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Le fédéralisme, plus performant que jamais

Après Fribourg (Suisse romande) et Baden (Suisse alémanique), c’est tout naturellement que la troisième conférence sur le fédéralisme se tenait en Suisse italienne. Keystone

Le fédéralisme suisse se porte bien. Tel est le bilan principal de la troisième conférence nationale sur le fédéralisme, qui s’est déroulée à Mendrisio, au Tessin. Perfectible, le système helvétique peut néanmoins servir de modèle hors des frontières du pays.

Les institutions politiques et la clé de répartition des compétences, entre communes, cantons et Confédération, forment un système profondément ancré dans l’identité des Suissesses et des Suisses. A tel point que, malgré la progression de la globalisation, ce mécanisme à trois niveaux, qui fait ses preuves depuis 1848, prend même une importance grandissante.

Tel est, dans les grandes lignes, le bilan qui a pu être tiré au terme de la troisième édition des assises sur le fédéralisme, qui se sont terminées hier (vendredi) à Mendrisio, au sud du Tessin. Les deux jours de conférence ont

réuni près de 350 politiciens, représentants de l’économie, fonctionnaires, spécialistes et observateurs de divers secteurs et horizons.   

Enjeux multiples

Ces participants ont eu l’occasion d’assister et pour certains, de prendre une part active dans une série de tables rondes et ateliers, destinés à approfondir la réflexion autour de thèmes qui touchent plus ou moins directement le fédéralisme.

Parmi les sujet abordés, figuraient notamment, la politique urbaine de la Suisse, les enjeux transfrontaliers des régions, une réflexion sur les fusions de communes, les relations que la Confédération entretien avec l’Union européenne, les collaborations intercantonales, la concurrence fiscale et les réformes institutionnelles dans les cantons.

Autant de thématiques pointues, et pourtant, débattues simultanément en trois langues, sans que cela ne pose de problème. «Une véritable prouesse typiquement helvétique», a fait remarquer, un invité venu d’Italie voisine, visiblement impressionné par le ton et le contenu des débats.

Résistant aux crises

Le fédéralisme est un système solide, performant, qui résiste mieux que d’autres aux aléas économiques internationaux, a déclaré le président d’economiesuisse, Gerold Bührer.

Ainsi, les Etats qui fonctionnent selon ce système se sont mieux sortis de l’ornière de la crise que d’autres pays, dont le pouvoir est plus centralisé. «Les atouts du fédéralisme sont avant tout, la stabilité politique et sociale, un système proche à la fois du citoyen et de l’économie et, une discipline financière de même qu’un terreau propice aux innovations», a-t-il ajouté. Et de l’avis de nombreux participants, la santé économique éclatante de la Suisse n’est pas étrangère à la bonne marche du fédéralisme.

Un modèle à suivre aussi pour la ministre de Justice et Police, Simonetta Sommaruga, qui a tenu à inviter ses concitoyennes et concitoyens à réfléchir au fédéralisme à travers des problématiques concrètes qui s’imposent à la Suisse.

«La migration touche à la fois la Confédération, les cantons et les communes», mais ces thématiques qui doivent aussi être vues dans un contexte qui dépasse les simples frontières de la Suisse, et partant, doivent  inviter à réfléchir à un fédéralisme capable de dialoguer avec l’Union européenne», a souligné la ministre, qui a rappelé que «le fédéralisme suisse intéresse les institutions européennes», auxquelles il peut servir de modèle. 

Pas de copié-collé

Et malgré tout, «ce modèle performant, n’est pas aussi facilement exportable qu’il y parait», a pour sa part expliqué Bernardino Regazzoni, ambassadeur de Suisse à Rome, citant l’ancien premier ministre italien, Romano Prodi, qui avait lui-même affirmé que le système helvétique n’était pas adaptable à l’Italie, et que ce mécanisme fonctionnait «uniquement parce qu’il commençait par le bas».

En plein chantier du fédéralisme, la Péninsule se heurte à la barrière de la centralisation du pouvoir à Rome. «L’Italie étudie aussi des modèles en vigueur notamment en Belgique, en Grande-Bretagne et en Allemagne», a dit le diplomate, regrettant cependant une certaine méconnaissance du système helvétique, à l’exception de la Lombardie voisine et d’autres régions limitrophes.

Méconnaissance et peut-être désintérêt aussi. Le président de la Région Lombardie, Roberto Formigoni, qui était invité à Mendrisio, et qui devait tenir un discours d’ouverture à la conférence, a finalement préféré s’adresser aux participants dans un message vidéo. Et ce, malgré les quelques dizaines de kilomètres seulement, qui séparent Mendrisio du chef-lieu lombard.

Bilan sans fausse-note

Le fédéralisme doit-il subir des changements ? Non, pas vraiment, ont répondu en substance les invités à la dernières table ronde sur les défis qui attendent le fédéralisme au 21e siècle, animée par le directeur de la SSR Roger de Weck. «Le fédéralisme est vivant, et il a plutôt tendance à se renforcer qu’à s’affaiblir», a indiqué pour sa part Christophe Darbellay, président du parti démocrate chrétien.

Un renforcement qui n’est pas du goût de l’UDC. Le député du parti conservateur Hans Fehr, a invité les «décideurs à se méfier du fédéralisme coopératif, qui tend à s’immiscer à tous les niveaux et à se muer en une entité lourde et incontrôlable. Il faut revenir au sens du fédéralisme tel que voulu par la Constitution fédérale, sans quoi, ce principe risque de perdre de sa substance», a insisté l’édile.

Le président du parti socialiste suisse, Christian Levrat a admis que «la Suisse fonctionne correctement» mais, le Fribourgeois s’est inquiété du peu de poids qui est accordé aux villes dans le contexte actuel et notamment au sein du Conseil des Etats (Chambre haute du parlement fédéral), qualifiant «la sous-représentation des villes» de «problématique». Un aspect qui aura peut-être interpellé et inspiré les organisateurs de la 4e Conférence nationale sur le fédéralisme.

Les conférences sur le fédéralisme sont nées dans la foulée de la conférence internationale sur le fédéralisme, qui avait eu lieu à Saint-Gall en août 2002.

Plus de 500 personnalités des milieux politiques et de l’économie s’étaient penchées sur le thème «Le fédéralisme suisse sous pression à l’efficience: quelles sont les perspectives ?»

Au terme de la rencontre, les membres de la conférence des gouvernements cantonaux (CdC) avaient décidé d’instaurer un dialogue sur les thématiques centrales du fédéralisme, sous forme de conférence nationale.

C’est ainsi que les 15 et 16 septembre 2005, la première conférence nationale sur le fédéralisme avait été inaugurée à Fribourg, et qui avait pour thème: «Le fédéralisme coopératif face à de nouveaux défis».

Les 27 et 28 mars 2008, à Baden dans le canton d’Argovie, a eu lieu la seconde conférence, «Fédéralisme et changement – apprendre les uns des autres par le dialogue».

avec Gerhard Lob

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