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Rêveur de génie, Léonard de Vinci triomphe à Zurich

Un succès. Même si La Joconde n'était pas là en personne... Il s'agissait, dans ce cas, d'une copie. Keystone Archive

260 000 visiteurs en cinq mois. C'est le record absolu du Musée national de Zurich. Pour atteindre une telle affluence dans une exposition, il fallait un génie d'envergure universelle, l'artiste et l'inventeur de la Renaissance, Léonard de Vinci.

L’exposition s’est ouverte le 1er septembre 2000. Elle devait prendre fin le 7 janvier 2001. Mais étant donné son succès, elle a été prolongée de trois semaines. Jusqu’à mercredi soir 31 janvier 2001.

«La première raison de cet engouement, explique Bernard Schüle, responsable du projet et curateur de la section ethnographie du Musée national de Zurich, a trait à la renommée du personnage. Léonard de Vinci a marqué l’époque de la Renaissance. A tel point qu’aujourd’hui, chacun a au moins une vague idée sur le génial inventeur».

Autre raison: Léonard de Vinci a œuvré dans un très large spectre d’activités. Il a surtout touché à tous les domaines de la science, tout en étant un grand artiste.

«Pour qu’une exposition soit bien acceptée par le public, précise Bernard Schüle, il faut que les gens puissent facilement se retrouver dans le personnage et la présentation de ses œuvres. Or, qui n’a pas vu, une fois dans sa vie, la célèbre peinture de La Joconde de Léonard de Vinci?»

«En outre, complète Bernard Schüle, nombre de téléspectateurs nous ont confié s’être rappelés du reportage télévisuel de l’an dernier sur cet Anglais qui avait reconstruit le parachute de Léonard de Vinci et avec lequel il avait sauté.»

Autre recette d’un tel succès: non seulement cette exposition sur Léonard de Vinci a été conçue pour tous les niveaux d’érudition, mais aussi pour toutes les classes d’âge.

Ainsi, tel visiteur passionné aura pu approfondir le sujet, en s’asseyant devant chaque terminal d’ordinateur et en suivant l’intégralité du programme, durant cinq ou six heures.

Au contraire, des parents avec leurs enfants auront pu traverser l’exposition en trois quarts d’heure. Avec le plaisir d’avoir pu, par exemple, construire un pont en appliquant les règles de Léonard de Vinci. Rien de tel aujourd’hui qu’une exposition interactive pour les jeunes.

Un grand nombre d’inventions de Léonard de Vinci ont été reproduites dans des modèles en trois dimensions, posés sur des socles de façon à ce que chacun puisse les toucher, les mettre en mouvement. Comme la machine à mesurer le temps.

Ces objets ont été d’autant plus appréciés par le public que beaucoup d’entre eux sont restés à l’état de croquis sur le papier. Léonard de Vinci était avant tout un théoricien.

Sans doute ce succès est également dû au prêt de quatre œuvres originales supplémentaires. Qui, elles, n’ont pas fait le tour du monde durant six ans, d’Allemagne à Taïwan, en passant par les Etats-Unis, ou encore l’Afrique du Sud. La Suisse étant l’ultime étape de cette exposition Léonard de Vinci.

Dans ce lot, un folio du Codex atlanticus de la Bibliothèque de l’Université de Bâle qui n’avait jusqu’alors jamais été présenté. Plus précisément, un document de Léonard de Vinci qui présente des études sur la perspective spatiale, dont un pilier observé depuis le bas pour illustrer le principe de la réduction optique.

«Oui, nous avons réussi à rendre cette exposition obligatoire, ajoute Bernard Schüle, en ce sens qu’elle est devenue ce qu’on appelle un must culturel. Un peu à l’image de l’exposition du peintre Vincent Van Gogh à la Fondation Gianadda de Martigny».

Tout porte à croire en effet que l’exposition sur Léonard de Vinci a dépassé le caractère scientifique et l’aspect artistique pour toucher l’inconscient collectif, là où séjournent les archétypes de la mémoire collective en chaque individu, comme l’a démontré l’immense analyste zurichois, Carl-Gustav Jung.

C’est pourquoi, même s’il se doutait qu’il n’avait pas les matériaux pour réaliser ces machines, Léonard de Vinci n’en dessina pas moins, pour la postérité, un hélicoptère ou un parachute. C’était un visionnaire.

Paradoxe réjouissant, donc, que ce succès pour Léonard de Vinci en ces temps où l’homme se doit d’être avant tout productif à l’extrême.

Cet engouement pour un rêveur de génie démontre que cette soif de l’imaginaire demeure en bon nombre d’êtres humains. Comme pour alimenter l’espoir si important pour l’homme d’une vie meilleure.

Emmanuel Manzi

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