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Premier référendum cantonal depuis 1874

Avec le référendum, les cantons ont leur mot à dire au Parlement fédéral. Keystone

Le peuple votera sur le paquet fiscal de la Confédération récemment approuvé par le Parlement.

Il fallait que huit cantons au moins acceptent de lancer un référendum. C’est désormais chose faite. Cet instrument politique n’avait encore jamais été utilisé.

Le Parlement vaudois a rejoint mardi le camp des référendaires. Les députés ont accepté le référendum par 89 oui, 63 non et 4 abstentions. Une seconde lecture aura lieu mardi, mais l’écart semble assez net pour que le vote ne s’inverse pas.

Le seuil fatidique des huit cantons nécessaires pour l’aboutissement d’un référendum cantonal est donc atteint. Auparavant, les cantons de Saint-Gall, de Berne, des Grisons, de Soleure, d’Obwald, du Valais et de Bâle-Ville s’étaient déjà prononcés dans le même sens.

Allègements fiscaux gelés

L’aboutissement du référendum cantonal signifie que le peuple suisse devra se prononcer sur le paquet fiscal 2001. Conséquence: les allègements fiscaux contenus dans ce paquet ne pourront pas entrer en vigueur le 1er janvier, ainsi qu’il était prévu.

Ces allégements approuvés le 20 juin dernier par la majorité bourgeoise des Chambres fédérales prévoient des réductions fiscales pour les familles et pour les propriétaires.

Les réductions pour les familles ne sont guère contestées. Il en va en revanche tout autrement des réductions pour les propriétaires.

Le paquet fiscal prévoit la suppression de l’impôt sur la valeur locative. En revanche, contrairement à ce que demandait le gouvernement, les Chambres fédérales ont refusé d’abolir les déductions fiscales relatives aux hypothèques et aux travaux d’entretien. Du coup, les propriétaires sont doublement gagnants.

Selon les estimations des cantons, le paquet fiscal devrait faire perdre au moins deux milliards aux cantons et aux communes. Dans le cas du canton de Vaud, par exemple, le manque à gagner se situe entre 132 et 200 millions de francs.

Il s’agit d’une perte financière inacceptable pour les cantons qui ont déjà bien de la peine à boucler leurs budgets en cette période de récession économique. D’où la décision de lancer le référendum.

Aussi un référendum de la gauche

Le paquet fiscal est attaqué par un autre référendum lancé par les Verts et l’Association suisse des locataires. Les deux organisations ont déjà obtenu 35’000 signatures. Elles ont encore jusqu’à début octobre pour trouver les 15’000 autres signatures manquantes.

Mais elles peuvent désormais compter sur un allié de poids. En effet, la semaine dernière, le Parti socialiste a décidé de les aider. Il craignait en effet que le référendum des cantons n’aboutisse pas.

Cependant, bien que le référendum des cantons ait passé la rampe, les milieux de gauche ne veulent pour l’heure pas renoncer à leur propre référendum. Rien n’a été décidé dans ce sens, indique Hubert Zurkinden, secrétaire général des Verts.

Comme les cantons, les milieux de gauche craignent également pour les finances des collectivités publiques. Mais ils motivent également leur référendum par des raisons sociales.

A leurs yeux, les allègements fiscaux prévus par la Confédération ne profitent qu’aux moyens et hauts revenus. Ils ne profitent en revanche en rien aux moins favorisés. Le «cadeau» fait aux propriétaires est particulièrement choquant pour la gauche.

Guerre à fronts multiples

Pour le politologue Jeremias Blaser, de l’Institut du fédéralisme de l’Université de Fribourg, le succès du référendum cantonal s’explique par la pression financière croissante sur les cantons.

Avant la fin des années 90, les cantons avaient la possibilité d’alléger leurs charges financières en en reportant une partie sur les communes. Or depuis, la pression sur les cantons n’a cessé d’augmenter et les communes ne sont plus en mesure d’absorber des charges supplémentaires.

La bataille en vue de la votation va être particulièrement intéressante, estime Jeremias Blaser. Il s’agira d’une «guerre à fronts multiples». Les cantons qui ont dit oui vont se battre contre la Confédération et contre les cantons qui ont dit non.

De plus, il y aura des luttes au sein d’un même canton entre ceux qui ont soutenu le référendum et ceux qui l’ont refusé. Une chose est certaine: la situation se révélera complexe aux yeux de l’électorat.

swissinfo et les agences

– Le référendum facultatif est inscrit dans la Constitution depuis 1874. Il peut être saisi par 50’000 citoyens ou huit cantons.

– Le référendum des cantons a été évoqué à plusieurs reprises, par exemple pour la révision du code pénal en 1982 ou pour la loi sur la protection des eaux en 1991.

– Mais jusqu’à présent, il avait toujours manqué un nombre suffisant de cantons pour obtenir le référendum.

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