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Menaces sur les premiers accords bilatéraux

Les syndicats craignent un dumping salarial consécutif à la libre-circulation des personnes. Keystone

L’opposition à l’extension de la libre-circulation des personnes pourrait remettre en cause les premiers accords bilatéraux avec l’Union européenne.

C’est l’un des principaux – et des plus disputés – thèmes de la session d’hiver du Parlement.

«Dumping salarial»: des mots qui font peur. Depuis plusieurs mois, les médias regorgent de récits de travailleurs étrangers venus de pays de l’Union européenne (UE) travailler en Suisse pour de très bas salaires. Beaucoup de salariés sont anxieux et désécurisés.

Les syndicats ont lancé une campagne agressive contre l’extension progressive de la libre-circulation des personnes aux ressortissants des nouveaux pays membres de l’Union européenne (UE).

Citant les cas d’abus et de dumping salarial, ils menacent de lancer un référendum contre le deuxième paquet d’accord bilatéraux.

Ce faisant, les syndicats jouent avec le feu, consciemment, pour obtenir de nouvelles concessions. Car en cas d’éventuelle votation populaire, un non fera capoter tous les accords.

Mesures d’accompagnement

Le nouvel accord est un texte additionnel au premier règlement sur la libre-circulation des personnes adopté dans les Bilatérales I.

Depuis le 1er juin 2004, les Suisses travaillant dans les Quinze anciens pays de l’UE ont les mêmes droits que les ressortissants de ces pays en ce qui concerne les autorisations de séjour et l’accès au marché du travail.

Cet accord doit être étendu aux neuf nouveaux membres de l’UE. Les syndicats exigent de nouvelles mesures d’accompagnement, telles que contingents, minima salariaux ou autres mesures de contrôle.

«Soit les cantons entreprennent quelque chose contre le dumping salarial, soit le référendum sera lancé», avertit Vasco Pedrina, co-président du nouveau grand syndicat unifié UNIA.

Opposition de droite et de gauche

Les petites et moyennes entreprises du secteur de l’artisanat se sont jointes à ces revendications. Elles craignent la concurrence étrangère et demandent aussi des mesures de protection.

Sur le plan politique, l’Union démocratique du centre (UDC – Droite dure) et l’Alliance pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN) qui lui est liée brandissent également la menace du référendum.

Ils craignent une arrivée massive de travailleurs étrangers peu qualifiés et martèlent les dangers de l’accord pour les places de travail indigènes. Les observateurs estiment cependant que cette opposition est plus fondamentalement motivée par la volonté d’empêcher tout rapprochement avec l’UE.

Réaction probable de Bruxelles

Mais l’accord sur la libre-circulation n’est pas seul en jeu. En cas de référendum, tout le paquet I est aussi remis en question. Bruxelles pourrait en effet juger discriminatoire un rejet visant les nouveaux Etats-membres et résilier les premiers accords.

Les accords de chaque paquet sont du reste liés entre eux par une clause dite «de guillotine»: le rejet d’un seul dossier entraîne celui de tous les autres.

«On ne s’imagine pas à quel point la Suisse reviendrait en arrière et s’exposerait à des chicaneries de l’UE si le bilatéralisme, qui a amené des résultats très positifs jusqu’ici, était abandonnné», écrit Peter Hasler, directeur de l’Union patronale suisse, dans la Neue Zürcher Zeitung.

«Jouer ce jeu, c’est mettre l’économie suisse en grand danger», poursuit Peter Hasler. De plus, les opposants à l’UE mènent une stratégie très risquée pour eux aussi: si la voie bilatérale est abandonnée, il ne restera finalement plus que la solution d’une adhésion.

swissinfo, Christian Raaflaub
(Traduction: Ariane Gigon Bormann)

– L’extension de la libre-circulation des personnes aux nouveaux Etats membres de l’UE a été négociée dans le cadre des accords bilatéraux II.

– Le règlement actuel concernant la libre-circulation avec les ressortissants des Quinze «anciens» pays de l’Union est entré en vigueur le 1er juin dernier. Il sera étendu progressivement durant les douze prochaines années.

– En s’en prenant à la libre-circulation des personnes, les opposants mettent aussi en péril le premier paquet d’accords, les Bilatérales I.

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