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PS-UDC (3): le fossé

Katya Babey Falce (à gauche) et Maria Angela Guyot (à droite). swissinfo.ch

Suite et fin de notre entretien avec Katya Babey Falce et Maria Angela Guyot, deux jeunes femmes que tout rapproche, et que tout sépare.

Toutes deux sont candidates à un siège au Parlement fédéral. La première pour le PS, la seconde pour l’UDC.

Nos deux interlocutrices sont donc candidates au Conseil National. Dans un souci prioritaire de soutien à Valérie Garbani pour la socialiste Katya Babey Falce. En tant que vraie candidate en ce qui concerne l’UDC Maria Angela Guyot.

L’une comme l’autre envisage une hypothétique élection comme un bouleversement personnel. Séisme dans leur agenda, révolution dans leur organisation familiale.

A propos, si elles sont élues, quelle serait LA problématique nationale sur laquelle elles seraient particulièrement pressées de s’atteler?

Expo.02 ou l’assurance maternité?

«L’assurance invalidité et l’assurance chômage», répond la candidate UDC, choquée par le projet de retraite à 67 ans et le long vide qui peut survenir entre un licenciement et le moment de la retraite.

Une préoccupation sociale, donc, au moment-même où l’UDC lance un référendum contre le projet d’assurance maternité déposé par le législatif… «Actuellement, il n’y a pas d’argent pour financer une telle assurance» assène Maria Angela Guyot.

Et la candidate UDC d’expliquer que le parlement suisse n’est plus capable de mettre sur pied un projet à long-terme du type AVS (un projet socialiste à l’origine, NDLR), et que le fait d’avoir récemment accordé 1,6 milliards de francs à Expo.02 excluait de soutenir un projet de type assurance maternité…

Quel lien entre les deux choses? «Quand vous avez 50 francs en poche pour faire vos commissions, vous ne pouvez pas penser que le commerçant va vous laisser sortir du magasin avec des marchandises pour 100 francs», répond-elle.

Le soucis des finances, la peur de la dette parcourt d’ailleurs tous les propos de Maria-Angela Guyot, qu’il s’agisse de la Confédération, de la commune de Neuchâtel ou de la cellule familiale.

Un système familial indigne

Katya Babey Falce, elle, a envie de se battre pour ce qui touche aux droits de la famille. Car «au niveau familial, nous avons un système qui n’est pas digne d’un pays démocratique et ouvert comme la Suisse», dit-elle.

«Dans ce pays, on a des assurances pour tout, sauf pour la maternité. Quand Pascal Couchepin dit qu’il faut élever l’âge de la retraite parce qu’on n’aura plus assez de forces de travail dans 15 ou 20 ans, il faudrait déjà que les forces de travail qui sont là, les femmes, puissent travailler: par le biais d’une assurance maternité, par le biais d’accueil de la petite enfance», explique-t-elle.

«La moindre des choses est qu’on utilise cette force de travail qui, souvent, doit réduire son temps de travail parce que c’est impossible de concilier des enfants et un 100%. Vous arrivez à 200% et cela ne va plus!»

Dialogue possible?

Katya Babey Falce et Maria Angela Guyot… deux jeunes femmes, issues de la même région au sens large, mères de famille, toutes deux juristes. Pensent-elles que, malgré leurs engagements politiques, elles peuvent avoir des goûts communs, des approches communes? Ou le fossé est-il nécessairement total?

«Je ne peux pas m’exprimer par rapport au cas précis de Madame Babey Falce», répond Maria Angela Guyot . «Mais j’ai des amis qui, sans être militants actifs, partagent plutôt des points de vue socialistes ou radicaux».

A condition d’éviter les sujets qui fâchent? «En tant qu’adulte on arrive quand même à faire la différence entre une amitié de longue date et des thèmes politiques qui peuvent évoluer en quelques mois, parce que la donne sera changée», répond la jeune femme.

Oui. Mais des thèmes politiques, même changeants, recouvrent parfois des approches morales, voire philosophiques foncièrement opposées. C’est ce que semble dire Katya Babey Falce.

«Je pense qu’elle change les couches-culottes comme moi, qu’elle chante peut-être la même berceuse à ses enfants. Mais au-delà de ça… Je connais beaucoup de radicaux et de libéraux, et tant qu’on n’aborde pas la politique pointue, on arrive à s’entendre sur de nombreux sujets. Je ne crois pas que ce soit possible avec quelqu’un de l’UDC.»

«Parce qu’il y a chez eux quelque chose qui me choque profondément: leur xénophobie latente. Avec les radicaux ou les libéraux, on a un socle de valeurs communes. Avec l’UDC, j’ai l’impression que celui-ci est vraiment très très ténu».

Voilà. Fin de cette double rencontre. Les propos de Maria Angela Guyot et de Katya Babey Falce vous ont-ils permis de dessiner leurs portraits, et à partir de là, d’esquisser un profil de leurs aspirations. Nous le souhaitons. Mais attention: dans un texte, il y a les lignes. Et c’est parfois entre les lignes que se joue l’essentiel.

swissinfo, Bernard Léchot

– Précisions utiles:

– Les élections fédérales suisses (élections parlementaires) auront lieu le 19 octobre.

– Après une décennie de régression, le Parti socialiste suisse (PSS) redevient en 1995 le plus fort parti national, mais il doit disputer cette position à l’UDC depuis les élections de 1999.

– Actuellement, le PS est représenté par 2 conseillers fédéraux, 51 conseillers nationaux et 6 conseillers aux Etats.

– L’Union démocratique du centre (UDC) est longtemps resté à la traîne des partis gouvernementaux.

– Cette situation change avec les années 90: s’appuyant sur un discours nettement plus marqué à droite, le parti enregistre des progressions record à chaque échéance électorale.

– Avec 22.5% des suffrages aux élections de 1999, l’UDC devient le premier parti gouvernemental.

– Actuellement, l’UDC compte un conseiller fédéral, 45 conseillers nationaux et 7 conseillers aux Etats.

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