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Schengen: les cantons mettent un frein à l’enthousiasme de la Confédération

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Alors que le Conseil fédéral a répété mercredi sa volonté d'adhérer aux traités européens de Schengen et de Dublin, les cantons, eux, semblent vouloir freiner cette ardeur. Du coup, le clan des sceptiques paraît toujours plus important. Y compris au sein du Département fédéral des finances.

Les cantons se demandent s’il est vraiment urgent d’engager de nouvelles négociations bilatérales avec l’Union européenne. C’est ce qui ressort de l’assemblée plénière extraordinaire de la Conférence des gouvernements cantonaux (CDC), réunie mercredi.

Dans un communiqué publié jeudi, la CDC souligne qu’il serait plus judicieux d’expérimenter les accords bilatéraux avant d’entamer de nouvelles discussions. Or, ces accords ne sont même pas encore entrés en vigueur.

En revanche, les cantons ne s’opposent pas à la poursuite d’entretiens exploratoires sur les accords de Schengen et de Dublin. Mais, ils estiment que les documents actuellement disponibles ne permettent pas d’évaluer les avantages et les inconvénients de cette collaboration. Ils réclament plus de temps pour prendre position.

Les cantons ajoutent que leurs compétences de base (justice, police, imposition…) sont au cœur de ces nouvelles négociations. Et jugent préférable de coordonner, dans un premier temps, leurs efforts en matière de sécurité intérieure.

«Les cantons ont peur de perdre certaines de leurs compétences, analyse René Schwok, professeur à l’Institut européen. Ils cherchent visiblement à trouver des mesures dilatoires pour ne pas avancer dans la direction de l’ouverture des négociations.»

Du côté de la Confédération, Monique Jametti-Greiner, sous-directrice à l’Office fédéral de la justice, souligne que le débat s’est développé rapidement. Ce qui a pu surprendre les cantons.

«Ils demandent plus de temps, poursuit Monique Jametti-Greiner. Je comprends leur réaction: les accords de Schengen et de Dublin couvrent un vaste domaine, et il est difficile d’en mesurer toutes les conséquences.»

Reste que la Confédération semble toujours plus seule pour défendre ces accords. Qui lui donneraient l’accès aux précieuses banques de données du Système d’information de Schengen (SIS).

L’opposition de l’Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN) est connue. Mais, d’autres sceptiques pourraient encore sortir du bois.

Les milieux bancaires, tout d’abord, qui ne voudraient pas négocier avec l’Union européenne par crainte de pressions sur le secret bancaire. Certains militants de gauche pourraient également s’opposer aux aspects répressifs de Schengen. Les europhiles, quant à eux, pourraient contester la politique des petits pas choisie par la Suisse.

Le pessimisme aurait même déjà atteint le Département fédéral des finances (DFF). Dont certains collaborateurs craindraient que le caractère évolutif du traité de Schengen entraîne finalement la Suisse dans la question fiscale. Le service de presse du DFF n’a pas voulu faire de commentaire à ce sujet.

Du coup, René Schwok estime que la prise de position des cantons est un «sérieux avertissement» pour la Confédération. Et le professeur de conclure: «j’ai de la peine à imaginer comment le Conseil fédéral pourra aller de l’avant sans leur soutien.»

Caroline Zuercher avec les agences

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