Des perspectives suisses en 10 langues

L’intégration, thème de campagne électorale

Pour tous les partis, l'intégration passe d'abord par l'apprentissage de la langue locale. Fabian Biasio/pixsil

Les partis gouvernementaux se sont découverts un thème commun pour séduire les électeurs: la politique d'intégration.

swissinfo a rencontré les quatre présidents de parti, qui se réuniront jeudi à Berne. Un projet de compromis issu du centre-gauche pourrait faire l’unanimité.

Les faits ne sont pas contestés: une mauvaise intégration des étrangers mène souvent au chômage, à la pauvreté, aux comportements illégaux et à l’aide sociale.

Une meilleure intégration est par conséquent dans l’intérêt de la société tout entière, et des politiciens en particulier.

Il n’est pas surprenant que ce sujet soit actuellement en tête des priorités des quatre partis membres du gouvernement. C’est aussi l’un des points forts qui sera discuté le 16 novembre à Berne, lors de la rencontre trimestrielle entre les quatre présidents du Parti socialiste (PS / gauche), du Parti Radical (PRD / droite), de L’Union démocratique du centre (UDC / droite dure) et du Parti démocrate-chrétien (PDC / centre droit).

Les quatre partis ont présenté ces derniers mois un concept de politique d’intégration. Les socialistes viennent de se plier à l’exercice, avec une présentation qui a eu lieu il y a une semaine.

Appliquer la nouvelle loi sur les étrangers

Dans sa position intitulée «La Suisse a besoin d’une politique d’intégration offensive», le PS estime que la nouvelle loi sur les étrangers, acceptée en votation le 24 septembre dernier, peut être la base d’un «contrat d’intégration».

Les immigrés doivent s’engager à apprendre une langue locale et à s’informer au-sujet des lois et des valeurs fondamentales de la Suisse.

«La nouvelle loi sur les étrangers contient un article qui, pour la première fois dans l’histoire suisse, peut être le point de départ d’une politique d’intégration nationale», a expliqué à swissinfo le président du Parti socialiste Hans-Jürg Fehr. «Nous pensons qu’il faut le mettre en application le plus vite possible.»

Population également sollicitée

«L’intégration permet à la Suisse de gagner», dit de son côté le PRD dans son papier de position. Le parti avance le même précepte que le PS: «exiger et encourager». Celui qui veut quelque chose doit aussi pouvoir être sollicité.

Selon le président radical Fulvio Pelli, l’intégration ne peut réussir que si la population dans son ensemble y participe. «La bonne volonté des immigrés ne suffit pas, explique-t-il. Encore faut-il que la population locale contribue aussi à l’effort commun.» Car l’intégration met en jeu la vie en commun à l’intérieur d’une société.

Davantage de bonne volonté

Le PDC avait présenté sa position en avril dernier, sous le titre «Liberté religieuse et intégration». Il y met l’accent sur les relations des chrétiens avec la communauté musulmane de Suisse.

«Nous avons été parmi les premiers à présenter une position à ce sujet, rappelle le président nouvellement élu Christophe Darbellay. Cela a poussé les autres partis à également présenter leur propre concept.»

Le PDC réclame également la mise en vigueur de la loi sur les étrangers. «Mais il faut de la volonté, poursuit Christophe Darbellay. Bien souvent, ce sont les mêmes qui réclament sans cesse une meilleure intégration et qui freinent ensuite des quatre fers lorsqu’il s’agit de financer des mesures concrètes.»

Le budget fédéral prévoit 14 millions pour ce faire, en l’état actuel. Pour beaucoup d’observateurs, c’est insuffisant.

Les mêmes règles pour tous

Dans son concept, daté de mars 2006, l’UDC le réclame haut et fort dès le titre: «Nos règles sont valables pour tous», écrit le parti. Celui qui est hôte de la Suisse doit s’efforcer de s’intégrer au mieux.

«Le point central est très certainement l’apprentissage de la langue», souligne le président UDC Ueli Maurer. «Savoir la langue permet de se sentir à l’aise dans une société et d’y évoluer librement.»

Pendant des années, l’UDC a été le seul parti à avoir fait de la politique des étrangers son cheval de bataille. Le parti dit aujourd’hui ne pas être opposé à ce que les autres formations se soient également saisies du dossier. «Elles ont remarqué qu’elles avaient manqué quelque chose d’essentiel, estime Ueli Maurer. Il est important que les problèmes soient désormais reconnus.»

Discussions au sommet

La rencontre prévue ce jeudi à Berne laisse entrevoir un scénario d’alliance de centre-gauche.

«La direction générale est certainement la même pour tous», avance Ueli Maurer. «Mais les moyens privilégiés pour y parvenir diffèrent d’un parti à l’autre. Nous avons les instruments nécessaires, mais il faut encore la volonté, de toutes les parties, de les utiliser.»

Christophe Darbellay en revanche ne ménage pas ses critiques envers l’UDC, coupable à ses yeux de ne chercher qu’à se profiler politiquement avec le sujet de l’intégration, sans véritablement vouloir travailler à des solutions concrètes.

«En ce moment, trois partis gouvernementaux ont la volonté de trouver des solutions», affirme Christophe Darbellay. Selon lui, une coopération du PDC est possible, «probablement avec le PRD et le PS».

Fulvio Pelli veut également y croire. «Plusieurs partis sont convaincus que l’intégration est la solution de nombreux problèmes qui se poseront à l’avenir. Avec ces partis, il est plus facile de travailler.» Mais il ne veut pas émettre de pronostic avant la discussion de jeudi.

Hans-Jürg Fehr envisage la réunion avec confiance. Il y a selon lui une concordance assez grande avec le PRD.

«J’estime que cela est, politiquement, très positif. Nous avons besoin de majorités fédérales pour mettre en œuvre une politique d’intégration. Cela ne sera possible que si une alliance de centre-gauche voit le jour.»

swissinfo, Christian Raaflaub
(Traduction Ariane Gigon Bormann)

Les Suisses ont accepté une nouvelle loi sur les étrangers le 24 septembre dernier, avec une majorité de 68% de votes positifs.

Cette loi prévoit notamment d’améliorer durablement la situation des étrangers présents en Suisse, grâce à un renforcement des mesures d’intégration. Les étrangers doivent également fournir des efforts en conséquence.

Les quatre partis gouvernementaux ont chacun présenté un concept d’intégration ces derniers mois. Un des points communs réside dans le nécessaire apprentissage, pour les immigrés, de la langue locale.

En Suisse, on nomme parti «gouvernemental» tout parti comptant au moins un représentant au Conseil fédéral, le gouvernement national.

Depuis 1959, le Parti radical-démocratique (PRD), le Parti démocrate-chrétien (PDC), l’Union démocratique du centre (UDC) et le Parti socialiste (PS) sont représentés au gouvernement.

Jusqu’en 2003, tous les partis sauf l’UDC avaient deux conseillers fédéraux (ou «ministres»). C’était l’ancienne «formule magique». Avec l’élection, en 2003, d’un deuxième élu UDC au gouvernement, et la non-réélection d’une ministre PDC pour coller à la force des partis au Parlement fédéral, la nouvelle formule magique se compose désormais de 2 PRD, 2 PS, 2 UDC et 1 PDC.

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision