La voix de la Suisse dans le monde depuis 1935

De la peau de foetus pour soigner les brûlés

Un espoir pour les grands brûlés. Keystone

A Lausanne, huit enfants gravement brûlés ont été guéris grâce à des morceaux de peau cultivés à partir d'un échantillon prélevé sur un fœtus mort-né.

Mis au point par une équipe du Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV), ce procédé ouvre d’intéressantes perspectives comme alternative à l’auto-greffe pour les grands brûlés.

Annoncée dans la dernière édition de la revue médicale britannique The Lancet, la réussite de l’équipe du professeur Patrick Hohlfeld constitue un espoir pour la guérison rapide des brûlures. Elle devrait en outre permettre de résoudre les problèmes d’approvisionnement en peau nécessaire aux greffes.

Actuellement, pour soigner les lésions cutanées ou les brûlures du second ou troisième degré, la technique standard est de prélever des petits morceaux de peau saine sur le corps du patient pour les greffer sur les lésions.

Comme alternative, l’équipe lausannoise propose l’utilisation de peau provenant d’un foetus. L’expérience a été faite à partir d’un bébé mort-né à 14 semaines, donné expressément par la mère dans ce but. Comme il est de règle, ces travaux ont reçu l’approbation préalable d’un comité d’éthique.

Le contraire d’une peau de chagrin


A partir d’un échantillon de 4 cm2 de peau prélevé sur le foetus, Patrick Hohlfeld et ses collègues ont développé une culture. «On laisse simplement les cellules se reproduire dans un milieu nutritif. Et elles le font très facilement et très rapidement», explique à swissinfo le professeur lausannois.

Ce cette manière, on peut théoriquement produire plusieurs millions de morceaux de peau de 9 cm sur 12 cm à partir d’un seul échantillon.

Les médecins du CHUV ont ensuite placé ces petits morceaux de peau sur les lésions de huit enfants, atteints de brûlures de second degré profond ou de troisième degré. En changeant les pansements tous les trois jours, les blessures se sont refermées en à peine plus de deux semaines.

«Normalement, ces enfants auraient tous eu besoin de greffes, commente Patrick Hohlfeld. Mais grâce au milieu très favorable créé par le contact de la peau fœtale, leur propre peau s’est régénérée rapidement d’elle-même».

Une expérience à vérifier


Démonstration qui ne convainc pas totalement le docteur Nicholas Parkhouse, membre de l’Association britannique des chirurgiens plastiques.

Sur le site internet de la BBC, la radio-télévision publique britannique, ce praticien juge le concept «intéressant», mais estime que l’étude lausannoise, basée sur huit cas seulement, ne prouve encore rien. «Les brûlures du second degré guérissent souvent d’elles-mêmes et rien ne prouve que la peau fœtale y soit pour quelque chose», juge le médecin anglais.

Des critiques que Patrick Hohlfeld ne rejette pas. «Il est clair que l’expérience devra être reconduite. Ce n’est pour l’heure qu’une expérience-pilote», admet le professeur.

En outre, si les praticiens lausannois ont mené ce test sur des enfants, c’est simplement parce que le CHUV a un centre de brûlés pédiatriques. Et il est clair que des essais devront aussi être menés sur des adultes, dont les facultés de régénération des tissus sont certainement moins bonnes.

En attendant, Patrick Hohlfeld et sa collègue Lee Ann Applegate ont déjà déposé une demande de brevet et créé, avec le soutien du CHUV, la société Neocutis, dédiée à la commercialisation de leurs techniques.

swissinfo et les agences

– A partir d’un échantillon de 4 cm2 de peau prélevé sur un foetus mort-né à 14 semaines, il est théoriquement possible de cultiver des millions de morceaux de peau de 9 cm sur 12, en laissant les cellules se multiplier dans un milieu nutritif.

– A l’Hôpital universitaire de Lausanne, huit enfants victimes de graves brûlures ont été guéris en un peu plus de deux semaines grâce à l’application sur leurs plaies de ces morceaux de peau.

– Si cette technique (qui fait l’objet d’une demande de brevet) parvient à prouver son efficacité, elle permettrait de résoudre le délicat problème du manque de tissus cutanés à disposition pour les greffes.

Les plus appréciés

Les plus discutés

En conformité avec les normes du JTI

Plus: SWI swissinfo.ch certifiée par la Journalism Trust Initiative

Vous pouvez trouver un aperçu des conversations en cours avec nos journalistes ici. Rejoignez-nous !

Si vous souhaitez entamer une conversation sur un sujet abordé dans cet article ou si vous voulez signaler des erreurs factuelles, envoyez-nous un courriel à french@swissinfo.ch.

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision

SWI swissinfo.ch - succursale de la Société suisse de radiodiffusion et télévision