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Le HCR et la Suisse: hauts et bas d’une collaboration nécessaire

Les réfugiés sont au centre des actions du HCR à travers le monde. Keystone

Si le HCR et la Suisse font souvent cause commune lorsqu´il s´agit d´engagements internationaux, leurs rapports se révèlent moins consensuels dès lors qu´ils abordent les problèmes intérieurs de l´asile. Au bilan, une collaboration plutôt satisfaisante.

Au sein du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés, c’est sans doute Philippe Leclerc qui connaît le mieux le dossier suisse. Et pour cause. Depuis quatre ans, il est en charge des relations avec les autorités helvétiques qui le consultent régulièrement, qu’il s’agisse de réviser une loi ou de refouler un requérant d’asile dans un aéroport.

La collaboration de la Confédération avec le HCR figure en effet plusieurs fois et en toutes lettres dans la loi sur l’asile votée en 1998. C’est une «bonne coopération», juge Philippe Leclerc qui reconnaît n’être que rarement pris par surprise. Un sentiment que l’on semble d’ailleurs partager à Berne, du côté de l’Office fédéral des réfugiés.

Ce qui ne veut pas dire que l’horizon est entièrement dégagé. L’histoire récente des relations de la Suisse avec le HCR a même connu récemment quelques nuages, à propos par exemple des rapatriés de la guerre de Bosnie.

Contrairement aux autorités fédérales, l’organisation internationale jugeait inapproprié de «relocaliser» des réfugiés, c’est-à-dire de les installer dans un territoire autre que celui qu’ils habitaient précédemment et qu’ils ne pouvaient regagner pour cause d’épuration ethnique.

Le renvoi de certains réfugiés du Kosovo embarrasse aussi le HCR. On peut certes penser qu’en termes de protection le retour des Kosovars ne pose plus de problèmes. Mais il n’en va pas de même pour les ressortissants des minorités roms ou serbes. Le HCR attend donc de la Suisse qu’elle examine sérieusement leur cas avant de les renvoyer.

Ce n’est pas le HCR mais surtout Bernard Kouchner, administrateur de l’ONU au Kosovo, qui, il n’y a pas si longtemps, montrait du doigt la Suisse et d’autres pays occidentaux bien trop pressés, selon lui, de renvoyer chez eux les réfugiés kosovars. Il leur demandait par conséquent d’appliquer un moratoire durant la période hivernale.

L’Office fédéral des réfugiés l’a rencontré et lui a fait savoir que le nombre maximum de retours prévus en décembre et janvier avait été fixé à 250 personnes. Une proposition que Bernard Kouchner, dans une interview publiée cette semaine par L’Illustré, juge «humainement très belle et politiquement juste».

Sur le fond des choses, le HCR n’a cessé ces derniers temps d’interpeller les nations industrialisées – donc la Suisse aussi – sur les mesures qu’elles prennent à l’encontre de certains demandeurs d’asile, sur les restrictions en matière de protection et sur le danger que ces pratiques font peser sur le respect des droits des réfugiés.

Faut-il en déduire que la Convention sur le statut des réfugiés doit être renforcée et qu’il serait temps que les gouvernements se mettent d’accord sur la façon de l’interpréter et de l’appliquer? L’idée, en tout cas, est en train de faire son chemin.

La meilleure occasion de commencer à y réfléchir de manière concrète pourrait se présenter l’an prochain puisque le 28 juillet 2001 marquera le 50e anniversaire de cette Convention. La Suisse se dit tout à fait disposée à inscrire ce genre de conférence internationale dans son agenda et à l’organiser. La décision de principe en a été prise lundi par le gouvernement.

Voilà qui traduit bien l’état des relations de la Suisse avec le HCR. Une fois clos l’inventaire des divergences, Philippe Leclerc n’oublie pas de souligner le positif. Sa conclusion est même inattendue: «Si l’on aime travailler avec la Suisse, c’est parce que son système de protection d’asile est l’une des réponses les plus intelligentes aux problèmes des réfugiés».

Bernard Weissbrodt

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