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Les expatriés, ces visages de la mondialisation

La ministre suisse des Finances Eveline Widmer-Schlumpf s'est exprimée devant les Suisses de l'étranger réunis pour leur congrès annuel à Davos. ASO

En présence de la conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf, les participants au 91e Congrès des Suisses de l’étranger ont planché samedi sur la globalisation et ses conséquences pour la Suisse. Le rôle positif joué par les expatriés a été mis en exergue par nombre d'intervenants.

«Comment s’ouvrir au monde sans perdre ses valeurs? Comment la Suisse, petit pays sans ressources naturelles, toujours plus isolée sur la scène internationale et en voie de perdre définitivement son secret bancaire, peut-elle tirer son épingle du jeu?», a questionné Jacques-Simon Eggly, président de l’Organisation des Suisses de l’étranger (OSE) au deuxième jour du congrès annuel des représentants de la 5e Suisse.

Et quel meilleur cadre que Davos et son centre des congrès, qui accueille chaque année au mois de janvier le gratin politique et économique de la planète à l’occasion du World Economic Forum (WEF), pour aborder cette vaste thématique? «Vous êtes le WEF des Suisses de l’étranger», a déclaré la ministre des Finances Eveline Widmer-Schlumpf aux quelque 400 participants présents.

«Peu importe que l’on aime ou pas la globalisation, elle est une réalité. Elle n’est ni bonne ni mauvaise, elle implique des chances et des risques», a relevé Eveline Widmer-Schlumpf.  Et de prendre pour exemple la place financière suisse, qui représente avec 2100 milliards de dollars d’actifs sous gestion près de 30% du marché mondial.

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«C’est un pilier incontesté de l’économie suisse, qui contribue de manière importante à la prospérité de notre pays», a-t-elle relevé. Dans ce domaine, la Suisse a de nombreuses cartes à jouer: environnement juridique stable, bon niveau de formation, haute qualité des produits et des services ou encore infrastructures de pointe.

Mais attention, les concurrents de la Suisse veulent également jouer leurs atouts pour tenter de remporter la mise, a-t-elle averti. La mondialisation crée une plus grande interdépendance et une plus grande exposition aux crises, a encore expliqué la conseillère fédérale, qui a résumé en trois mots les objectifs stratégiques pour la place financière suisse: «qualité, stabilité et intégrité».

Interpellée au sujet de la révision très contestée de la convention sur les successions entre la Suisse et la France, Eveline Widmer-Schlumpf a estimé qu’il valait mieux «un mauvais accord que pas d’accord du tout».

La ministre des Finances a contesté l’accusation selon laquelle l’administration fédérale aurait sous-estimé les impacts de cette convention, notamment pour les Suisses vivant en France. «Nous avons tout fait pour en minimiser les conséquences néfastes», a-t-elle déclaré. Elle a également plaidé pour que la discussion se base davantage sur les faits que sur les émotions.

La conseillère fédérale a également dû répondre à deux questions concernant la discrimination dont sont victimes les Suisses de l’étranger dans leurs relations avec des banques suisses. «Nous discutons avec les banques, mais une solution pragmatique n’a pas encore pu être trouvée», a-t-elle indiqué, précisant que l’Etat n’avait que peu de marge de manoeuvre dans ce domaine. 

Les Suisses de l’étranger, un atout

Poursuivant sur la métaphore du «Jass», ce jeu de cartes prisé des Suisses, Eveline Widmer-Schlumpf a estimé que les Suisses de étranger, «qui sont nos meilleurs ambassadeurs», représentaient également un atout important pour la Suisse à l’heure de la globalisation.  

«Les réseaux individuels deviennent eux aussi internationaux, et contribuent ainsi au mouvement général de la globalisation», a quant à lui relevé Jacques-Simon Eggly. Fort de son réseau de 715’000 citoyens vivant à l’étranger, la Suisse possède une carte maîtresse dans ce domaine, qu’elle doit encore mieux utiliser, a estimé le président de l’OSE. «Cela passe par un acte fondateur: une loi sur les Suisses de l’étranger», a-t-il une nouvelle fois martelé.

«Nous vivons au quotidien une vie plus globalisée et vous êtes le visage de ce monde global», a pour sa part affirmé l’ancien secrétaire d’Etat Franz von Däniken. La Suisse fait partie des pays qui ont su tirer profit de la globalisation, grâce à son système éducatif, sa capacité d’innovation, une économie tournée vers le monde, un marché du travail attractif ou encore un système fiscal modéré, a relevé Franz von Däniken. «Mais ne nous leurrons pas, la concurrence mondiale est rude. Il n’y a pas de place à l’auto-complaisance pour ceux qui veulent rester dans le peloton de tête.»  

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Ouverture au monde et enracinement

Président du Conseil d’Etat (gouvernement) du canton des Grisons, Hansjörg Trachsel a pour sa part insisté sur le nécessaire équilibre entre ouverture au monde et ancrage local: «Les habitants des Grisons ont la réputation de souffrir rapidement du mal du pays quand ils sont un peu trop longtemps loin de chez eux. Notre rude climat de montagne est propice aux racines profondes. Mais nous sommes aussi un peuple ouvert, qui vit depuis des décennies de l’accueil et de l’hébergement des hôtes étrangers.»

Le conseiller aux Etats (sénateur) tessinois Filippo Lombardi a rappelé que la Suisse est née au 13e siècle de la nécessité de préserver les ressources économiques engendrées par la nouvelle voie de communication qui s’ouvrait dans les Alpes entre le Nord et le Sud de l’Europe. «La Suisse est depuis toujours ouverte, par nécessité. Les migrations de Suisses sont un élément important de cette mondialisation, puisque 30’000 à 40’000 Suisses partent et presque autant reviennent chaque année».

Pour le sénateur tessinois, le refus de l’entrée dans l’Espace économique européen (EEE) en 1992 a cependant marqué une cassure dans l’inconscient collectif helvétique: «D’un point de vue économique, la Suisse continue à s’internationaliser, alors que dans le même temps les institutions ont tendance à se replier sur elles-mêmes. Aujourd’hui, la Suisse se trouve sous pression, c’est en quelque sorte le prix à payer de cette situation».

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«Enfants de la mondialisation»

Directeur de l’OSE, Rudolf Wyder a estimé que les Suisses de l’étranger étaient le «meilleur atout que la Suisse ait à jouer» pour affronter la complexité d’un monde qui se multilatéralise. Tout en soulignant que depuis les années 1980, le nombre d’expatriés suisses dans le monde avait doublé.

Mais Rudolf Wyder a également tenu à tordre le cou à de nombreuses idées reçues concernant la diaspora suisse: les retraités ne représentent que 3% du total des migrants, et non, tous les Suisses de l’étranger ne sont pas des accordéonistes férus de folklore qui assistent les yeux embués de larmes aux discours du 1er août.

Le portrait-type des expatriés contemporains est bien différent: jeunes, très qualifiés, mobiles, hyper-connectés, «ils sont fiers des liens qui les unissent à leur patrie, mais sont très ouverts au monde. Ce sont des enfants de la mondialisation».  

Malgré la reconnaissance toujours plus grande accordée aux Suisses de l’étranger, la mobilité de nos compatriotes reste souvent négligée, a par ailleurs estimé Rudolf Wyder. «Le débat sur la libre-circulation des personnes donne l’impression que seuls les autres pays en profitent», a-t-il ainsi relevé.  

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