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Les camions Migros ne roulent plus que pour les Valaisans

Des camions qui transportent aussi un bout d’histoire. Keystone Archive

Les célèbres camions-magasins ne circulaient plus que dans deux cantons. Le Tessin les laissera au garage. Il ne reste que le Valais.

«C’était une grande tradition, c’est un bon souvenir, mais tout ça n’a plus d’avenir, et je suis triste qu’il n’y ait pas d’autre solution», souligne Ulrich Hochstrasser. Et on le croit volontiers. Il dirige Migros-Tessin créée par son père. Pour lui, supprimer les camions-magasins, c’est presque attenter au patrimoine familial.

C’est que, depuis 1933, les fameux porte-drapeaux de la coopérative s’en allaient chaque semaine dans le fond des vallées tessinoises, pour ravitailler les villageois en aliments frais, conserves ou produits ménagers.

Adieu veau, vache, cochon, couvée…

Ce commerce ambulant se développa jusqu’en 1983. «Cette année-là, se souvient Ulrich Hochstrasser, nous avions douze camions et un chiffre d’affaires qui approchait les 20 millions de francs, mais à partir de 1990, on a su que les jours étaient comptés».

«On n’arrête pas le temps, dit-il encore. Les routes se sont améliorées, les vallées ont été peu à peu désertées, et aujourd’hui toutes les familles ont des possibilités d’approvisionnement à moins de 20 minutes de chez elles.»

Ce service devenait de plus en plus coûteux, de la taxe poids lourd à la licence du camion-vente. Au moment de décider d’investir ou non dans le renouvellement de son parc camions, Migros-Tessin a donc préféré, à contre-cœur, jeter l’éponge plutôt que de continuer à travailler à perte.

Déficitaire mais encore précieux

Il ne reste donc que le Valais et ses deux camions-magasins, l’un dans le haut du canton, l’autre dans sa partie romande. Pour le moment, pas question d’interrompre leurs sorties quasi-journalières, été comme hiver.

«J’espère que ça durera le plus longtemps possible, nous confie Roland Duchoud, directeur de Migros-Valais. On avisera en temps voulu, lorsqu’il faudra remplacer les véhicules. Pour le moment, ils fonctionnent très bien.»

«Mais, reconnaît-il, c’est depuis longtemps un service déficitaire. Et si on continue à le prendre en charge, c’est d’abord parce qu’il y a encore une clientèle, des personnes âgées surtout qui n’ont pas la possibilité de se déplacer pour se ravitailler.»

Un lieu de rendez-vous

Ces camions, en Valais, transportent aussi un bout d’histoire. C’est à travers eux, que la coopérative a commencé de se faire connaître avant d’emporter les grosses parts de marché qu’on lui connaît aujourd’hui. Ce qui, à l’époque, aurait provoqué quelques batailles épiques avec les commerçants du cru.

En fait, selon Roland Duchoud, ces magasins roulants représentent beaucoup plus qu’un point de vente: «c’est un lieu de rencontres, avec les autres personnes du village, et d’amitié avec les chauffeurs et vendeuses qui depuis des années assurent ce rendez-vous hebdomadaire.»

A croire le directeur de Migros-Valais, ce qui se passe autour des camions-magasins ferait certainement un bon sujet de recherche pour des étudiants en mal de sociologie. Il a sans doute raison. Comme lorsqu’il dit que le camion, «ça remplace aussi le bistrot pendant une petite demi-heure»!

Bernard Weissbrodt

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