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Conflit afghan: sévère mise en garde du CICR

Nazir, 9 ans, a été blessé par les combats qui font rage au nord-est du Pakistan. ICRC/J. Tanner

La situation des civils en Afghanistan et au Pakistan est de plus en plus «critique» en raison des combats. Le directeur des opérations du CICR pour l'Asie du Sud Jacques de Maio appelle la communauté internationale à réagir «de toute urgence».

A la veille de la conférence internationale sur l’Afghanistan, qui se tient mardi à La Haye, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) demande à tous les belligérants de prendre des mesures pour épargner les civils.

Trop de victimes

La milice islamiste, dont de nombreux membres sont retranchés dans les zones tribales pakistanaises, multiplie les actes de guérilla. La situation est d’une gravité sans précédent depuis la chute du régime taliban à Kaboul, à l’automne 2001.

«Le nombre de victimes civiles est beaucoup trop élevé», a déclaré Jacques de Maio lors d’une conférence de presse à Genève. Le nombre de blessés admis dans les structures chirurgicales contrôlées par le CICR à Quetta et Peshawar a doublé.

M. De Maio craint que les participants à cette conférence ne mettent surtout l’accent sur les aspects militaires et politiques du conflit, reléguant au second plan une situation humanitaire «qui se dégrade».

Or le conflit qui oppose insurgés islamistes et forces gouvernementales épaulées par les troupes de la coalition internationale de part et d’autre de la frontière afghano-pakistanaise «s’intensifie et affecte plus de régions» d’Afghanistan, avec des conséquences également dans les zones tribales du nord-ouest du Pakistan.

Par conséquent, la capacité de répondre aux besoins humanitaires croissants est limitée en raison du caractère «extrêmement dangereux» de la zone et certaines régions sont inaccessibles.

Le CICR a doublé son budget

Le CICR prévoit d’assister 140’000 personnes déplacées par les combats au Pakistan cette année. Il a doublé son budget pour le porter de 24 à 52,6 millions de francs. Une centaine d’expatriés et 600 employés locaux sont actifs au Pakistan et un nombre à peu près identique en Afghanistan.

Interrogé sur la nouvelle stratégie annoncée vendredi par le président Barack Obama, qui prévoit un engagement américain renforcé au Pakistan, le responsable du CICR s’attend à des besoins humanitaires accrus.

«Avec l’intensification des combats, il y aura davantage de victimes, a prévenu Jacques de Maio. Nous sommes très préoccupés par le fait que le droit international humanitaire n’est pas respecté et que la population civile paie le plus lourd tribut au conflit.»

Doutes sur le plan américain

Barack Obama a annoncé l’envoi de 4000 soldats supplémentaires pour soutenir la police et l’armée afghanes. Le mois dernier, il avait déjà annoncé que 17’500 hommes allaient renforcer l’effectif actuel de 38’000.

Mohammad-Reza Djalili, professeur à l’Institut universitaire des hautes études internationales de Genève, ne cache pas ses doutes à propos de la nouvelle stratégie américaine.

«Il est difficile de savoir si ce plan permettra de modifier notablement la situation, après tout, l’ex-Union soviétique n’y avait pas réussi avec ses 100’000 soldats», a-t-il indiqué à swissinfo.

«La stratégie d’Obama est risquée car, tout en annonçant un renforcement des effectifs militaires, elle annonce aussi un retrait, ce qui pourrait stimuler les talibans.»

Notre expert estime que les Etats-Unis paient le prix fort de la politique de l’ancien président Bush qui, en 2003, a décidé d’envahir l’Irak au lieu de stabiliser l’Afghanistan.

«Dans certaines régions, les talibans ont réussi à imposer leur présence de manière impressionnante. Ils ont compris les limites des armes modernes dans les combats de guérilla.»

Et de conclure que les troupes américaines doivent impérativement éviter les dommages collatéraux qui risqueraient d’écorner davantage leur image dans la population locale.

swissinfo et les agences, avec Simon Bradley à Genève

La conférence internationale sur l’Afghanistan réunira mardi à La Haye (Pays-Bas) la secrétaire d’Etat américaine Hilary Clinton, le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et le président afghan Hamid Karzaï.

Près de 90 pays participent à cette réunion d’un jour, comme la Russie, la Chine et le Pakistan.

La Direction du développement et de la coopération (DDC) est présente sur place depuis 1977.

Depuis 2004, ses activités se sont graduellement transformée en aide au développement et à la reconstruction.

Le budget helvétique en Afghanistan a atteint environ 21 millions de francs en 2007.

En 2007, le ministère de la Défense a retiré les deux à quatre officiers suisses rattachés à l’Otan.

Après avoir été laminés par l’intervention américaine consécutive aux attentats de 2001, les talibans se sont repliés au nord-est du Pakistan voisin.

En Afghanistan, la situation s’est à nouveau agravée l’année dernière avec 5000 morts, dont 2100 civils, soit une augmentation de 40% par rapport à l’année dernière, selon l’ONU.

En 2008, 55% des civils tués ont été abattus par les talibans et leurs alliés, et 552 personnes ont péri sous les attaques aériennes des troupes de l’Otan et des Etats-Unis.

Après les Etats-Unis, l’Otan devrait aussi renforcer sa présence militaire en vue de l’élection présidentielle afghane en août prochain.

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