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Swisscom «doit s’étendre à l’étranger»

Jens Alder, contrecarré dans sa stratégie. Keystone

Pour Jens Alder, Swisscom a subi des «dommages significatifs» et doit, pour survivre, reprendre ses projets d'acquisitions étrangères.

Le patron du «géant bleu» a condamné le manque d’argumentation du gouvernement et appelé à clarifier les relations avec le Conseil fédéral, propriétaire majoritaire.

Le 24 novembre dernier, le ministre des Finances Hans-Rudolf Merz annonçait que le Conseil fédéral avait l’intention de vendre ses parts (66%) dans Swisscom. Et peu après, qu’il était opposé à toute acquisition à l’étranger par Swisscom, tant que la Confédération resterait elle-même actionnaire majoritaire.

Le numéro un des télécoms suisses n’est pas autorisé à envisager la reprise d’autres sociétés de télécommunication étrangères de service public, que ce soit dans le secteur de la téléphonie fixe ou mobile. Et ce jusqu’au 21 décembre, date à laquelle le gouvernement publiera sa stratégie pour les quatre prochaines années.

Ce lundi, Swisscom a donc annoncé avoir mis fin aux négociations en cours avec la société irlandaise de télécommunications Eircom, obéissant ainsi à l’ordre du gouvernement, lequel estimait que l’affaire était trop risquée.

swissinfo: Quels dommages a subi Swisscom ces deux dernières semaines?

Jens Alder: Nous avons subi des dommages significatifs, en termes de crédibilité, en tant que partenaire de négociations.

swissinfo: Swisscom a-t-il vraiment besoin d’acheter des sociétés étrangères pour rester compétitif?

J. A.: Nous avons besoin d’investir à l’étranger ces quatre prochaines années pour maintenir nos activités en Suisse et pour nous développer. La crise que nous traversons actuellement est le résultat du blocage de cette stratégie.

Si l’interdiction d’investir à l’étranger dans ce laps de temps est absolue, notre position en Suisse deviendra intenable.

swissinfo: Y a-t-il un risque que Swisscom perde du terrain sur ses concurrents?

J. A.: Sur le plan international, il est certain que Swisscom a perdu du terrain, parce que d’autres compagnies européennes poursuivent leurs acquisitions et qu’elle vont donc se développer.

Maintenant, Swisscom a perdu l’occasion de reprendre des sociétés comme Eircom, à quoi nous travaillions depuis plus d’un an.

swissinfo: Politiciens et gestionnaires peuvent-il travailler ensemble?

J. A.: Nous avons besoin de définir clairement s’il est légitime ou non que, par exemple, les actionnaires puissent influencer la stratégie de la compagnie.

La loi sur les télécommunications prévoit que le gouvernement propose des buts stratégiques tous les quatre ans. Il se trouve que la dernière période se termine à la fin de cette année et que de nouveaux buts pour les quatre ans à venir sont en discussion.

Compte tenu de cela, il est légitime de discuter de la poursuite ou non d’investissements à l’étranger.

swissinfo: Vous avez critiqué le gouvernement pour son manque de qualification et de connaissance du sujet. Pouvez-vous en dire plus?

J. A.: Nous sommes profondément convaincus que notre stratégie est la meilleure pour le groupe et les actionnaires. Toute critique à l’encontre de cette stratégie doit être argumentée pour être productive. Or je ne vois aucun argument qui vienne étayer la critique.

Si on me dit que les télécoms sont une mauvaise industrie à long terme, je ne suis pas d’accord, parce que c’est au contraire une industrie extrêmement attrayante. Il est certain que c’est un domaine qui doit affronter de grands défis, mais nous avions un plan que nous étions en train d’appliquer – plutôt bien – pour assurer notre survie.

swissinfo: Avez-vous failli démissionner?

J. A.: Je ne tiens pas à m’étendre dans la presse sur ce que j’ai ressenti ces deux dernières semaines. Ce qui est clair, c’est que ma responsabilité implique que je reste à mon poste jusqu’à ce que le cap soit corrigé. Ensuite, nous verrons ce qu’il adviendra.

Interview swissinfo, Matthew Allen
(Traduction et adaptation de l’anglais: Isabelle Eichenberger)

Le 24 novembre, le Conseil fédéral a annoncé son intention de vendre ses parts majoritaires de 66% dans Swisscom.
Le lendemain, il interdisait au groupe toute acquisition à l’étranger.
Le 21 décembre, les autorités fédérales doivent publier leur stratégie pour les quatre prochaines années.

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