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La concurrence fiscale devrait être repensée

Remplir la déclaration, c'est souvent la corvée. Et quand arrive le bordereau d'impôts, c'est souvent la grogne. Ex-press

Sur les 21'000 personnes interrogées en ligne dans le cadre du sondage Perspective Suisse 2008, 75% pensent que la concurrence fiscale telle qu'elle existe aujourd'hui ne leur profite pas. Deux tiers réclame par ailleurs plus de sévérité en matière de criminalité des jeunes.

La concurrence fiscale ne profite qu’aux plus riches. C’est l’impression de 77% de la population helvétique, selon le sondage annuel Perspective suisse. A l’inverse, seuls 13% des sondés pensent qu’elle est bénéfique à l’ensemble de la société.

Effectué en ligne, ce sondage a de ce fait une représentativité limitée. Seules les personnes désirant y répondre et ayant une connexion internet ont en effet pu s’exprimer. D’où des écarts par rapport aux valeurs réelles environ 2 à 4 fois plus importants que lors des sondages classiques.

Reste que les indications ainsi obtenues sont jugées intéressantes par les politiciens. En témoigne la présence des présidents ou vice-présidents des cinq partis gouvernementaux lors de la présentation des résultats lundi à Berne.

Un certain ras-le-bol

«Un sondage est une réponse très vite donnée à un problème qui est généralement plus difficile qu’on croit», a souligné à ce propos Fulvio Pelli, président du parti radical (PRD / droite). Cas typique selon lui, l’imposition fiscale – qui est l’un des cinq thèmes retenus cette année pour Perspective suisse.

A ses yeux, le fait que 60% des sondés soutiennent l’abolition de la concurrence fiscale à l’échelle du pays pour les revenus supérieurs à 300’000 francs n’est pas surprenant. Mais, tient-il à rappeler, la complexité du problème ne doit pas être sous-estimée, sous peine de voir les hauts revenus s’envoler et la charge fiscale reportée sur les autres citoyens.

Président du parti démocrate-chrétien (PDC / centre droit), Christophe Darbellay en a profité pour réclamer un effort de communication de la part des cantons afin d’améliorer la réputation de la concurrence fiscale.

Quant à Jacqueline Fehr, vice-présidente du parti socialiste, elle a lu ce résultat positivement. «C’est un premier signe que les gens en ont marre des privilèges fiscaux des super riches.»

Interprétées différemment au gré du positionnement sur l’échiquier politique, les données recueillies montrent également un certain ras-le-bol eu égard au système fiscal helvétique.

55% des répondants pensent ainsi qu’ils payent trop d’impôts par rapport aux autres contribuables et 46% d’entre eux sont d’avis qu’ils paient trop par rapport aux prestations étatiques qui leur sont fournies.

Un signal fort est par ailleurs donné par rapport à l’imposition des couples, puisque 92% des internautes estiment urgent de la réformer, que ce soit par le biais d’une imposition individuelle (50%) ou d’une déclaration commune (42%).

Comment aider les familles ?

Autre domaine où l’insatisfaction est de mise en Suisse selon ce sondage en ligne, celle de la politique familiale. Plus de la moitié des personnes qui se sont exprimées (53%) estiment que l’Etat devrait s’engager plus qu’aujourd’hui afin de permettre une meilleure compatibilité entre vie professionnelle et familiale.

L’idée d’une assurance parentale est soutenue par 49% des répondants, alors que 55% d’entre eux souhaiteraient que soit mis sur pied un programme facultatif durant toute la journée des enfants, au moins au niveau primaire. Mais là également, les difficultés ne se résolvent pas en un clic.

«Les Suisses veulent des places d’accueil, des places de crèche, des horaires continus, mais ils refusent de suivre les modèles socialistes qui nécessitent plus d’engagement de l’Etat. Il faut aussi relever que les cantons romands, où les offres en matière de politique familiale sont les plus généreuses, par exemple à Genève, sont ceux où les sondés sont les plus mécontents», relativise Christophe Darbellay.

Comment économiser l’énergie ?

En phase avec l’actualité politique, Perspective suisse a également pris la température en matière d’agriculture, de criminalité des jeunes et d’approvisionnement en électricité.

Concernant ces deux dernières problématiques les Suisses seraient prêts à aller assez loin. Face aux jeunes criminels, 71% d’entre eux estiment par exemple que c’est le Code pénal pour majeurs qui devrait s’appliquer lors de délits graves. Concernant les mineurs récidivistes et étrangers, 64% des répondants sont favorables à une expulsion du pays, accompagnés de leur famille.

Une idée formulée par l’Union démocratique du centre (UDC, droite nationaliste) dans une initiative parlementaire refusée par le Parlement en juin 2008. «Dans ce domaine, nous continuerons à exiger des limites et à réclamer des lois plus sévères, a néanmoins indiqué Adrian Amstutz, vice-président de l’UDC, tout en misant aussi sur la prévention.»

Sur la question de l’approvisionnement en électricité, le sondage évoque une éventuelle pénurie à l’horizon 2013. Un scénario qui fait apparaître une nette division entre les personnes qui optent pour une réduction de leur consommation (46%) et celles qui privilégient une augmentation de la production indigène (44%).

Aux politiciens de trouver la bonne solution en matière d’économie d’énergie. Avec cette seule certitude: au niveau des mesures concrètes, la proposition d’une taxe de 20% sur l’électricité est rejetée par 73% des internautes ayant répondu au sondage.

swissinfo, Carole Wälti

Perspective suisse est un sondage réalisé en ligne pour la 4ème année consécutive.

Cette année, 20’903 internautes de tout le pays ont rempli un questionnaire au cours des 9 semaines que dure le sondage.

C’est l’association Vernunft Schweiz qui en est à l’origine. Celle-ci regroupe des étudiants de divers horizons académiques, la plupart issus de l’Université de St-Gall.

Vernunft Schweiz exploite une plate-forme internet qui a pour but de fournir une information neutre, indépendante et actuelle sur la politique suisse.

Le sondage Perspective suisse est quant à lui placé sous le patronat des présidents des cinq plus importants partis du pays: Union démocratique du centre (UDC, droite nationaliste), parti libéral-radical (PLR, droite), parti démocrate chrétien (PDC, centre droit), parti socialiste (PS), Verts.

L’objectif est de permettre à la population de s’exprimer sur les différentes idées de réformes politiques à mener en Suisse.

Imposition
75% des internautes ayant répondu au sondage sont d’avis qu’ils ne profitent pas de la concurrence fiscale.
60% souhaitent que celle-ci soit abolie pour les revenus dépassant 300’000 francs par an.

Criminalité des jeunes
71% pensent que les jeunes coupables de délits graves doivent être jugés selon le Code pénal pour majeurs.
68% sont favorables à des camps intensifs d’éducation comme alternative à la prison.
57% veulent une augmentation de la présence policière dans les écoles à fort taux de criminalité.

Economies d’énergie
46% se disent prête à réduire leur consommation, 44% préconisent une augmentation de la production.
26% voient positivement la construction de nouvelles centrales nucléaires pour remplacer les anciennes.

Politique familiale
53% souhaitent un plus fort engagement de l’Etat.
36% espèrent l’introduction d’un congé paternité de 4 semaines.

Agriculture
40% préconisent encore plus de libéralisme dans ce secteur.
44% veulent que la Confédération maintienne son soutien au niveau actuel.

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