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Un pas de plus vers la reconnaissance du Kosovo

Le président Geri Müller et la vice-présidente Christa Markwalder ont expliqué le choix de la commission de la Chambre basse devant la presse. Keystone

A 24 heures de distance, les commissions de politique extérieur des deux Chambres du Parlement se sont exprimées en faveur d'une reconnaissance de l'indépendance du Kosovo.

Selon les parlementaires, cette décision n’irait pas à l’encontre de la neutralité suisse. Reste encore au gouvernement à se prononcer sur la question lors de l’une de ses prochaines séances.

A l’instar de son homologue de la Chambre haute jeudi (par 7 voix contre 4), la commission de politique extérieure de la Chambre basse a annoncé vendredi son soutien à la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo par la Suisse.

La commission de la Chambre basse a décidé de recommander la reconnaissance du Kosovo par 15 voix contre 10, a précisé son président Geri Müller, lors d’une conférence de presse. Comme celle de la Chambre haute, elle estime que cette reconnaissance contribuera à la stabilité dans les Balkans.

Elle laisse de même au gouvernement le soin de choisir le moment opportun. Dans ses recommandations au gouvernement, elle demande que la Suisse s’engage pour que les droits des minorités soient respectés dans le nouvel Etat.

Pas contre la Serbie

D’éventuelles tensions entre Serbes et Kosovars en Suisse, ou avec Belgrade, ont aussi été évoquées. Il s’agit de rendre clair que «ce n’est pas un acte contre la Serbie», a déclaré Geri Müller.

Interrogé jeudi, l’ambassadeur de Serbie en Suisse, Dragan Marsicanin s’est montré peu loquace sur ce point. En cas de reconnaissance du Kosovo par la Suisse, la Serbie adoptera des «mesures raisonnables». «Leur contenu est pour le moment tenu secret», a ajouté le diplomate.

Le ministère des Finances (DFF) a fait savoir qu’il n’y avait pour le moment pas de raisons de s’inquiéter. La collaboration au sein du FMI entre la Suisse et la Serbie – les deux pays font partie du même groupe de vote – est «très bonne», a affirmé Paul Inderbinen, du DFF.

Etude en profondeur

La commission a passé en revue les différents aspects liés à une reconnaissance du nouvel Etat par la Suisse – droit international, neutralité, droit à l’autodétermination d’autres peuples et questions politiques, notamment.

«Les aspects juridiques ont été profondément discutés», a souligné Geri Müller. La majorité de la commission a jugé une reconnaissance du Kosovo «peu problématique» du point de vue du droit international.

Pour la vice-présidente de la commission, Christa Markwalder, cette reconnaissance est même «conforme au droit international». S’agissant de la neutralité, la commission a estimé qu’elle ne serait pas lésée.

Pour prendre cette décision, trois experts ont été consultés – le directeur de l’Institut du fédéralisme de Fribourg et conseiller du gouvernement serbe Thomas Fleiner, le professeur à l’Institut européen de Bâle Laurent Goetschel ainsi que Marcelo Kohen, professeur à l’Institut universitaire de hautes études internationales et du développement à Genève.

La commission a également discuté avec le ministre suisse des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey, qui a à plusieurs reprise milité en faveur de l’indépendance de la province serbe.

Micheline Calmy-Rey critiquée

La reconnaissance du Kosovo provoque cependant des remous. Ainsi, dans une interview publiée jeudi dans le quotidien alémanique Tages-Anzeiger, le président de la commission de la Chambre haute Dick Marty a estimé que «le Kosovo n’est absolument pas prêt pour l’indépendance».

Le sénateur tessinois dresse un sombre tableau de l’état de l’ancienne province serbe, pointant du doigt notamment sa situation économique désastreuse et son taux de chômage très élevé.

Dick Marty critique par ailleurs la prise de position précoce de Micheline Calmy-Rey pour l’indépendance du Kosovo. «Je n’ai jamais compris pourquoi Mme Calmy-Rey s’était prononcée en faveur de l’indépendance il y déjà deux ans (…) Elle n’a pas consulté le Parlement au préalable, ni visiblement le gouvernement», affirme le sénateur.

swissinfo et les agences

Des manifestations contre l’indépendance du Kosovo sont prévues en fin de semaine à Genève et Zurich, organisées par divers milieux serbes. Des autorisations ont été demandées et accordées par les autorités municipales.

A Genève, la manifestation devrait avoir lieu dimanche entre 14 et 17 heures sur la Place des Nations. Les autorités ont exigé de l’organisateur, le Centre serbe de Genève, qu’elle soit encadrée et que tout incident soit évité.

A Zurich, la manifestation est prévue à 13 h 30, samedi. La police a fait savoir que des textos et des courriels appellent depuis une semaine les ressortissants serbes à venir manifester contre le Kosovo à Aarau et dans d’autres villes suisses. Les sources de ces messages ne sont pas des organisations officielles et aucune autorisation de manifestation n’a été demandée à Aarau.

Les villes de Berne et Bâle n’ont pas non plus été contactées pour une demande d’autorisation de manifestation.

De 170’000 à 190’000 expatriés Kosovars vivent en Suisse, soit pratiquement 10% de la population résidente au Kosovo. Il s’agit de la plus grosse communauté d’expatriés kosovars après celle d’Allemagne.

La Suisse participe depuis 1999 à la mission de paix des troupes internationales de la KFOR (Kosovo Force), placées sous le commandement de l’OTAN. Environ 200 soldats suisses de la Swisscoy sont stationnés au Kosovo.

La Suisse fait partie des principaux pays donateurs au Kosovo. La Direction de la coopération et du développement (DDC) ainsi que le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) ont prévu d’injecter 13,9 millions de francs pour les projets qu’ils réaliseront au Kovoso en 2008.

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