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Le nombre des requérants d’asile en chute libre

Jeunes requérants africains aux fourneaux. Keystone

En diminution de 17,2% par rapport à l’année précédente, le nombre de requérants d’asile et de personnes admises provisoirement en Suisse n’a jamais été aussi bas depuis 1990.

Les autorités l’expliquent par l’efficacité des mesures prises ces dernières années et par une tendance générale au niveau européen.

«Depuis l’an 2000, les chiffres diminuent lentement chaque année», constate Dominique Boillat, porte-parole de l’Office fédéral des réfugiés (ODR).

La Suisse a connu son maximum historique du nombre de requérants d’asile à la fin des années 90, au plus fort de la guerre au Kosovo. Ils étaient alors près de 110’000. Depuis, nombre d’entre eux ont pu rentrer au pays.

«Il y a également eu l’action humanitaire 2000, qui a permis de régulariser la situation de gens qui étaient là parfois depuis dix ans, avec des statuts provisoires», rappelle Dominique Boillat.

Avec les regroupements familiaux, cela a permis de délivrer des permis de séjour annuels à près de 16’000 personnes, principalement originaires des Balkans ou du Sri Lanka.

Ainsi, on est passé entre juin 2003 et juin 2004 de 66’244 requérants et personnes admises provisoirement à 62’505, ce qui traduit une baisse de 5,6%. Si l’on compare les six premiers mois des deux années, la baisse est même de 17,2%.

Et ces chiffres tombent précisément au moment où Christoph Blocher, nouveau ministre de tutelle de l’ODR, veut durcir encore la législation, ce qui n’a pas manqué d’inquiéter les œuvres d’entraide, les églises et jusqu’au Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés.

Durcissement européen

Depuis quelques années, le nombre des nouvelles demandes reste régulièrement inférieur à celui des départs, ce qui explique la baisse constante des effectifs. Comme le souligne l’ODR, les capacités de renvoi et de traitement des dossiers ont quasiment atteint leur pleine efficacité.

En fait, la tendance à la diminution du nombre des demandes est générale dans toute l’Europe de l’Ouest. L’Allemagne et les Pays-Bas viennent de durcir leur législation sur l’asile et la France ne devrait pas tarder à faire. Ce qui a forcément un effet dissuasif.

«Par ailleurs, rappelle Dominique Boillat, l’Union européenne a mis en place depuis l’an dernier le système de Dublin. Un requérant ne peut plus désormais déposer une demande d’asile que dans un seul pays».

Selon le porte-parole de l’ODR, la Suisse devrait adhérer rapidement à ce fichier centralisé, si elle ne veut pas «hériter» de tous les requérants dont l’Europe n’a pas voulu.

Depuis le 1er avril, la Suisse a décidé de ne plus accorder l’aide sociale aux requérants déboutés en attente de renvoi. L’effet dissuasif de cette mesure a-t-il une influence sur le nombre de nouvelles demandes?

Dominique Boillat estime qu’il est trop tôt pour en juger, même s’il se dit certain que l’effet d’annonce d’une telle mesure est dissuasif.

Les zones grises

Mais il est également certain que les chiffres ne disent pas tout. «Il faut aussi tenir compte des gens qui disparaissent des statistiques pour plonger dans la clandestinité ou tenter leur chance ailleurs», précise Dominique Boillat.

En outre, les cantons se plaignent de plus en plus souvent à l’ODR de ne pas pouvoir renvoyer des personnes contre lesquelles une décision d’expulsion a pourtant été rendue.

Les Balkans avant le Darfour

Si l’on revient aux chiffres du mois de juin 2004, les pays de provenance des requérants sont toujours plus ou moins les mêmes. La Serbie et le Monténégro, la Turquie et la Géorgie restent en tête de liste.

Ce qui ne surprend pas Dominique Boillat. «Le plus souvent, il n’y a pas de lien entre les terribles conflits qui peuvent éclater au Soudan ou en Irak, par exemple, et la provenance des requérants qui viennent en Suisse, note le porte-parole. Les réfugiés du Darfour ont tout juste les moyens de passer la frontière la plus proche, mais pas ceux de venir jusqu’ici».

Quant au nombre de personnes admises définitivement comme réfugiés, il reste assez stable au fil des ans, à 10% des requérants en moyenne.

«Cela ne veut pas dire qu’il y ait 90% de demandes abusives, précise Dominique Boillat. Car il faut tenir compte de toutes les admissions provisoires de gens qui pour un temps donné ne peuvent absolument pas rentrer dans leur pays».

swissinfo et les agences

Nombre de requérants d’asile pour 100’000 habitants:
Autriche – 875
Suisse – 643
Grande-Bretagne – 277
France – 189
Allemagne – 147

En juin 2004, la Suisse a enregistré 1195 nouvelles demandes d’asile et 1921 départs de requérants.

– A fin juin 2004, le nombre de requérants d’asile et de personnes admises provisoirement en Suisse est tombé à 62’505. Il n’y en avait jamais eu aussi peu depuis 1990.

– A la fin des années 90, avec la guerre au Kosovo, la Suisse avait atteint le nombre record de 110’000 demandeurs d’asile.

– Depuis, la tendance est à la baisse constante, en Suisse et dans toute l’Europe occidentale.

– La veille de la publication de cette statistique, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés s’est inquiété publiquement du durcissement que la Suisse envisage d’introduire dans sa politique d’asile.

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