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Initiative populaire… contre la bureaucratie !

Le combat contre la bureaucratie est un vieux cheval de bataille de la droite. imagepoint

Le parti libéral-radical suisse va lancer une initiative populaire contre la bureaucratie. Objectif: réduire de 20% les coûts qu'engendre en Suisse la réglementation étatique et améliorer ainsi la liberté d'action des petites et moyennes entreprises (PME).

C’est samedi que le parti libéral-radical suisse (PLR) annoncera officiellement le lancement de son initiative populaire «Stop à la bureaucratie». Ce jour-là, l’Assemblée des délégués du parti, réunie à Unterägeri (canton de Zoug), adoptera la version finale de l’initiative. De même qu’un catalogue de mesures pour réduire la réglementation «en perpétuelle augmentation» qui, selon le PLR, paralyserait aujourd’hui les citoyens et l’économie suisses.

Les grandes lignes du projet sont connues et le secrétariat du PLR vient de publier le texte qui sera soumis aux délégués. Interrogé par swissinfo.ch, le député bâlois Peter Malama, un des pères de l’initiative, précise toutefois qu’il reste «quelques subtilités rhétoriques» à régler.

Droits fondamentaux

En gros, l’initiative demande que le catalogue des «droits fondamentaux» inscrits dans la Constitution fédérale (égalité devant la loi, droit à la vie, liberté d’expression, etc.) soit complété par une espèce de droit à être traité par l’Etat de manière non-bureaucratique.

Concrètement, on instituerait un droit «à des lois compréhensibles». Un droit à une application «simple, non-bureaucratique et efficace» des lois en vigueur. Et un droit à obtenir des tribunaux et des administrations que sa cause soit traitée «rapidement» et «simplement».

Comme tous les droits constitutionnels, ces nouveaux droits pourraient être invoqués devant un tribunal. Ils figureraient juste après l’article 9 de la Constitution qui stipule que «toute personne a le droit d’être traitée par les organes de l’Etat sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi».

L’initiative prévoirait en outre que l’Etat prenne des mesures pour «limiter au maximum le poids de la réglementation et la charge administrative des entreprises» en tenant compte spécialement des intérêts «des micro-entreprises et des petites et moyennes entreprises».

Critiques virulentes

Avant même d’être lancée, l’initiative a déjà été âprement critiquée par une éminente personnalité du PLR, l’ancien sénateur René Rhinow, professeur émérite de droit constitutionnel à l’Université de Bâle.

Dans un courriel adressé à plusieurs collègues de parti, le professeur Rhinow exprime notamment l’avis que la future initiative est «inapplicable». Et que l’idée de faire du droit à des lois compréhensibles un droit constitutionnel reflète un mépris de ce que sont vraiment l’essence et la portée des droits de l’Homme.

Comme ce courriel a été publié dans la presse suite à une indiscrétion, le professeur Rhinow n’a pas voulu en dire davantage lorsque swissinfo.ch l’a interrogé. Mais il ne dément pas ses critiques.

Au régime!

Selon le PLR, la future initiative serait en tout cas indispensable. Le poids des règlementations étatiques aurait «beaucoup augmenté ces dernières années». La liberté d’action des citoyens et la productivité de l’économie en seraient massivement restreintes. Et les PME «lourdement» frappées.

Comme le PLR l’explique dans un document de travail, il serait donc urgent de favoriser l’avènement d’un «Etat svelte et proche des citoyens», de mettre fin à la «bureaucratisation galopante» dont le pays serait victime et d’astreindre les autorités à moins de «perfectionnisme».

Parmi les exemples de prescriptions inutiles, le PLR cite notamment les impôts cantonaux sur les chiens, les taxes sur les divertissements et des émoluments prélevés à Zurich pour la suspension d’un drapeau. Mais il critique aussi, de manière plus générale, de nombreuses réglementations qu’il juge excessives dans les domaines de la construction, de la protection de l’environnement, des heures d’ouverture des magasins, des données statistiques réclamées aux entreprises et du marché du travail.

50 milliards par an

Le PLR fait état à cet égard d’une récente étude de l’Union suisse des arts et métiers (USAM) qui estime à 50 milliards de francs par an les coûts liés en Suisse à la réglementation étatique. Le PLR exige une diminution massive de ce chiffre et fixe comme objectif, dans le cadre de son initiative, une réduction de coûts de 20%.

Il propose aussi, entre autres mesures, la création, sur le plan fédéral et dans les cantons, de «one stop shops», c’est-à-dire de «guichets uniques» où un administré ou une entreprise peuvent régler en même temps plusieurs affaires administratives. Il souhaite par ailleurs une «remise en question fondamentale» du système de prélèvement de la TVA, jugé lui aussi beaucoup trop compliqué.

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Initiative populaire

Ce contenu a été publié sur L’initiative populaire permet à des citoyens de proposer une modification de la Constitution. Pour être valable, elle doit être signée par 100’000 citoyens dans un délai de 18 mois. Le Parlement peut directement accepter l’initiative. Il peut aussi la refuser ou lui opposer un contre-projet. Dans tous les cas, un vote populaire a lieu. L’adoption…

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Ce n’est pas la première fois que le parti radical-démocratique (aujourd’hui PLR) ou des membres de ce parti lancent une initiative populaire pour réduire en Suisse la part ou l’influence de l’Etat, pour donner les coudées plus franches à l’économie ou pour concrétiser d’une autre manière le slogan du parti des années 1980 «Moins d’Etat, plus de liberté».

En 1995, par exemple, plusieurs parlementaires ou anciens parlementaires fédéraux radicaux, de l’UDC (droite conservatrice), du PDC et de l’ex petit Parti libéral, lancent une initiative spectaculaire intitulée «Déréglementation: plus de liberté – moins de lois».
Pour le moins radicale, l’initiative exige carrément l’abrogation automatique de toutes les lois fédérales et de tous les arrêtés fédéraux importants qui n’auront pas été revotés par le Parlement dans les cinq ans. Quelque 1200 lois auraient ainsi dû être revotées selon une estimation faite à l’époque par la Chancellerie fédérale.

On n’en arrivera pas là car le Comité d’initiative ne parviendra jamais à récolter le nombre de signatures nécessaire. Quant à l’initiative exigeant la suppression pure et simple de l’impôt fédéral direct, lancée en 1992 par des milieux de la droite radicale et libérale et par l’UDC, elle aboutit mais sera retirée en 1996.

«Un meilleur environnement réglementaire pour les entreprises, un environnement simple, compréhensible, efficace et applicable», c’est aussi ce que la Commission européenne s’efforce de développer avec son programme «Mieux légiférer».

Objectifs
– Mettre en œuvre une stratégie de simplification de la législation actuelle par le biais de quelque 185 initiatives dans tous les domaines de la politique communautaire.
– Réduire les charges administratives de 25% à l’horizon 2012.
– Mettre davantage l’accent sur le recours aux analyses d’impact et aux consultations publiques lors de l’élaboration de nouvelles règles et réglementations.

Pour tout le monde. La Commission travaille en étroite collaboration avec les États membres pour faire en sorte que la culture du «mieux légiférer» s’applique dans l’ensemble de l’Union et de ses États membres.

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