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On est encore loin du modèle suisse

La Suisse n’a pas profondément inspiré le projet de fédéralisme européen. Keystone Archive

Huit mois après l'ouverture de la Convention, Valéry Giscard d'Estaing a dévoilé lundi à Bruxelles l'architecture de la future Constitution européenne.

Ce projet ne propose pas de véritable évolution fédérale. Il est encore loin du modèle suisse.

Selon le texte concocté par l’ancien président français, l’Union rassemblera des Etats européens «conservant leur identité nationale».

Ces Etats «coordonneront étroitement leurs politiques au niveau européen». Et ils «géreront, sur le mode fédéral, certaines compétences communes».

La double nature de l’Europe

Ainsi, toujours d’après ce même projet, l’Union aura une double nature. Elle sera à la fois intergouvernementale et fédérale.

Par ailleurs, le texte précise que toute compétence non attribuée à l’Union demeurera dans le giron des Etats.

C’est donc un texte très prudent qu’a rédigé Valéry Giscard d’Estaing. Les articles consacrés aux Institutions demeurent vagues. Seule innovation, la création d’un «Congrès des peuples d’Europe».

«Ce projet concrétise des pratiques existantes. Il ne s’agit pas d’un vrai traité constitutionnel», regrette Frédéric Esposito, chercheur à la Faculté de Droit de l’Université de Genève. Et de préciser: «Il n’y a pas là de véritable évolution fédérale».

Une démocratie participative

Selon le juriste suisse, pour se rapprocher du modèle helvétique, le projet de traité devrait rééquilibrer les pouvoirs entre le Conseil des ministres et le Parlement. Il devrait également renforce les compétences du Comité des Régions et fixer les droits politiques des citoyens.

«Il faudrait introduire la possibilité du référendum au niveau européen, explique Frédéric Esposito. Les citoyens devraient ainsi être consultés sur la ratification du nouveau Traité et sur l’élargissement.»

L’article 34 du projet énonce le principe d’une «démocratie participative». Mais le chercheur suisse est très sceptique.

«L’Union européenne n’a pas du tout l’intention de concrétiser ce principe, juge Frédéric Esposito. Même, si depuis le début des années quatre-vingt-dix, de plus en plus d’Etats intègrent le référendum dans leur Constitution.»

Le peuple va être représenté deux fois

Cela dit, comme l’a rappelé lundi Valéry Giscard d’Estaing, il ne s’agit là que d’un projet d’architecture du futur traité. Il reste maintenant à en préciser le contenu. Et la place qui sera faite aux régions intéresse tout particulièrement les Suisses.

«Chaque pas qui est fait en direction du fédéralisme nous rapproche du système helvétique», reconnaît Frédéric Esposito. Mais, pour l’heure, il manque l’équivalent européen du Conseil des Etats.»

«Ce n’est pas le Congrès des peuples qui peut jouer ce rôle. En fait, s’étonne l’expert suisse, le peuple va être représenté deux fois.»

Et d’ajouter: «Il manque aussi, dans le projet européen, la reconnaissance de la neutralité et de la démocratie directe».

Mais Frédéric Esposito se veut positif: «Pour la première fois, admet-il, on discute d’une Europe fédérale dans un cadre prestigieux, celui de la Convention».

swissinfo/Barbara Speziali à Bruxelles

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