Peter Hess, juge et partie

Les membres du bureau du Conseil national se penchent vendredi sur les liens controversés qu'entretiennent certains élus avec des conseils d'administration. Ironie de l'histoire, la réunion est présidée par celui par qui le scandale est arrivé: le démocrate-chrétien zougois Peter Hess.
La polémique date d’une semaine. La presse dominicale a révélé que le premier citoyen de l’Etat, le président du Conseil national Peter Hess, siégeait dans le conseil d’administration de deux sociétés liées à l’industrie du tabac: Mabritab International et British American Tabacco International (BATI).
Problème: l’une des sociétés de BATI est soupçonnée de participer à la contrebande de cigarettes en Europe. Face aux critiques, Peter Hess a donc immédiatement démissionné des deux conseils dans lesquels il siégeait.
Mais la polémique continue. En effet, le président du Conseil national n’avait jamais révélé avoir des mandats auprès de l’industrie du tabac, et cela en toute légalité.
En fait, tout le problème vient du fait que les règles du Parlement sont floues. Les parlementaires ne doivent déclarer que leurs mandats dits «importants». Et par «importants», il faut comprendre des mandats exercés dans des sociétés dont le capital-actions est supérieur à 5 millions de francs.
Du coup, en ne déclarant pas ses deux mandats dans des sociétés dont le capital-actions était effectivement inférieur à cette limite, Peter Hess a agi en toute légalité. L’affaire a cependant créé assez de remous pour que le bureau du Conseil national décide de discuter de la question et de voir s’il n’y a pas lieu de changer les règles actuelles.
C’est en tout cas l’avis de Pierre Tillmanns, scrutateur remplaçant du bureau du Conseil national. «Il faut faire les choses correctement ou ne pas les faire du tout», déclare ce socialiste vaudois.
Pierre Tillmanns déposera donc une motion au Conseil national demandant que les parlementaires soient obligés de déclarer tous leurs mandats. Cette solution aurait, selon lui, l’avantage de permettre une totale transparence, ce qui n’est pas le cas avec les règles actuelles.
L’ironie de l’histoire, c’est que le Bureau du Conseil national, qui doit se pencher sur cette question, est justement présidé par Peter Hess, celui qui est actuellement dans l’œil du cyclone.
Pierre Tillmanns avoue que cette situation «peut poser problème». Et le socialiste vaudois estime que Peter Hess aurait «une bonne idée» en cédant, pour cette occasion, sa place de président à quelqu’un d’autre.
Mais Alessandro Delprete, porte-parole adjoint des Services du Parlement, indique que, pour l’heure, ce scénario n’est pas prévu. Et, d’ailleurs, il n’y a pas de raison pour que Peter Hess cède sa place.
«La réunion du bureau ne constitue en aucun cas le procès de Peter Hess, qui a agi en toute légalité, souligne le porte-parole. C’est d’ailleurs sur l’initiative de M. Hess que le bureau abordera ce sujet».
Reste maintenant à voir si les membres du bureau du Conseil national entendent apporter plus de transparence au sujet des mandats des parlementaires fédéraux. Réponse vendredi en fin d’après-midi.
Olivier Pauchard

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