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Suisse-ONU: points de vue sur une absence remarquée

Pour l'ambassadeur Nordmann, «l’ONU élabore des réponses planétaires à des questions planétaires». Keystone

L´ONU compte 189 pays membres et la Suisse n´en fait pas partie. Une claire majorité de ses citoyens en avait rejeté l´idée en 1986. Ils devront à nouveau se prononcer d´ici deux ou trois ans. En attendant, son absence ne passe pas vraiment inaperçue.

Le colloque sur les forces et faiblesses de l’ONU organisé fin septembre par le Forum suisse de politique internationale aura donné l’occasion à plusieurs intervenants étrangers de dire leur étonnement, voire leur incompréhension du refus suisse d’entrer aux Nations unies.

L’ambassadeur François Nordmann, chef de la Mission suisse auprès des organisations internationales à Genève – convaincu que «l’ONU élabore des réponses planétaires à des questions planétaires» – s’en est fait indirectement l’écho en se référant au discours que le président du Kazakhstan avait tenu lors de l’adhésion de son pays à l’Organisation.

Voilà un pays qui se disait alors heureux d’avoir enfin des partenaires disposés à comprendre ses problèmes, sa situation particulière et son histoire. Un pays rassuré de se savoir moins isolé en cas de crise et considérant que sa propre politique étrangère s’en trouverait du même coup stimulée. Bref, et sans pousser trop loin la comparaison, c’est tout de même un sentiment que la Suisse pourrait elle aussi logiquement partager.

Le Russe Vladimir Petrovsky, directeur de l’Office des Nations unies à Genève, que certains considèrent non sans raison comme l’un des meilleurs avocats de la Genève internationale, dit de la Suisse qu’elle n’est pas seulement un pays hôte, mais déjà un vrai partenaire.

«Si l’on prend en compte, dit-il, qu’il y a pleine compatibilité de la Suisse et de l’ONU, et que l’un et l’autre tirent de considérables bénéfices de leur coopération, les Nations unies ont de quoi souhaiter fortement que le peuple suisse fasse le choix d’y adhérer, de saisir ainsi la chance d’y faire entendre sa voix et d’être présent dans ses principaux organes dirigeants».

Le Français Yves Berthelot, ancien secrétaire général adjoint de l’Organisation, tient à rappeler que la Suisse elle-même bénéficie de l’ordre mondial que l’ONU contribue à façonner et qu’il est bien difficile dans ces conditions de comprendre comment un pays peut profiter de cet effort collectif sans en être aussi l’un des acteurs.

«Les Nations unies sont une caisse de résonance pour les idées. En son sein, tout pays, tout fonctionnaire, tout délégué peut un jour se retrouver à l’origine d’une de ces idées appelées à faire son chemin. Dans l’histoire des Nations unies, il y a beaucoup d’idées auxquelles on peut attacher un nom, une personne, une date».

Cela dit, les conclusions de cette série de points de vue sur l’avenir des relations de la Suisse avec l’ONU, on les laissera à deux diplomates de pays – le Japon et le Brésil – qui, eux, réclament avec conviction un siège permanent au sein du Conseil de sécurité.

Le ministre Makoto Katsura se souvient qu’en 1945 des politiciens suisses imaginaient un statut de neutralité pour le Japon, et que cette idée avait trouvé quelque écho chez certains Japonais de l’époque, fatigués de la guerre. Mais, dit-il, «une telle neutralité aurait coûté si cher au Japon que son redressement économique n’aurait pas été possible».

Par contre, il n’y a pas si longtemps, Suisses et Japonais pensaient qu’ils ne participeraient jamais à des opérations internationales de maintien de la paix, les premiers en raison de leur neutralité, les seconds à cause de leur constitution qui interdit la guerre. Makoto Katsura en tire la conviction qu’un dialogue entre les deux pays devrait être renforcé à tous niveaux.

L’ambassadeur brésilien Celso Amorim concède volontiers que l’entrée à l’ONU n’apporterait pas de gros avantages à la Suisse «sauf peut-être dans le domaine psychologique.» Par contre, il est persuadé que le fait de n’appartenir à aucune alliance militaire lui permettra d’avoir «une voix plus forte que d’autres pays plus grands mais souvent trop alignés sur des grandes puissances». Et le diplomate de souhaiter que ce moment-là arrive bientôt.

Bernard Weissbrodt

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