires de l’aide suisse: uniquement les dix nouveaux pays, selon Berne, ou treize Etats selon Bruxelles, qui inclut l’Espagne, le Portugal et la Grèce (qui bénéficient actuellement des fonds de cohésion).

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