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Le rêve des frères Wright

Il y a tout juste un siècle, le 17 décembre 1903, les Américains Wilbur et Orville Wright réalisaient un vieux rêve de l’humanité

Ils franchissaient 260 mètres en 59 secondes sur leur «Flyer», avion biplan aux hélices de bois. C’était le premier vol motorisé et dirigé de l’Histoire.

Le 9 octobre 1890, Clément Ader précède les frères Wright. Le Français s’élève avec son «Eole» à quelques centimètres du sol sur une cinquantaine de mètres.

Mais cet avion aux ailes de chauve-souris, propulsé par un moteur à vapeur, n’accomplit ce jour-là qu’un saut de puce, et non un vol dirigé de bout en bout.

Un rêve d’enfance

A des milliers de kilomètres de là, à Dayton dans l’Ohio, Wilbur et Orville Wright ne se préoccupent pas encore d’aéronautique. Ils ont ouvert en 1892 un atelier de vente et de réparation de bicyclettes. Un commerce qu’ils font prospérer.

Mais Wilbur, taciturne, capable de se plonger des heures durant dans un livre, et son frère cadet Orville, plus expansif, ne s’en satisfont pas. Depuis l’enfance, leur rêve est de voler.

«Mécaniciens éclairés, ils avaient une soif constante de se documenter», explique Philippe Gras, chef du service de documentation du Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget.

Ils lisent beaucoup, entretiennent une correspondance assidue avec les pionniers en Europe et aux Etats-Unis, comme Octave Chanute, leur mentor, personnage phare des débuts de l’aviation.

Les frères Wright ont également tiré parti des recherches du Français Louis Mouillard sur le vol des oiseaux et des travaux de l’Allemand Otto Lilienthal, pionnier du vol plané qui s’est tué dans l’accident d’un de ses prototypes en 1896.

Les premières expériences



D’abord, les frères Wright construisent des planeurs pour valider leurs théories.

Ils expérimentent la commande de gauchissement, ancêtre des ailerons, consistant à obtenir par l’intermédiaire de câbles la torsion d’une partie de l’aile, afin d’incliner l’avion et permettre des virages.

Ils sont aussi les premiers à utiliser une soufflerie pour étudier l’écoulement de l’air sur les ailes et dessiner ainsi le profil le plus efficace.

Au printemps 1903, après plusieurs centaines de vols planés, les Wright entament dans leur atelier de Dayton la construction du «Flyer».

Le «Flyer»

Le biplan mesure 6,4m de long pour 12,3m d’envergure et comporte deux ailes droites superposées. Au centre: un petit moteur à essence de 16cv, que les frères ont construit eux-mêmes. Le moteur entraîne deux hélices en bois par l’intermédiaire de chaînes de bicyclette.

Cet assemblage de bois, de toile et de tubes métalliques est relativement léger, un peu plus de 300kg avec le pilote.

Celui-ci n’a ni siège, ni parachute. Il pilote allongé à plat ventre sur le plan inférieur, entre les deux hélices, en prenant appui sur les coudes pour tenir les commandes.

Le 14 décembre 1903, les Wright reviennent à Kitty Hawk, en Caroline du Nord, où ils mènent leurs essais. Bien exposé au vent, l’endroit offre une vaste plage, large de plusieurs centaines de mètres et s’étirant sur des kilomètres.

L’envol



Après avoir tiré à pile ou face, Wilbur s’installe aux commandes. Mais la première tentative échoue. Après quelques réparations, les Wright sont de nouveau à pied d’œuvre, au matin du 17 décembre.

Ils décollent face au vent qui souffle fort et par rafales, entre 30 et 40km/h. Le premier vol, effectué par Orville à 10h35, est le plus court: 36 mètres, parcourus en 12 secondes. Les deux frères se succèdent aux commandes. Ils enchaînent les essais.

Au cours du meilleur des quatre de la matinée, Wilbur franchit 260 mètres en 59 secondes, à environ trois mètres au-dessus du sable. Il entre dans l’histoire. Enfin, pas tout de suite…

Les deux frères ont pris soin d’inviter des témoins, des habitants de la région et des membres de la petite station météo de Kitty Hawk. Un photographe prend des images au moment du décollage. L’exploit est indiscutable, mais passe quasiment inaperçu aux Etats-Unis.

La reconnaissance



Les représentants de la grande presse ne sont pas venus, jugeant Kitty Hawk trop éloigné. Il faudra cinq ans pour que le génie des frères Wright soit reconnu.

En 1908, les Wright vont en France, où ils présentent enfin leur appareil en vol et ouvrent une école de pilotage. Ils perfectionnent leur «Flyer».

Mais la conquête de l’air se poursuivra sans eux. Le Français Henri Farman boucle en 1908 le kilomètre en circuit fermé. Et Louis Blériot franchit la Manche un an plus tard.

Les deux frères n’ont par ailleurs retiré aucun profit financier de leur vol historique. Seul débouché possible, l’armée américaine, qui, comme dans beaucoup de pays, ne croit pas à l’aviation. Elle refuse d’acheter leur «Flyer».

L’appareil est aujourd’hui exposé au Musée de l’Air et de l’Espace de Washington.

swissinfo et les agences

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