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L’ozone de tous les dangers

Le fort rayonnement et la chaleur mêlée à la pollution atmosphérique produisent de l'ozone. swissinfo.ch

En Suisse, la canicule fait exploser les taux d’ozone(O3) dans l’air. Au point que les valeurs minimales autorisées sont largement dépassées.

Malgré une récente campagne d’information, la pollution s’installe sans trop inquiéter. Pourtant, elle est dangereuse.

En lançant, en juin, sa campagne nationale d’information «ozone ok», l’Office fédéral de l’environnement n’avait pas prévu la canicule qui s’est installée sur toute l’Europe.

Une vague de chaleur inhabituelle pour la saison qui fait exploser les valeurs limites fixées en Suisse à 120 microgrammes (µg/m³) pour l’ozone.

Des dépassements qui ont été mesurés en début de semaine, jusqu’à 203 µg/m³, à Lugano, la plus forte concentration d’ozone recensée en Suisse par le Réseau national d’observation des polluants atmosphériques (NABEL).

Mais il n’est pas rare d’observer, ces jours entre Bâle et Zurich, des valeurs approchant les 190-200 µg/m³.

Variété allotropique (existence d’un même corps sous plusieurs formes physiques) de l’oxygène (O2), l’ozone (O3) est un gaz à double effet..

Présent dans la stratosphère (haute couche de l’atmosphère), ce gaz est nécessaire à la survie de l’humanité. En effet, sans le filtre de l’ozone, les rayons ultraviolets tueraient toute forme de vie sur terre.

En revanche, lorsqu’elle est respirée en trop grande quantité, l’ozone de la troposphère (couche atmosphérique près du sol) s’avère dangereuse.

L’ozone est un gaz oxydant plus violent que le chlore – il est d’ailleurs souvent utilisé dans le traitement des eaux. C’est un véritable acide capable d’attaquer du béton ou du fer.

Un cercle infernal

Les principaux responsables de la production d’ozone, ce sont bien sûr le trafic automobile et la pollution industrielle.

«Ce sont essentiellement les produits de combustion de la famille des oxydes d’azote (Nox) et aussi les composés organiques volatiles (COV) qui sont responsables de la fabrication de l’ozone», explique Ursula Ackermann de la Commission fédérale de l’hygiène de l’air.

«En fait, poursuit ce médecin à l’Institut de médecine sociale et préventive de Bâle, ce sont ce que l’on nomme les précurseurs de l’ozone.»

Et c’est là que le soleil entre dans le jeu. «Le rayonnement du soleil brise les molécules de ces polluants précurseurs et il libère un atome d’oxygène (O), explique Christophe Salamin.

Et le spécialiste de MeteoSuisse d’ajouter: «C’est cet atome qui va se lier à l’oxygène de l’air (O2) pour produire de l’ozone (O3)».

Le dioxyde d’azote (NO2) va se transformer en monoxyde d’azote (NO) plus un atome d’oxygène (O) qui va s’additionner à l’oxygène (O2) pour faire de l’ozone (O3).

Avec la canicule, le rayonnement solaire augmente, produisant encore plus d’ozone. Pire, l’ozone qui s’atténue généralement la nuit avec le froid, ne se résorbe pas par ces temps quasi tropicaux.

C’est donc bien pour cela que la valeur limite de 120 microgrammes (µg) par m3 autorisée en Suisse (160 dans l’Union européenne) est très largement dépassée. Et sur l’ensemble du territoire helvétique.

Des mesures drastiques

Cette pollution est prise au sérieux par les autorités depuis le début des années 80. Mais elle est très difficile à combattre.

«Les mesures prises en 1985 contre les émissions polluantes liées au trafic, ont fait reculer la production d’ozone de plus de 40 à 50%, affirme Ursula Ackermann. Mais l’augmentation du parc d’automobiles et de camions a fait regrimper les valeurs au même niveau.»

Dans ces conditions, il faut remettre l’ouvrage sur le métier. Et la course d’obstacle risque d’être ardue.

«C’est pour cette raison que nous interpellons vivement les autorités dans notre rapport ‘ozone en Suisse 2003’, poursuit Ursula Ackermann. Il faut qu’elles soient nettement plus strictes sur la limitation des émissions polluantes.»

Et, pour ce médecin, la seule façon de faire pression serait un renforcement du bon vieux principe du pollueur-payeur.

Parallèlement, la population pourrait, elle aussi, apporter sa contribution à cet effort indispensable. Notamment, en utilisant davantage les transports en commun, en économisant l’énergie

«En revanche, nuance Ursula Ackermann, je ne crois pas à l’efficacité d’une interdiction de rouler durant la canicule. A mon avis, ce genre de mesure ponctuelle n’est pas efficace.»

L’ozone peut tuer

Phénomène étrange, cette pollution à l’ozone ne semble pas inquiéter outre mesure la population.

«Dans l’ensemble, confirme Ursula Ackermann, la population n’a peur que du cancer. Elle occulte les autres dangers pour sa santé».

Certes, admet ce médecin, les études (SAPALDIA ou SCARPOL) menées ces dernières années en Suisse ne se prononcent pas sur les effets à long terme de l’ozone.

Mais, insiste Ursula Ackermann, cela ne veut pas dire que l’on ne meurt pas à cause de l’ozone.

«D’ailleurs, poursuit-elle, l’ozone peut tuer. Et de nombreuses études américaines l’ont prouvé.»

En effet, en petite quantité, l’ozone irrite légèrement les yeux, les poumons ou la peau.

Mais, en plus grande concentration, il peut provoquer des dégâts irréversibles sur le corps humain. Surtout sur celui des enfants qui serait plus sensible aux effets de l’ozone que celui des adultes.

swissinfo, Jean-Louis Thomas

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