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Les syndicats suisses se mobilisent

A l'heure où se fixent les dernières modalités de l'extension de la libre circulation aux dix nouveaux membres de l'UE, les syndicats suisses tentent d'éviter le dumping social engendré par un afflux de travailleurs.

Ils jouent de leurs liens transnationaux pour encadrer les migrants.

«Nous avons des contacts privilégiés avec les syndicats des pays nous entourant», indique Jean-Claude Prince, secrétaire central de l’Union syndicale suisse (USS).

La coordination transfrontalière est souvent locale: le syndicat FTMH et la section du Doubs du syndicat français Force ouvrière (FO) ont ainsi créé en 1995 dans l’Arc jurassien un «euro guichet social», doté de quatre bureaux.

Cette structure est chargée de renseigner les travailleurs frontaliers français à propos de leurs droits et de les défendre, le cas échéant, explique encore Jean-Claude Prince.

Des initiatives semblables ont vu le jour dans les agglomérations genevoise et bâloise, et un conseil intersyndical allemand, autrichien et suisse a été mis sur pied dans la région du lac de Constance.

«Contrôler les flux»

En 2001, la FTMH a conclu une convention avec FO Métaux pour contrôler l’application de l’accord de libre circulation.

Par un échange de données et de délégués, les deux syndicats comparent les salaires pratiqués des deux côtés de la frontière et se coordonnent pour les négociations, explique le syndicaliste et conseiller national socialiste jurassien Jean-Claude Rennwald.

Ils tentent en outre d’obtenir une extension des conventions collectives de travail (CCT) aux travailleurs migrants engagés par les entreprises helvétiques ou aux travailleurs détachés, ajoute-t-il. Le syndicat dispose aussi d’un tel accord avec le syndicat allemand IG Metall.

Le SIB a quant à lui établi un «réseau de collaboration» avec le syndicat allemand IG Bau pour «arriver à un contrôle plus étroit des flux migratoires en provenance des Länder de l’est», note son président Vasco Pedrina.

«Les travailleurs sont suivis par nous en Suisse et par IG Bau en Allemagne», dit-il.

Comités d’entreprise

Les contacts sont fréquents avec les syndicats espagnols et portugais. Des cours de formation pour les saisonniers ont pu être mis sur pied dans leur pays pendant l’hiver. Ainsi, «quand ils reviennent en Suisse, ils sont qualifiés», relève Vasco Pedrina.

Autre forme de collaboration transnationale: les comités d’entreprise. Gérés par le syndicat du pays dans lequel l’entreprise a établi son siège, ils permettent aux employés de différents pays de coordonner leurs revendications et de décider d’actions communes.

Illustration récente, des syndicalistes français sont venus manifester sur le site soleurois d’une multinationale, souligne Fabienne Blanc-Kühn, responsable du secteur métallurgie à la FTMH.

De même, le comité d’entreprise de la société canadienne Alcan tente d’élaborer des propositions pour sauver des emplois à l’échelle européenne, tant en Suisse qu’en Allemagne.

Moins de relais à l’est

Pour ce qui est des dix nouveaux adhérents à l’UE, les contacts sont moins aisés. Ils se déroulent principalement au sein des fédérations syndicales européennes, dit Fabienne Blanc-Kühn, qui revient d’un voyage en Pologne et en République tchèque.

La syndicaliste a pu y constater les disparités en matière de salaire et de conditions de travail lors de ses échanges avec les syndicats locaux.

«Nous avons moins de relais dans ces pays», reconnaît Vasco Pedrina. Les structures syndicales y sont faibles et éclatées.

En Pologne, «le syndicat du bâtiment ne compte que 15 000 membres pour un pays de 40 millions d’habitants», poursuit-il.

C’est pourquoi les mesures d’accompagnement à l’extension de la libre circulation sont indispensables, estime-t-il.

A l’USS, on anticipe la suite des événements. «Nous collaborons depuis une quinzaine d’années avec les syndicats bulgares et roumains pour leur fournir une formation à l’action syndicale et à la négociation», déclare Jean-Claude Prince.

«Si les conditions de travail s’améliorent sur place, on évitera que ces travailleurs viennent casser les salaires en Suisse», conclut-il.

swissinfo avec les agences

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